À cheval entre les genres, briseuses de tabous ou en résistance, les bandes dessinées de la rentrée ne se laissent pas enfermer.
Il était une fois… une rentrée BD placée sous le signe du conte. Non pas pour une énième histoire de princesse en danger : ces albums viennent plutôt rappeler combien ce genre peut être subversif, en utilisant l’imaginaire pour mieux parler du réel.
Ce pouvoir, l’autrice Peggy Adam en fait l’un des atouts d’Emkla. Soit l’histoire d’une jeune femme qui se libère d’un village isolé et de son patriarcat oppressant, en se rapprochant d’une nature qu’elle avait pourtant appris à craindre. Un récit écoféministe porté par de belles visions graphiques, comme cet incendie de forêt tout en aquarelle, rencontre poétique entre l’eau et le feu.
La nature est aussi vengeresse dans le premier tome de La Marche brume, de Stéphane Fert, qui raconte l’histoire d’une bande de sorcières bien décidées à percer le mystère de la brume qui vient les menacer sur leurs terres en dissimulant les pires créatures. La magie s’y pratique avec modération pour éviter d’épuiser les ressources tandis qu’une puissante sororité guide les figures des sorcières, dépeintes comme des « femmes affranchies de toutes les dominations et limitations » pour reprendre les mots de l’essayiste Mona Chollet (Sorcières. La puissance invaincue des femmes, Zones, 2018). À l’unisson de son sujet, le trait de Stéphane Fert fait preuve d’une grande expressivité, regardant souvent du côté de l’animation (qu’il a étudiée).
De son côté, la dessinatrice allemande Zelba se glisse dans la collection coéditée par Futuropolis et le musée du Louvre avec Le Grand Incident, un conte moderne qu’elle définit comme « fantasticomique ». L’incident en question est une révolution féministe qui éclate dans les allées du célèbre musée : lassées des réflexions et attouche- ments des visiteurs, les femmes nues des peintures et des sculptures se mettent en grève et se rendent subitement invisibles. Panique à bord ! Quand[…]