À Ajain, une commune creusoise de 1 200 habitants, des médecins de toute la France se relaient dans un cabinet solidaire pour pallier le manque de praticien·nes. Huit mois après son ouverture, le dispositif semble prometteur pour régler en urgence l’épineux problème de l’accès aux soins.
Il fait sombre. Dans cette petite maison du bourg d’Ajain, dans la Creuse, la lumière peine à se frayer un chemin. Seuls quelques rayons éclairent un petit salon, dans lequel trône un fauteuil moelleux en velours fleuri. Joël Tenaille vit seul. « À quoi bon avoir un canapé ? » plaisante-t-il. Derrière l’humour pointe sa solitude. Il est pourtant entouré de trésors. Autour de lui, des dizaines de boîtes à musique ornent des étagères. Au plafond, de vieilles pipes décorent des poutres en bois. À l’image de ses diverses collections, ce vieil homme de 78 ans est authentique et généreux.
Joël habite ce village depuis l’âge de 3 ans. Il a travaillé comme aide-soignant hospitalier dans l’Ehpad situé juste derrière chez lui. Il refuse d’y mettre les pieds comme patient. Même si une part de lui rayonne, une autre songe déjà à l’après. Il souhaite vendre sa maison et tout ce qu’elle contient aux enchères, le jour où il finira « au bout de la rue ». À savoir le crématorium, à l’entrée du village…
La mort, il a bien failli la tutoyer. Après le départ à la retraite de son « toubib », Joël a arrêté son traitement contre le diabète. « Je n’avais pas envie de courir à perpète pour une gélule, avoue-t-il. Je me suis dit : je verrai bien ce que ça donne. » Pendant près de deux ans, Ajain a cherché un remplaçant à son médecin généraliste, parti à la retraite après quarante ans d’exercice. En attendant, les 1 200 habitant·es du village se sont débrouillé·es. Certain·es se sont tourné·es vers des villes voisines, d’autres ont été contraint·es de tirer un trait sur leur suivi médical. « Les habitants me demandaient sans cesse si j’avais trouvé un médecin, se remémore Guy Rouchon, maire d’Ajain depuis 2014. Ce ne sont pas les compétences d’un maire, mais je me devais d’en chercher un. »
Le don de rassembler
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