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#Femmes2022 l Quel niveau d’ambition chez les can­di­dats à l’élection en matière de san­té des femmes ?

Troisième épi­sode d'une série de chro­niques de l'association fémi­niste Politiqu'elles publiées sur Causette.fr, qui, toutes les deux semaines, décrypte les pro­grammes des candidat·es à l'élection pré­si­den­tielle en matière de droits des femmes. Aujourd'hui, focus sur la san­té des femmes.

cartographie SANTÉ

La san­té fait par­tie des pre­mières pré­oc­cu­pa­tions des Françaises et Français en vue des pro­chaines élec­tions, juste après le pou­voir d’achat selon un son­dage Sopra Steria réa­li­sé pour France Inter en jan­vier 2022. La san­té des femmes désigne un sous-​ensemble de la san­té de la popu­la­tion incluant toutes les affec­tions qui concernent habi­tuel­le­ment ou de façon dif­fé­ren­ciée les femmes (mala­dies car­dio­vas­cu­laires, pre­mière cause de mor­ta­li­té des femmes, cer­tains can­cers, l'ostéoporose, l'anémie, etc), mais aus­si les sujets liés à la méde­cine de la repro­duc­tion, qui reste encore lar­ge­ment à la charge des femmes, ain­si que les com­por­te­ments et les inéga­li­tés de trai­te­ments indui­sant des consé­quences spé­ci­fiques sur la san­té des femmes (vio­lences domes­tiques, moindre accès à cer­tains soins ou à l'éducation, etc).

Le champ de la san­té n’est évi­dem­ment pas exempt d’inégalités entre les femmes et les hommes. Bien que leur espé­rance de vie soit plus longue, les femmes vivent pro­por­tion­nel­le­ment en moins bonne san­té que les hommes avec un besoin plus récur­rent aux soins selon l’OMS. En 2016, l’Académie de méde­cine aler­tait sur le fait que les femmes étaient jusqu’à deux fois plus sujettes aux effets secon­daires des médi­ca­ments que les hommes entraî­nant "un coût humain et finan­cier exor­bi­tant". Ce n’est que depuis très récem­ment que la prise en compte du genre est ins­ti­tu­tion­na­li­sée dans les poli­tiques de san­té. Par exemple en France, le Comité d'éthique de l'Inserm s’est doté seule­ment en 2013 du groupe de tra­vail Genre et recherche en santé.

Lire aus­si : #Femmes2022 l Égalité pro­fes­sion­nelle et éman­ci­pa­tion éco­no­mique : que pré­voient les prin­ci­paux can­di­dates et candidats ?

Cette crise a aus­si exa­cer­bé des dys­fonc­tion­ne­ments du sys­tème de san­té qui ont été par­ti­cu­liè­re­ment défa­vo­rables pour la san­té des femmes. Le confi­ne­ment a dras­ti­que­ment réduit l’activité médi­cale dans des ter­ri­toires ruraux et ultra­ma­rins où l’offre de soins était déjà inadap­tée. Le renon­ce­ment aux soins par les femmes s’est éga­le­ment accen­tué : 64% des femmes déclarent avoir renon­cé à un acte médi­cal dont elles avaient besoin, contre 53% des hommes selon une étude de l’Assurance Maladie. L’accès des femmes à leurs droits repro­duc­tifs et sexuels fut éga­le­ment entra­vé avec pour exemple des dépas­se­ments subis et récur­rents du délai de recours à l’IVG. Le Planning Familial rap­por­tait pen­dant le pre­mier confi­ne­ment que les signa­le­ments de dif­fi­cul­tés liées à l’IVG ou la contra­cep­tion ont aug­men­té de 320 % par rap­port à la même période de 2019. En plus des dif­fi­cul­tés ren­con­trées par les femmes pen­dant cette période, une étude du CESE inti­tu­lée « Droits sexuels et repro­duc­tifs en Europe : entre menaces et pro­grès » mon­trait déjà avant la pan­dé­mie l’existence d’un écart entre la loi et la pra­tique en matière de droits sexuels dû à des fac­teurs cultu­rels mais aus­si la pau­vre­té de l’offre de soins.

