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"Rwanda : le silence des mots", ces femmes vio­lées par les sol­dats fran­çais cen­sés les protéger

Dans un docu­men­taire Arte, Gaël Faye et Michaël Sztanke donnent la parole à trois Rwandaises vio­lées en 1994 par des sol­dats fran­çais de l’Opération Turquoise.

Le titre l’annonce, tout se joue au niveau sonore dans ce docu­men­taire Arte. Bien sûr, les images sont belles. Lumière dif­fuse d’avant l’orage, lents plans appe­lant à la contem­pla­tion. Du vent dans les arbres du pays aux mille col­lines, des mains de femmes dans la terre ou sur le dos d’un patient, du linge mis à sécher, ber­cé par la musique grave de Guillaume Poncelet. Entrecoupées par les pay­sages, des femmes sou­vent silen­cieuses qui se tiennent bien droites. Marie-​Jeanne, Concesa et Prisca, toutes les trois Tutsi, remontent le fil de leur mémoire meur­trie il y a presque 30 ans. Elles com­mencent par racon­ter l’horreur des mas­sacres per­pé­trés par les Hutu envers leur eth­nie en 1994, sur lequel Michaël Szantke, co-​réalisateur avec l’auteur-compositeur franco-​rwandais Gaël Faye, a déjà réa­li­sé un repor­tage. Meurtres, muti­la­tions, viols, rien n’est trop glauque pour le der­nier géno­cide du 20ème siècle. Et les sau­veurs s'avèrent par­fois aus­si barbares. 

En juin 1994, la France envoie 2 500 mili­taires sur place dans le cadre de l’Opération Turquoise, sou­te­nue par la réso­lu­tion 929 de l’ONU qui vise à « contri­buer, de manière impar­tiale, à la sécu­ri­té et à la pro­tec­tion des per­sonnes dépla­cées, des réfu­giés et des civils en dan­ger au Rwanda ». Les sur­vi­vantes des hor­reurs per­pé­trées par les Hutu se croient enfin en sécu­ri­té lorsqu’elles atteignent le camp de Nyarushishi, au sud du pays. « On croyait naï­ve­ment que le blanc était un sau­veur » racontent-​elles. Espoir fra­cas­sé les nuits où des sol­dats fran­çais passent faire leur mar­ché dans les tentes des femmes, violent et prennent des Polaroïds de leurs crimes. Le sen­ti­ment d’impunité semble total et ne sera d'ailleurs pas démen­ti par la suite. Ces femmes, qui « [peuvent] tout oublier mais pas ce qu’[elles ont] vécu à Nyarushishi », ont por­té plainte en 2004 et en 2012 contre X auprès de la jus­tice fran­çaise – « seule la jus­tice peut m’aider à sur­mon­ter ma dou­leur et à recon­naître offi­ciel­le­ment ma souf­france », souffle l'une d'elles. Les dos­siers sont tou­jours en cours d’instruction. « L’histoire d’un géno­cide ne finit jamais de s’écrire », conclut Gaël Faye, voix off très discrète. 

Rwanda : le Silence des mots. Michaël Sztanke et Gaël Faye, Arte, 53 minutes, dis­po­nible sur Arte.fr.

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