Sans titre 1 1

Dua Lipa, Rachel Chinouriri, Girl in Red, St Vincent… nos recos musique du mois de mai

Avec ses innom­brables jours fériés et ponts, le mois de mai est pro­pice au repos et au relâ­che­ment. L’occasion de se plon­ger dans les der­nières sor­ties musi­cales, avec les retours de la pop star Dua Lipa et de l’artiste indé St. Vincent, la confir­ma­tion du talent de la Norvégienne Girl in Red, et l’arrivée remar­quée de la jeune Anglaise Rachel Chinouriri.

Radical Optimism, de Dua Lipa
Capture decran 2024 05 03 a 4.42.51 PM 1

Quatre ans après avoir pas­sé avec suc­cès le cap fati­dique du deuxième album et s’être impo­sée comme une véri­table pop star, grâce aux irré­sis­tibles sono­ri­tés dis­co de Future Nostalgia, Dua Lipa a la lourde tâche de faire mieux, ou au moins aus­si bien, avec Radical Optimism. Pas facile, sur­tout que ce troi­sième disque arrive quelques semaines seule­ment après le retour remar­qué de ses res­pec­tées consœurs Ariana Grande (Eternal Sunshine) et Taylor Swift (The Tortured Poets Department), dont l’aura et l’influence sur la pop ne sont plus à démon­trer. Produit sous la hou­lette de Kevin Parker, lea­der du groupe indé Tame Impala, cet album devait remettre à l’honneur la pop psy­ché­dé­lique et la Britpop des années 1990. C’est, en tout cas, ce qu’avait pro­mis la chan­teuse bri­tan­nique, ori­gi­naire du Kosovo, en amont de sa sor­tie. Houdini et Training Season, les deux pre­miers singles du pro­jet, lais­saient d’ailleurs entre­voir une prise de risque musi­cale. Il n’en est fina­le­ment rien. Ou alors, seule­ment, par de très légères touches. Dua Lipa explore toutes les facettes de l’amour, des débuts exci­tants d’une rela­tion (excel­lente piste d’ouverture End of an Era) à sa fin (These Walls, Happy for You), en pas­sant par ses hauts et ses bas, sur des rythmes pop dan­sants plu­tôt tra­di­tion­nels, mais néan­moins très agréables. Radical Optimism s’écoute sans aucun déplai­sir, nous sur­prend même par­fois avec quelques envo­lées auda­cieuses (Watcha Doing, French Exit et Falling Forever), mais on aime­rait que l’artiste fende un peu plus l’armure, notam­ment dans l’écriture, et retrouve la fougue plus per­son­nelle de ses débuts.

Capture decran 2024 05 03 a 4.43.08 PM 3

Radical Optimism, de Dua Lipa, © WEA.

What a Devastating Turn of Events, de Rachel Chinouriri
Capture decran 2024 05 03 a 4.48.51 PM 2
© Warner/​Parlophone.

Dans le flux de musique pro­duite et pro­po­sée en conti­nu à notre époque, il est par­fois facile de se lais­ser débor­der, de se réfu­gier auprès des artistes que l’on connaît et d’écouter, par-​ci par-​là, quelques chan­sons de talents émergent·es. Il ne fau­drait néan­moins pas pas­ser à côté de la chan­teuse bri­tan­nique Rachel Chinouriri et de son pre­mier disque What a Devastating Turn of Events. Car il est si rare aujourd’hui d’avoir un album aus­si fort et cohé­rent dans la qua­li­té des chan­sons, autant du point de vue de l’écriture que de l’orchestration. Du haut de ses 25 ans, l’autrice-compositrice anglaise, d’origine zim­babwéenne, aborde avec beau­coup de matu­ri­té et de réflexion des sujets lourds, comme les dif­fi­ciles peines de cœur (My Everything, All I Ever Asked), la détes­ta­tion de soi (My Blood), les dik­tats pesants de la socié­té (I Hate Myself) et les pen­sées sui­ci­daires (What a Devastating Turn of Events), à tra­vers la mort de sa cou­sine, qui s’est ôtée la vie après une rup­ture. Mais Rachel Chinouriri fait aus­si preuve de légè­re­té et d’humour, sur Neved Need Me, hymne pop-​rock qui la voit se déta­cher d’un ex toxique, ou sur Dumb Bitch Juice, mor­ceau rock expé­ri­men­tal où elle essaie de com­prendre com­ment elle a pu se faire avoir par un homme qui n’en valait pas le coup. À ses débuts, la jeune artiste, parce que noire, a tout de suite été ran­gée du côté du R’n’B, de la soul ou du jazz. “On voit ma cou­leur de peau, avant d’entendre ma musique”, déplo­rait sur Instagram celle qui s’épanouit dans la pop et le rock indé. Avec ce pre­mier album musi­ca­le­ment riche et auda­cieux, Rachel Chinouriri remet les pen­dules à l’heure. 