Alors qu’en 2017, ce terme était qua­si­ment absent du débat, la san­té des femmes est pré­sen­tée comme une prio­ri­té par plu­sieurs can­di­dates et can­di­dats à l’élection pré­si­den­tielle, à droite comme à gauche. Cette nou­velle visi­bi­li­té et prise de conscience est-​elle gage d’ambition ? Nous ana­ly­sons ci-​dessous les prin­ci­pales mesures annon­cées dans les pro­grammes des pré­ten­dantes et pré­ten­dants à l’Elysée en 2022.

De gauche à droite, des posi­tions dicho­to­miques en matière de droits sexuels et reproductifs

L’approche en termes de droits repro­duc­tifs et sexuels est le thème rela­tif à la san­té des femmes le plus cli­vant entre can­di­dates et can­di­dats. Le 23 février der­nier, l’Assemblée natio­nale a adop­té défi­ni­ti­ve­ment le 23 février der­nier la pro­po­si­tion de loi sur l’allongement du délai de l’IVG de 12 à 14 semaines por­tée par la dépu­tée Albane Gaillot. Une avan­cée majeure pour les droits des femmes et leur san­té, défen­dues par les orga­ni­sa­tions de san­té et asso­cia­tions fémi­nistes depuis plu­sieurs années. Le débat autour de cet allon­ge­ment per­met d’établir plu­sieurs caté­go­ries de can­di­dates et can­di­dats. Le pré­sident sor­tant, nou­vel­le­ment can­di­dat à sa suc­ces­sion, s’était décla­ré dans une inter­view dans ELLE défa­vo­rable, à titre per­son­nel, à l’allongement à 14 semaines du délai de recours à l’IVG, bien que le groupe par­le­men­taire majo­ri­taire ait fina­le­ment voté en faveur de l’adoption de la loi Gaillot. Valérie Pécresse, Nicolas Dupont Aignan et Marine Le Pen se sont éga­le­ment oppo­sés à cette réforme. Eric Zemmour à quant à lui clai­re­ment signi­fié sa volon­té de reve­nir sur cette loi s’il arri­vait au pouvoir. 

A gauche, on relève un sou­tien géné­ral à cet allon­ge­ment avec des pro­po­si­tions pour aller plus loin. Yannick Jadot, Fabien Roussel et Jean-​Luc Mélenchon pro­posent ain­si de consti­tu­tion­na­li­ser le droit l’IVG et affiche une ambi­tion euro­péenne pour garan­tir ce droit au niveau de l’UE. Anne Hidalgo, Philippe Poutou, Fabien Roussel et Jean-​Luc Mélenchon se sont éga­le­ment expri­més pour la sup­pres­sion de la clause de double conscience, dis­po­si­tion qui n’avait pas pu être main­te­nue dans la loi Gaillot. Tout comme le can­di­dat éco­lo­giste, Roussel sou­haite ouvrir aux sages-​femmes la pos­si­bi­li­té de réa­li­ser des IVG (avec for­ma­tion et rému­né­ra­tion en consé­quence), mesure éga­le­ment sup­pri­mée de la pro­po­si­tion de loi ini­tiale de la dépu­tée Albane Gaillot. Philippe Poutou défend quant à lui un inves­tis­se­ment mas­sif pour garan­tir l’accès à l’IVG pen­dant un délai pro­lon­gé à 24 semaines. Jean-​Luc Mélenchon comme Fabien Roussel pro­posent la gra­tui­té totale de l’avortement. 

En France, la procréa­tion médi­ca­le­ment assis­tée (PMA) est auto­ri­sée aux couples for­més de deux femmes et aux femmes céli­ba­taires depuis la pro­mul­ga­tion de la der­nière loi de bioé­thique en 2021. Plus de 7 000 pro­jets de PMA pour des femmes seules ou des couples les­biens ont ain­si été comp­ta­bi­li­sés depuis la publi­ca­tion du décret d’application de sep­tembre 2021 selon le ministre de la Santé Olivier Véran. Certains can­di­dats se sont expri­més sur la ques­tion. Jean-​Luc Mélenchon et Phillippe Poutou recon­naissent ain­si le droit à l’accès PMA pour toutes les femmes et affichent la volon­té d’ouvir la pos­si­bi­li­té d’y avoir recours aux per­sonnes trans­genres. Ce der­nier can­di­dat se posi­tionne pour un rem­bour­se­ment inté­gral de tout le par­cours de PMA, et l’autorisation de la méthode ROPA qui est une tech­nique exclu­sive des couples les­biens où une des mères est don­neuse de l’ovocyte et l’autre por­teuse. A l’extrême inverse, le can­di­dat du par­ti Reconquête sou­haite mettre fin à la PMA pour les femmes seules et les couples de femmes.

