la fievre
Canal Plus

“La Fièvre” : la série qui dresse le por­trait d’une France en surchauffe

Créée par le coau­teur de Baron noir, cette nou­velle série poli­tique explore les frac­tures sociales et iden­ti­taires de la France d’aujourd’hui à tra­vers une his­toire forte… Et trois per­son­nages fémi­nins puis­sants. Une réus­site, por­tée par Nina Meurisse et Benjamin Biolay, à décou­vrir dare-​dare sur Canal+.

Il est des séries qui font sou­rire, d’autres qui font pleu­rer, celle-​là nous per­cute comme jamais. Créée par éric Benzekri, l’excellent coau­teur de Baron noir (et ancienne “plume” de Jean-​Luc Mélenchon…), La Fièvre détone – et nous étonne – par sa fron­ta­li­té, son acui­té, sa liber­té. Saisissant à bras-​le-​corps le malaise de la socié­té fran­çaise, ron­gée par ses frac­tures sociales, ses déchi­rures iden­ti­taires et la mon­tée de l’extrême droite, ses six épi­sodes ne dressent rien de moins que le por­trait d’un pays en sur­chauffe, cela avec une intel­li­gence rare. Sur le fond comme sur la forme. Autant dire que La Fièvre est une série poli­tique frappante.

De fait, tout com­mence par un violent coup de tête, celui que Fodé Thiam, star du foot et du Racing Club, assène à son entraî­neur lors d’une soi­rée de gala, le trai­tant de “sale tou­bab” (sale blanc, en wolof) devant les camé­ras. Sidération : la tem­pête média­tique peut com­men­cer. Très vite, Sam Berger (Nina Meurisse), une com­mu­ni­cante brillante mais plom­bée par son hyper­sen­si­bi­li­té, est appe­lée au che­vet du club, tan­dis que Marie Kinsky (Ana Girardot), influenceuse/​stand-​uppeuse popu­liste, ins­tru­men­ta­lise l’événement depuis la scène de son théâtre où elle affiche com­plet chaque soir. Un com­bat de “Titanes” va alors s’engager entre ces deux femmes pour orien­ter l’opinion publique, de toute façon débous­so­lée par la puis­sance des réseaux sociaux et leur culture du clash… Avec cette ques­tion lan­ci­nante, inquié­tante, en arrière-​plan : cette “guerre civile” dans les médias peut-​elle, va-​t-​elle, débor­der dans la vraie vie ?

Femmes puis­santes

Petit miracle d’écriture, La Fièvre sur­prend, et d’abord par son mélange de vigueur, d’exigence et de clar­té, entre­la­çant des­tins emblé­ma­tiques de notre époque (une star du foot, un diri­geant de club et deux spin doc­tors sont au cœur du récit), sujets explo­sifs (l’archipélisation de la socié­té, le racisme endé­mique, la mani­pu­la­tion de masse), et réfé­rences lit­té­raires (Le Monde d’hier, livre-​testament de Stefan Zweig, a ins­pi­ré le titre de la série) sans jamais peser, las­ser, ni sur­tout embrouiller. On appré­cie d’autant plus cette plon­gée dans les cou­lisses de la com­mu­ni­ca­tion et de la poli­tique (et du foot !) qu’elle accorde une place pré­pon­dé­rante à trois per­son­nages fémi­nins com­plexes. À côté de Sam et de Marie, tan­dem anta­go­niste, Kenza Chelbi, meneuse d’un col­lec­tif déco­lo­nia­liste, joue éga­le­ment un rôle clé.

Reste que l’héroïne prin­ci­pale, celle qui nous touche autant par ses ful­gu­rances que par sa fra­gi­li­té, c’est bien cette Sam ultra lucide. Peut-​être parce qu’elle endosse, au fond, le point de vue des scé­na­ristes (éric Benzekri, Laure Chichmanov et Anthony Gizel). Mais sur­tout parce qu’elle est incar­née par Nina Meurisse, magis­trale de bout en bout. Si l’ensemble du cas­ting ravit par sa jus­tesse (notam­ment Benjamin Biolay, Alassane Diong et Lou-​Adriana Bouziouane), elle nous fait car­ré­ment frissonner.

La Fièvre, créée par Éric Benzekri et réa­li­sée par Ziad Doueiri. Série de de 6 épisodes de 52 min, sur Canal+ à par­tir du 18 mars. 

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