Rachel Chinouriri Parlophone Atlas Artists 3

What a Devastating Turn of Events, de Rachel Chinouriri. © Warner/​Parlophone.

I’m Doing it Againt Baby !, de Girl in Red
ISAK JENSSEN

Do you lis­ten to Girl in Red ?” (est-​ce que tu écoutes Girl in Red ?). Cette ques­tion, qui fuse au sein de la com­mu­nau­té queer sur Internet, est une façon tacite de deman­der à une fille si elle aime les filles. L’artiste nor­vé­gienne s’est en effet éri­gée ces der­nières années en véri­table Sappho des temps modernes, capable de résu­mer l’expérience les­bienne ado­les­cente en quelques vers aus­si rocks que mélan­co­liques. “I don’t wan­na be your friend/​I want to kiss your lips” (Je ne veux pas être ton amie/​Je veux embras­ser tes lèvres) scandait-​elle sur I wan­na Be Your Girlfriend, mor­ceau qui l’a pro­pul­sée à l’avant de la scène alter­na­tive en 2016, alors qu’elle n’avait que 17 ans. Depuis, Marie Ulven – de son vrai nom – a bien gran­di. “I’m on a new level” (Je suis à un nou­veau niveau), annonce-​t-​elle sur I’m Doing it Again Baby !, titre de son second album, sor­ti le 12 avril. Ce nou­veau disque – moins à vif que ses pro­jets pré­cé­dents – se révèle léché et mature, emprunt d’une sono­ri­té plus mains­tream, comme celle que l’artiste a pu entendre lors de la tour­née Eras, de Taylor Swift, dont elle a assu­ré la pre­mière par­tie sur plu­sieurs concerts en 2023. Si l’on regrette un peu que Marie Ulven ait délais­sé ses sujets queer de pré­di­lec­tion sur cer­tains mor­ceaux au pro­fit de thé­ma­tiques plus popu­laires comme sur les titres You Need Me Now ? (avec Sabrina Carpenter) ou Too Much, l’artiste ne déçoit pas sur les mor­ceaux qui la repré­sentent le mieux. Ainsi, A Night to Remember raconte la soi­rée magique où elle a connu son ex-​compagne, dans une réflexion pleine de ten­dresse sur la séren­di­pi­té des ren­contres amou­reuses, tan­dis que New Love s’épanche sur la dou­leur de voir une ancienne flamme avec un nou­vel amour. Les deux titres sont déli­cieu­se­ment pop-​rock et offri­ront assu­ré­ment des beaux moments de musique live sur la tour­née de l’artiste, qui se pro­dui­ra notam­ment au Zénith, à Paris, le 11 sep­tembre prochain. 

Capture decran 2024 05 03 a 4.51.30 PM 1

I’m Doing it Againt Baby !, de Girl in Red. © Columbia Records.

All Born Screaming, de St. Vincent
ALEX DA CORTE 1

St. Vincent ne craint pas les méta­phores cau­che­mar­desques. Avec son sep­tième album, All Born Screaming (Tous né·es en hur­lant), l’artiste amé­ri­caine délivre un objet musi­cal étrange et puis­sant. “I’m just like a hun­gry lit­tle flea” (Je suis comme une petite puce affa­mée), annonce-​t-​elle par exemple sur Flea, titre qui traite de l’amour comme d’une infes­ta­tion de puces dévo­reuses de cœur. Comparaison ris­quée aux yeux des Parisien·nes encore traumatisé·es par les punaises de lit, la chan­teuse n’a sans doute jamais eu à mettre toutes ses fringues au congé­la­teur. Elle ne doit cepen­dant pas être étran­gère aux ver­mines, omni­pré­sentes à New York, ville à laquelle l’artiste dédie une chan­son d’amour sur ce nou­vel opus avec Power’s Out. Toile de fond de nom­breux mor­ceaux de St.Vincent – comme le splen­dide titre New York sur son album Masseduction –, la Grosse Pomme se pare d’une esthé­tique nou­velle dans le regard de l’artiste, qui l’imagine comme un fruit pour­ri de l’intérieur par ceux·celles qui l’habitent. St. Vincent trouve ain­si de la beau­té dans les choses ano­dines ou mal aimées et imprègne tout ce qu’elle touche de son insai­sis­sable roman­tisme. Les mélo­dies magni­fi­que­ment décou­sues des mor­ceaux Sweetest Fruit, Broken Man ou Big Time Nothing nour­rissent cette même impres­sion de chaos maî­tri­sé, apai­sant dans toute son incer­ti­tude. Et St. Vincent conti­nue de s’imposer comme une créa­trice sin­gu­lière, refu­sant sans cesse de se lais­ser définir. 

Capture decran 2024 05 03 a 4.55.26 PM 2

All Born Screaming, de St. Vincent. © Total Pleasure Records.

Partager
Articles liés

Inverted wid­get

Turn on the "Inverted back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.

Accent wid­get

Turn on the "Accent back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.