Du point de vue de la contra­cep­tion, le gou­ver­ne­ment Macron a mis en place la gra­tui­té de cer­tains moyens de contra­cep­tion pour les jeunes filles de moins de 25 ans. Il s’agit d’une étape impor­tante pour amé­lio­rer la san­té des jeunes femmes bien que l’on puisse regret­ter que cer­tains modes de contra­cep­tion soient exclus du dis­po­si­tif tels que les moyens de contra­cep­tion mas­cu­lins. Des asso­cia­tions réclament éga­le­ment des efforts sup­plé­men­taires en termes de pré­ven­tion et de connais­sance des moyens de contra­cep­tions, notam­ment chez les jeunes. Dans ce contexte, Anne Hidalgo, Philippe Poutou, Jean-​Luc Mélenchon et Fabien Roussel affirment vou­loir répondre à ces manques en défen­dant un rem­bour­se­ment total de tous les moyens de contra­cep­tion sans limite d’âge. Roussel déve­loppe un dis­cours inté­res­sant pour une meilleure répar­ti­tion de la charge men­tale de la contra­cep­tion en pro­po­sant un sou­tien de la contra­cep­tion mas­cu­line de la part de l’Etat, notam­ment via des cam­pagnes de com­mu­ni­ca­tion sur la contra­cep­tion mas­cu­line et le finan­ce­ment de la recherche à ce sujet.

Enfin, la pré­ca­ri­té mens­truelle est éga­le­ment un sujet d’attention pour plu­sieurs des can­di­dates et can­di­dats à l’élection. Dans le cadre des audi­tions de Politiqu’elles des dif­fé­rentes équipes de cam­pagne, Florence Portelli, porte-​parole de Valérie Pécresse, rap­por­tait que la can­di­date répu­bli­caine en ferait une “cause impor­tante” et qu’elle bais­se­ra la TVA sur les pro­tec­tions hygié­niques appli­quant le taux super réduit de 2.2%, tout en défen­dant la fin du tabou cultu­rel autour des règles. Fabien Roussel entend rendre gra­tuites les pro­tec­tions hygié­niques afin de lut­ter contre la pré­ca­ri­té mens­truelle et les rendre dis­po­nibles dans tous les lieux et éta­blis­se­ments publics grâce à des dis­tri­bu­teurs. Du côté du can­di­dat sor­tant, le gou­ver­ne­ment d’Emmanuel Macron a par­ti­cu­liè­re­ment inves­ti le sujet ces cinq der­nières années. Récemment, le ministre de la Santé, Olivier Véran, et la ministre délé­guée char­gée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno, ont annon­cé une hausse du bud­get consa­cré à la lutte contre la pré­ca­ri­té mens­truelle, pas­sant de 1 à 5 mil­lions d’euros.

Affections spé­ci­fiques aux femmes : seule l’endométriose est trai­tée par certain·es prétendant·es à l’Elysée

