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© Angelina Litvin / Unsplash

Écriture inclu­sive : un père attaque l’État en jus­tice pour pro­té­ger la liber­té d’expression de sa fille

Selon des infor­ma­tions de 20 Minutes, le père d’une fille de 11 ans a déci­dé de traî­ner l’État devant la jus­tice pour dénon­cer “les pro­blèmes d’égalité qui viennent du lan­gage” tel qu’enseigné par l’Éducation nationale.

L’info feel good du jour, bon­jour ! 20 Minutes révèle, ce ven­dre­di, la déci­sion d’un père d’attaquer l’État en jus­tice pour “rendre visibles les pro­blèmes d’égalité qui viennent du lan­gage, pour que l’État s’en occupe vrai­ment”. Papa d’une fille de 11 ans, cet ensei­gnant consi­dère que la gram­maire fran­çaise telle que pré­co­ni­sée par le minis­tère de l’Éducation natio­nale est pré­ju­di­ciable à son enfant, qui affirme avoir déjà été répri­man­dée à l’école pour avoir uti­li­sé des for­mules inclu­sives devant ses instituteur·rices. “L’écriture clas­sique exclut les per­sonnes qui ne sont ni ‘ils’ ni ‘elles’. L’écriture inclu­sive inclut les per­sonnes, du coup elles sont mieux dans leur peau”, argu­mente la fillette auprès de 20 Minutes. Et ce n’est pas son père qui va la contre­dire ; ce der­nier vient d’adresser un recours pour excès de pou­voir contre la cir­cu­laire du 5 mai 2021, qui pros­crit le recours à l’écriture inclusive.

Liberté d'expression

Dans un texte envoyé au Conseil d’État, ce papa – qui sou­haite res­ter ano­nyme – s’en prend à cette cir­cu­laire émise par l’ex-ministre de l’Éducation natio­nale Jean-​Michel Blanquer. “La pré­sente cir­cu­laire […] crée des condi­tions de tra­vail défa­vo­rables aux femmes et aux mino­ri­tés de genre, dès lors qu’elles seront régies par des textes main­te­nant des sté­réo­types de genre dans la langue, tout comme elle prive […] les élèves appar­te­nant aux mino­ri­tés de genre de la pos­si­bi­li­té de rece­voir des outils lan­ga­giers pour se pen­ser et se dire”, écrit le père de la fillette. Il pointe par­ti­cu­liè­re­ment du doigt les règles du “mas­cu­lin qui l’emporte sur le fémi­nin” et du “mas­cu­lin géné­rique”. Sa fille – sen­si­bi­li­sée à ces enjeux grâce à sa ren­contre avec des per­sonnes inter­sexes, notam­ment par l’intermédiaire de ses parents – se dit pour sa part “mal à l’aise” avec ces règles qui éclipsent une par­tie de la population. 

Lire aus­si I Langage inclu­sif : 4 argu­ments pour contrer les anti “point médian”

L’enseignant pré­cise n’avoir aucune inten­tion d’imposer l’écriture inclu­sive, mais vou­loir défendre la liber­té de sa fille, ain­si que des instituteur·rices qui sou­hai­te­raient la trans­mettre. “Désormais, cela devient une faute de ne pas uti­li­ser du mas­cu­lin géné­rique dans une copie. Ce qui n’était qu’un usage par­mi d’autres devient le seul accord valable. L’enfant va voir du point médian dans les usages, et dif­fé­rentes gra­phies dans le monde, mais l’école fait un tri dedans et décide qu’il y en a un qui est une faute. Le mes­sage que je porte, c’est que la liber­té d’expression doit être pro­té­gée. Et qu’il faut évi­ter la loi du far-​west, la loi du plus fort”, explique encore ce papa à 20 Minutes. Son recours en jus­tice s’appuie éga­le­ment sur une étude parue dans la revue American Psychologist ayant “démon­tré la vali­di­té de l’influence de la langue sur les repré­sen­ta­tions men­tales”, arguant que “le recours à un pro­nom mas­cu­lin cen­sé­ment neutre génère des repré­sen­ta­tions plus lar­ge­ment mas­cu­lines”.

"Le fran­çais a des règles"

L’écriture inclu­sive a cepen­dant de nombreux·euses détracteur·rices. À l’époque de la mise en place de cette cir­cu­laire, Jean-​Michel Blanquer consi­dé­rait par exemple que “la com­plexi­té et l’instabilité” de l’écriture inclu­sive ris­quaient de créer des “obs­tacles à l’acquisition de la langue comme de la lec­ture” et d’“entra­ver les efforts des élèves pré­sen­tant des troubles d’apprentissage”, argu­ments clas­siques contre le lan­gage inclusif. 

Certain·es sont plus créatif·ives, comme Cédric Vial, séna­teur (LR) de Savoie cité par 20 Minutes. Ce der­nier -– éga­le­ment rap­por­teur d’une pro­po­si­tion de loi pour inter­dire cer­taines formes d’écriture inclu­sive – a décla­ré, au sujet des per­sonnes qui ne se sentent pas repré­sen­tées dans le lan­gage non inclu­sif : “Il y a aus­si des pois­sons volants, mais ce n’est pas la majo­ri­té du genre. Il y a des gens qui pensent dif­fé­rem­ment, mais ils ne doivent pas l’imposer aux autres.” Poète, ce mon­sieur Vial ajoute qu’il “peut y avoir toutes sortes d’opinions, mais pour faire socié­té il faut une règle com­mune. À l’école, on apprend le fran­çais, pas l’afrikaner, pas l’esperanto, et le fran­çais a des règles”. On note­ra que cer­taines règles d’inclusivité, à l’image de l’accord de proxi­mi­té, font par­tie des règles de la langue fran­çaise depuis des siècles.

Pour lut­ter contre ce conser­va­tisme, ce papa ensei­gnant et son enfant iront donc en jus­tice, avec l’espoir de visi­bi­li­ser les pro­blèmes de repré­sen­ta­tion qui découlent d’une approche rigide du lan­gage. La jeune fille ajoute vou­loir “aider”, car “il n’y a pas que des hommes et des femmes sur la terre” et nier l’existence de ceux·celles qui ne se retrouvent pas dans cette vision binaire, même seule­ment dans le lan­gage, est une forme de vio­lence. “Je com­prends très bien ce que ça leur fait si on dit quelque chose qui leur déplaît”, conclut-​elle.

Lire aus­si I Écriture inclu­sive : elle en dit quoi la mère "Causette" ?

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