En 1906 paraît Les Désenchantées, de Pierre Loti, récit de la rencontre d’un diplomate et écrivain célèbre et de trois jeunes Orientales, confinées au harem. Une histoire vraie où l’auteur fut le jouet d’une supercherie manigancée par une journaliste française féministe.

Dans le Constantinople de 1904, les deux filles d’un ministre du sultan, Zennour et Nouryé Noury Bey, ont pour livre de chevet Aziyadé, roman de Pierre Loti paru en 1879, dans lequel l’écrivain raconte ses amours avec une belle Circassienne*de harem. Dans les gynécées de la haute société, les deux sœurs rencontrent une journaliste parisienne, dévouée à la cause des femmes turques, Marie Léra. Dans l’idée de dénoncer les conditions de vie dans les harems, la journaliste occidentale parvient, avec l’aide des deux sœurs Zennour et Nouryé, à échafauder un plan dont Pierre Loti sera l’involontaire instrument.
L’écrivain voyageur entamant une nouvelle mission pour la marine à Constantinople, elles décident d’aller à sa rencontre et de l’inciter à écrire une suite à Aziyadé : ce sera l’histoire de trois Antigones des harems, de jolies rebelles aux yeux de jais. Pour le convaincre, Marie Léra prend donc le voile et s’invente le personnage de Leyla, cousine mystérieuse de Zennour et Nouryé. La supercherie est en marche… La vraie-fausse Leyla deviendra, deux ans plus tard, Djénane, le personnage principal des Désenchantées, le roman de l’obéissant Loti.
Les Désenchantées est le récit en trompe‑l’œil de cette rencontre ottomane, mêlant le romantisme d’un Orient fantasmé et le drame des grandes tragédies[…]