La fin de man­dat a été mar­quée par une mesure signi­fi­ca­tive pour la san­té des femmes : le lan­ce­ment d’une stra­té­gie de lutte natio­nale contre l’endo­mé­triose. L’objectif prin­ci­pal est de déve­lop­per la recherche sur cette mala­die en déblo­quant des fonds et ceci à toutes les échelles. Enfin, Emmanuel Macron a énon­cé la volon­té de "déve­lop­per ce qu'on pour­rait appe­ler un 'réflexe endo­mé­triose' auprès de tous les publics : à l'école, à l'université, à la mai­son, au bureau, et même, et sur­tout dirais-​je, dans les milieux médi­caux". On peut néan­moins rele­ver la recon­nais­sance tar­dive de cet enjeu pour les femmes dans l’agenda gou­ver­ne­men­tal. Il n’est pas pré­vu que l'endométriose soit recon­nue comme affec­tion de longue durée (ALD). Le gou­ver­ne­ment n’a d’ailleurs pas clai­re­ment sou­te­nu la réso­lu­tion por­tée par la dépu­tée Clémentine Autain visant l’endométriose comme une ALD (contrai­re­ment au groupe par­le­men­taire LREM). Les femmes souf­frant de cette mala­die ne peuvent donc pas béné­fi­cier jusqu’à pré­sent d’une prise en charge à 100% des soins, des arrêts mala­die sans délai de carence et d’un amé­na­ge­ment du temps de tra­vail. En réponse, plu­sieurs can­di­dats et can­di­dates abordent le sujet dans leur pro­gramme. Anne Hidalgo sou­haite que l’endométriose soit recon­nue comme affec­tion de longue durée. Valérie Pécresse sou­haite éga­le­ment mettre en place des congés spé­ci­fiques en cas de règles dou­lou­reuses ou d’endométriose.

De façon géné­rale, le domaine de la recherche pour les mala­dies spé­ci­fiques aux femmes est très peu abor­dé par les can­di­dates et can­di­dats. Jean-​Luc Mélenchon pro­pose de sou­te­nir la recherche médi­cale sur les mala­dies gyné­co­lo­giques, incluant l’endométriose. Anne Hidalgo appelle à une élé­va­tion du finan­ce­ment de la recherche sur la san­té des femmes et une meilleure inclu­sion de celles dans les essais cli­niques. En aval de la recherche, Fabien Roussel évoque une mise en place d’un plan natio­nal pour la for­ma­tion médico-​sociale des pro­fes­sion­nels de san­té sur les mala­dies et symp­tômes spé­ci­fiques aux femmes.

De timides pro­po­si­tions en matière de lutte contre les vio­lences faites aux femmes en lien avec leur santé

Aux marges des sujets de san­té repro­duc­tive et de vio­lences, la pro­blé­ma­tique des vio­lences obs­té­tri­cales et gyné­co­lo­giques reste rela­ti­ve­ment peu mise en avant dans les pro­grammes des can­di­dates et can­di­dats. Un rap­port sur les vio­lences gyné­co­lo­giques et obs­té­tri­cales avait été ren­du à Marlène Schiappa, alors secré­taire d’Etat au Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes. Néanmoins, mal­gré la recon­nais­sance de ce type de vio­lences, ce rap­port publié en 2018 n’a pas abou­ti à la prise de mesures concrètes et satis­fai­santes. Face à ce constat, Fabien Roussel, Anne Hidalgo, Jean-​Luc Mélenchon et Yannick Jadot y font expli­ci­te­ment réfé­rence dans leurs pro­grammes et lors de nos entre­tiens avec leurs équipes de cam­pagne. Le can­di­dat com­mu­niste pro­pose la mise en place d’un plan​de lutte contre les vio­lences gyné­co­lo­giques et obs­té­tri­cales. Le can­di­dat d’EELV sou­haite que la lutte contre les vio­lences obs­té­tri­cales et gyné­co­lo­giques se fasse par des pro­cé­dures de signa­le­ment et le strict res­pect de la loi.

Alors qu’au cours de sa vie, une femme sur trois dans le monde est sus­cep­tible de connaître des vio­lences phy­siques et/​ou sexuelles, la prise en charge des vic­times demeure mal­heu­reu­se­ment un sujet rela­tif à la san­té des femmes. Dans le contexte actuel de guerre en Ukraine, il appa­rait néces­saire de sou­li­gner que selon l’OMS, la san­té des femmes et des filles vivant dans des zones de conflit ou qui sont contraintes de se dépla­cer est par­ti­cu­liè­re­ment mise à mal en rai­son des per­tur­ba­tions dans le fonc­tion­ne­ment des sys­tèmes de san­té, d’obstacles accrus pour accé­der aux soins de san­té et de l’utilisation du viol et d’autres formes de vio­lence comme armes de guerre. Concernant l’accueil des vic­times, le can­di­dat Fabien Roussel pro­pose de créer, dans chaque dépar­te­ment, des centres psycho-​traumatiques avec un accueil médico-​judiciaire. Cette pro­po­si­tion de centre d’accueil dépar­te­men­tal est éga­le­ment pré­co­ni­sée par Jean-​Luc Mélenchon. Le can­di­dat Philippe Poutou sou­haite éga­le­ment mettre en place des moyens pour accueillir les femmes vic­times de vio­lences et la régu­la­ri­sa­tion de toutes les sans-​papiers, l’asile pour les femmes vic­times de vio­lences, l’accès immé­diat aux soins pour toutes.

