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Andréa Bescond : « Nos anciens ne sont pas des machines à fric »

Devenue en quelques années une figure du fémi­nisme et de la lutte contre les vio­lences, l’artiste et mili­tante a coréa­li­sé Quand tu seras grand, au ciné­ma ce 26 avril. Cette incur­sion auprès du troi­sième âge dans un Ehpad témoigne d’une crise du soin et alerte sur la négli­gence dans la prise en charge de nos aîné·es. Un nou­veau com­bat à son actif.

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Andréa Bescond © Marie Rouge pour Causette

Danseuse de for­ma­tion, la Bretonne de 43 ans a émer­gé en 2014 auprès du grand public avec sa pièce Les Chatouilles ou la danse de la colère, adap­tée au ciné­ma en 2018. Elle y rejouait les viols per­pé­trés par un ami de ses parents et qu’elle a subis, enfant. Après avoir souf­fert d’amnésie trau­ma­tique jusqu’à ses 17 ans, elle porte plainte à 22 ans et, à l’issue d’un pro­cès aux assises, son agres­seur est envoyé en pri­son. Inlassable bat­tante, la réa­li­sa­trice et autrice monte régu­liè­re­ment au cré­neau quand il s’agit de vio­lences faites aux femmes et aux enfants, quitte à aga­cer. À l’occasion de son nou­veau film Quand tu seras grand, qui orchestre la ren­contre impro­bable entre résident·es décrépit·es d’une mai­son de retraite et élèves en sur­chauffe d’un col­lège voi­sin en mal de can­tine sco­laire, elle revient pour Causette sur un nou­veau sujet d’indignation pour elle, désor­mais au cœur de l’actualité : la situa­tion dans les Ehpad.

Causette : Comment avez-​vous tra­vaillé pour dépeindre dans le film des éta­blis­se­ments d’hébergement pour per­sonnes âgées dépen­dantes (Ehpad) si proches de la réa­li­té ?
Andréa Bescond : On est allés voir dans des Ehpad, mais on s’est sur­tout docu­men­tés en lisant beau­coup, en vision­nant des repor­tages et des témoi­gnages sur les réseaux sociaux et sur YouTube.

Pourquoi vous êtes-​vous inté­res­sée à la situa­tion dans les Ehpad ? Qu’est-ce qui vous a par­ti­cu­liè­re­ment aler­tée ?
A. B. : Avec Éric [Métayer, conjoint et coréa­li­sa­teur, ndlr], c’est tout sim­ple­ment parce qu’une membre de notre famille a été pla­cée en mai­son de retraite et qu’on y va régu­liè­re­ment. Honnêtement, là où notre proche est pla­cée, c’est quand même un chouette Ehpad, avec des per­sonnes très très inves­ties, ce qui n’est pas le cas par­tout. On a consta­té, sur­tout, la joie que géné­rait à chaque fois l’arrivée de nos enfants dans les chambres et les cou­loirs. Alors, pour- quoi ne pas faire un huis clos dans un Ehpad ? On a donc eu l’idée de mélan­ger les géné­ra­tions pour mettre en exergue la beau­té, la richesse humaine : par­mi les trois géné­ra­tions mon­trées dans le film, deux sont un peu aban­don­nées, l’enfance et la vieillesse. Et puis, au centre, il y a tous les adultes que nous sommes, qui nous débat­tons avec cette société-​là. Et c’est ça qui nous a inter­pel­lés, évi­dem­ment. Ensuite, il y a eu le Covid.

Vous l’aviez déjà écrit, à ce moment-​là ?
A. B. :
Oui, c’était un long pro­ces­sus. Cette crise sani­taire nous a per­mis de nous inter­ro­ger : on a res­sen­ti une forme de décep­tion sur la soli­da­ri­té humaine. Sans que ça soit trop gnan-​gnan, on a eu envie de mon­trer que, si les gens et les géné­ra­tions se regardent, s’écoutent un peu, ça fonc­tionne quand même vache­ment mieux, l’humanité. Et le but, c’était d’essayer de créer un film qui mette en avant tout le spectre humain et une forme de géné­ro­si­té, mais sans évi­ter les sujets que sont le cha­grin, la mala­die, la mort. Et sur­tout, que se passe-​t-​il dans les Ehpad, quels sont les pro­blèmes d’effectifs et les condi­tions de tra­vail ? Il est évident que pour nous, c’était aus­si un endroit pour mettre en avant toute la défaillance autour de ce système.

Quand tu seras grand Visuel 1 © 2022 LES FILMS DU KIOSQUE Renaud KONOPNICKI
Parmi les comédien·nes de Quand tu seras grand, de gauche à droite : Aïssa Maïga, Christian Sinniger, Vincent Macaigne et Évelyne Istria (dans le fauteuil).

Quelles sont, selon vous, les grandes pro­blé­ma­tiques liées à ces éta­blis­se­ments en France ?
A. B. :
Ben c’est tou­jours pareil, hein : le capi­ta­lisme, ce n’est pas un secret… ! Les repas ser­vis coûtent 1 euro, mais quand on voit le coût de ces pen­sions, ce n’est pas[…]

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