Nestlé vient d’être épinglé par une enquête de l’ONG suisse, Public Eye, révélant que, si le leader mondial de la nutrition infantile n’ajoute pas de sucre dans ses produits alimentaires infantiles vendus en Europe, ce n’est pas le cas pour les produits vendus dans des pays à revenus plus faibles.
Chez Nestlé, l’éthique semble être à géométrie variable et les bébés pas tous et toutes logé·es à la même enseigne. Une enquête publiée hier, mercredi 17 avril, par l’ONG suisse Public Eye, révèle que deux des marques de produits alimentaires infantiles, Cerelac et Nido, vendues par le leader du marché mondial de la nutrition infantile contiennent des niveaux élevés de sucre ajouté, sous forme de miel ou de saccharose.
Problème, ce niveau de sucre a été retrouvé uniquement dans des produits vendus dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires, soit en Afrique, en Asie et en Amérique latine, où Nestlé promeut justement “ces produits comme sains et essentiels au développement des enfants”, souligne l’ONG. A contrario, les mêmes produits vendus en Suisse et dans les principaux pays européens n’en contiennent pas.
Un carré de sucre par portion
L’enquête intitulée, “Comment Nestlé rend les enfants accros au sucre dans les pays à revenu plus faible” a examiné près de cent cinquante produits infantiles vendus en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Résultat, la quasi-totalité des céréales de la marque Cerelac destinée aux bébés dès 6 mois contient en moyenne près de 4 grammes de sucre ajouté par portion, ce qui équivaut à environ un carré de sucre. La quantité la plus importante – 7,3 grammes par portion – a été observée aux Philippines. La marque de lait infantile en poudre Nido est aussi concernée. Produite pour les enfants de 1 à 3 ans, elle contient près de 2 grammes de sucre par portion en moyenne lorsqu’elle est vendue dans des pays pauvres. Et c’est au Panama que l’ONG a détecté la quantité maximale avec 5,3 g.
Surtout, que ce soit pour la marque Cerelac ou Nido, aucune trace de sucre ajouté n’a été détectée dans les produits vendus en Europe. Nestlé recommande en effet dans sa communication publique sur son site Internet de ne pas “ajouter du sucre” dans les aliments préparés pour les bébés. Des recommandations d’ailleurs également soutenues par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En 2022, l’OMS appelait ainsi à bannir les sucres ajoutés dans la nourriture pour les bébés.
"Double standard"
Dans son enquête, Publie Eye dénonce donc “un double standard injustifiable et problématique d’un point de vue éthique et de santé publique en particulier au regard de l’épidémie d’obésité dont sont victimes les pays à plus faible revenu”. Interrogée par la RTS, la marque Nestlé assure “respecter le cadre légal des différents marchés sur lesquels ses produits sont distribués”. Mais selon l’ONG, justement, la marque “exploite la faiblesse des réglementations en vigueur pour continuer à vendre de tels produits dans les pays à plus bas revenus”. Pire, Nestlé n’hésiterait pas à user d’une communication “agressive” pour promouvoir ces produits en ayant recours “à des professionnel·les de la santé ainsi qu’à des influenceurs et des influenceuses” dans le but de “renforcer la confiance des parents envers ses produits pourtant très sucrés”.
En parallèle de la publication de son enquête, l’ONG suisse a lancé une pétition sur son site pour demander à Nestlé de “renoncer immédiatement à l’ajout de sucre dans les produits destinés aux enfants de moins de 3 ans”. “Tous les bébés sont égaux et les directives de l’OMS sont valables dans le monde entier”, a rappelé l’ONG.