Des pro­po­si­tions de réformes du sys­tème de san­té pou­vant béné­fi­cier direc­te­ment aux femmes

A la lumière de la crise sani­taire, les pro­grammes des pré­ten­dantes et pré­ten­dants à l’Elysée pro­posent presque tous des mesures pour ren­for­cer les moyens du sys­tème de san­té et des hôpi­taux. La ques­tion de la lutte contre les déserts médi­caux est par­ti­cu­liè­re­ment récur­rente or ceux-​ci touchent par­ti­cu­liè­re­ment les femmes, bien que les enjeux d’égalité femmes-​hommes soient très peu rele­vés dans le desi­gn des poli­tiques rurales jusqu’à pré­sent. Un rap­port par­le­men­taire « Femmes dans les ter­ri­toires ruraux » a été ren­du en octobre 2021 à la ministre Elisabeth Moreno sou­li­gnant ce manque. Selon ce docu­ment, 13 dépar­te­ments en France étaient dépour­vus de gyné­co­logues et la fer­me­ture de mater­ni­tés en série a fra­gi­li­sé la cou­ver­ture médi­cale des ter­ri­toires ruraux. Anne Hidalgo et Yannick Jadot mettent expli­ci­te­ment en avant la lutte contre les déserts médi­caux comme outil d’amélioration de la san­té des femmes. Macron dans son inter­ven­tion du 7 mars 2022 sur le LCI « Face aux Françaises » men­tion­nait éga­le­ment la ques­tion des déserts médi­caux comme un levier signi­fi­ca­tif. Jean-​Luc Mélenchon et Fabien Roussel insistent sur le sujet sur la néces­si­té de s’opposer à la fer­me­ture mas­sive de mater­ni­tés en zone rurale. La can­di­date Marine Le Pen pro­pose éga­le­ment de mettre fin de façon géné­rale à la fer­me­ture de mater­ni­té et de créer des inci­ta­tions finan­cières fortes contre les déserts médi­caux. En matière d’accès aux soins, Anne Hidalgo entend sou­te­nir la défense de l'hôpital public et ses ser­vices. Lors d’un entre­tien orga­ni­sé par notre asso­cia­tion avec son équipe de cam­pagne, sa porte-​parole Gabrielle Siry-​Houari a affir­mé que “les soins offerts et finan­cés par la soli­da­ri­té sont des mesures qui béné­fi­cient aux femmes qui sont sou­vent plus précaires”. 

La plu­part des can­di­dates et can­di­dats appellent à la reva­lo­ri­sa­tion des pro­fes­sion­nelles et pro­fes­sion­nels de san­té, en par­ti­cu­lier des filières fémi­ni­sées mises en lumière par la crise. Valérie Pécresse sou­haite ain­si aug­men­ter les res­pon­sa­bi­li­tés des sages-​femmes et infir­mières dans le par­cours de soins, en ren­for­çant les pra­tiques avan­cées des infir­mières et les délé­ga­tions de tâches pour les sages-​femmes. Elle pro­pose éga­le­ment une reva­lo­ri­sa­tion de leurs salaires, sans pour autant four­nir d’indications chif­frées. Anne Hidalgo pro­pose de por­ter les for­ma­tions de soi­gnants à “1 250 sages-​femmes par an, 25 000 infir­miers et aides-​soignantes” et la reva­lo­ri­sa­tion des rému­né­ra­tions et car­rières pour rendre les métiers de l'hôpital attrac­tif. Jean-​Luc Mélenchon, Fabien Roussel et Yannick sou­haitent aus­si enga­ger une reva­lo­ri­sa­tion des métiers de la san­té en pre­mière ligne. Marine Le Pen sou­haite ouvrir 10 000 places sup­plé­men­taires dans les ins­ti­tuts de for­ma­tion en soins infir­miers et les centres de for­ma­tion d’aides-soignants et créer une indem­ni­té spé­ci­fique de 300 € men­suels pour les aidants vivant au domi­cile d’un proche dépen­dant ou l’accueillant à son domicile.

Certains can­di­dats mettent en lumière la thé­ma­tique de la san­té envi­ron­ne­men­tale et son lien avec la san­té des femmes. Yannick Jadot et Fabien Roussel pro­posent ain­si de prendre en compte ce lien dans leurs poli­tiques de san­té envi­ron­ne­men­tale dans la mesure les femmes exer­ce­raient des pro­fes­sions par­fois plus expo­sées à la pol­lu­tion (femme de ménage, aides à domi­ciles, infir­mières) et auraient davan­tage d’incitations à avoir recours dans leur quo­ti­dien à des pro­duits chi­miques dans le domaine des cos­mé­tiques par exemple. La can­di­date socia­liste déclare dans son pro­gramme vou­loir por­ter une “atten­tion par­ti­cu­lière aux scan­dales envi­ron­ne­men­taux” et pro­pose que la Sécurité sociale prenne “inté­gra­le­ment en charge les frais médi­caux qui font suite aux catas­trophes sani­taires” qui concernent beau­coup de femmes.

Un der­nier sujet à rele­ver est celui de la san­té men­tale. Anne Hidalgo a annon­cé que ce thème serait, si elle est élue à l’élection pré­si­den­tielle, la « grande cause » de son man­dat. Elle sou­haite par­ti­cu­liè­re­ment inves­tir la ques­tion de la san­té au tra­vail avec une recon­nais­sance du bur­nout comme mala­die pro­fes­sion­nelle, phé­no­mène tou­chant davan­tage les femmes selon cer­taines études. D’autre part, lors de l’entretien de notre avec l’équipe de Fabien Roussel, Hélène Bidard a sou­li­gné l’engagement du can­di­dat contre les cyber­vio­lences et leur ana­lyse comme enjeux de san­té publique chez les jeunes. Sachant que les jeunes filles sont davan­tage tou­chées par les phé­no­mènes de cyber­vio­lences selon le Centre Hubertine que les jeunes gar­çons, ce sujet appa­raît éga­le­ment par­ti­cu­liè­re­ment liée à la san­té des jeunes femmes. 

Nos conclu­sions et ce qu’il manque à ce stade

La san­té des femmes béné­fi­cie d’une nou­velle visi­bi­li­té dans le débat public. On remarque qu’il s’agit d’un sujet rela­ti­ve­ment trans­ver­sal, abor­dé, plus ou moins direc­te­ment, par tout le spectre politique. 

Le quin­quen­nat a été mar­qué par des avan­cées notables en matière de droits sexuels et repro­duc­tifs. Le rap­port d’Oxfam du 3 mars 2022 sur la “grande cause du quin­quen­nat” qua­li­fiait d’encourageant le bilan du gou­ver­ne­ment en matière de droits sexuels et repro­duc­tifs. Bien enten­du, cer­taines mesures doivent être appro­fon­dies et demeurent inache­vées comme le montre l’exemple de la lutte contre l’endométriose. Il est aus­si regret­table que le can­di­dat sor­tant se soit à titre per­son­nel expri­mé contre l’allongement du délai de recours à l’IVG à 14 semaines, une avan­cée his­to­rique pour­tant en matière de san­té des femmes. Sur ce sujet, un cli­vage droite-​gauche signi­fi­ca­tif émerge avec des oppo­si­tions à droite et des pro­po­si­tions à gauche sou­hai­tant aller plus loin pour sécu­ri­ser l’accès à ce droit pour toutes les femmes. Ce cli­vage s’estompe en matière de lutte contre les déserts médi­caux et ren­for­ce­ment des moyens du sys­tème de san­té abor­dés dans tous les pro­grammes, sans que soit néces­sai­re­ment fait réfé­rence aux béné­fices spé­ci­fiques pour les femmes. On sou­li­gne­ra, en ligne avec les conclu­sions du rap­port « Femmes et ter­ri­toires ruraux », l’importance de ren­for­cer le volet éga­li­té femmes-​hommes des poli­tiques publiques lié à la rura­li­té, notam­ment en matière de san­té. De façon géné­rale, la san­té des femmes n’est que très peu trai­tée par groupes dif­fé­ren­ciés (par exemple les femmes pré­caires, les femmes âgées mais aus­si les femmes handicapées).

Les can­di­dats d’opposition à gauche et Valérie Pécresse à droite pro­posent des mesures spé­ci­fiques sur la san­té des femmes. Les sujets de la pré­ca­ri­té mens­truelle, de l’endométriose et à gauche, des droits sexuels et repro­duc­tifs sont les thèmes les plus évo­qués dans ce cadre. Les besoins concer­nant la recherche et la prise en charge des affec­tions majo­ri­tai­re­ment ou spé­ci­fi­que­ment fémi­nines sont très peu abor­dés. En dehors de Fabien Roussel, Jean-​Luc Mélenchon et Anne Hidalgo, il sem­ble­rait qu’à ce stade, les pré­ten­dantes et pré­ten­dants à l’élection pré­si­den­tielle n'investissent pas ce thème, pour­tant obs­tacles majeurs et his­to­riques à la san­té des femmes. Par exemple, 56% des Françaises meurent de mala­dies car­dio­vas­cu­laires contre 46% des hommes, dont une par­tie du fait de mau­vais diag­nos­tic. Que ce soit dans nos échanges avec les équipes de cam­pagne ou dans les pro­grammes, nous n’avons pu aucune men­tion de cet enjeu majeur de san­té publique. La prise en charge de la méno­pause n’a été men­tion­née que par l’équipe de cam­pagne de Valérie Pécresse, sans mesure concrète sur le sujet. On déplore éga­le­ment le manque d’ambition géné­rale au sujet des vio­lences gyné­co­lo­giques et obs­té­tri­cales. Il devient urgent que les pou­voirs publics se sai­sissent de cet enjeu au-​delà d’un simple état de fait.

Si la place des enjeux de san­té est signi­fi­ca­ti­ve­ment impor­tante dans les dif­fé­rents pro­grammes des can­di­dates et can­di­dats, une ana­lyse robuste des pro­blé­ma­tiques liées au genre fait défaut dans la plu­part des pro­grammes. Ainsi, une approche plus holis­tique de la ques­tion de la recherche à la prise en charge des patientes en pas­sant par son diag­nos­tic, devra être déve­lop­pée pour répondre à ces enjeux.


Cet article a été réa­li­sé par l’association trans­par­ti­sane Politiqu’elles dans le cadre du cycle de chro­niques « Femmes 2022 » en par­te­na­riat avec Causette. L’association s’appuie sur l’analyse des pro­grammes et décla­ra­tions des can­di­dates et can­di­dats ain­si que sur des audi­tions des res­pon­sables thé­ma­tiques au sein des dif­fé­rentes de cam­pagnes. L’équipe pro­jet est pilo­tée par le binôme Sandrine Elmi Hersi et Agathe Hervey.

La présidente-​fondatrice de l’association Fatima El Ouasdi, éga­le­ment élue LREM locale, n’a pas sou­hai­té prendre part au pro­jet compte tenu de ses enga­ge­ments poli­tiques actuels, afin de garan­tir la neu­tra­li­té poli­tique de l’analyse.

Dans un sou­ci de trans­pa­rence les membres de l’équipe du pro­jet ont éga­le­ment tenu à par­ta­ger leurs pré­cé­dentes acti­vi­tés en lieu avec la poli­tique. Agathe Hervey a été col­la­bo­ra­trice par­le­men­taire d'Erwan Balanant (MODEM) jusqu'au 11 février. Sandrine Elmi Hersi a été col­la­bo­ra­trice de la dépu­tée Paula Forteza en 2020, ain­si que can­di­date lors des der­nières muni­ci­pales sur la liste Nouveau Paris (por­tée par Cédric Villani). Mathilde Lebon, éga­le­ment membre du pro­jet, a par­ti­ci­pé aux pri­maires du par­ti réunion­nais Banian en 2021.

Un pre­mier rap­port, “Femmes 2017”, avait été publié par l’association lors de la pré­cé­dente cam­pagne pré­si­den­tielle. Plus d’infos : [email protected]

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