Interview du sociologue Alex Mahoudeau qui fait paraître, ce 4 mai, La Panique woke, anatomie d’une offensive réactionnaire, aux éditions Textuel.

Qui a peur du grand méchant woke ? Non, pas la poêle asiatique mais ce courant de pensée progressiste, dont le nom provient des luttes des Afro-américain·es qui l’ont utilisé dès le XIXe siècle au sens d’être « éveillé » aux problématiques de racisme systémique. Importé en France, le vocable est aujourd’hui bien plus usité par les détracteur·rices de la pensée de gauche que par celles et ceux censé·es se retrouver dans ce qu’il décrit.
Pour les réactionnaires qui le brandissent comme un chiffon rouge, le wokisme serait responsable de l’effondrement moral en cours de nos sociétés post-modernes, explique Alex Mahoudeau. Le chercheur en sciences politiques et sociologie fait paraître, ce 4 mai, le passionnant petit essai La Panique woke, anatomie d’une offensive réactionnaire, dans lequel il analyse les méthodes discutables des « anti-wokes » pour mobiliser les peurs autour des excès supposés du wokisme. Avec un certain succès, dénonce l’auteur, puisque ces préoccupations ont pénétré jusqu’au plus haut niveau de l’État français durant le quinquennat Macron, avec par exemple Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, lançant une croisade contre l’islamogauchisme, ou Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, à l’origine d’un think tank de surveillance de la pensée woke. Entretien avec Alex Mahoudeau.
Causette : Vos sujets d’étude portent, en tant que chercheur attaché au laboratoire d’études urbaines de l’université de Paris-Est Marne-la-Vallée, plutôt sur la géographie sociale. Pourquoi avoir écrit sur un tout autre sujet, celui des « entrepreneurs du wokisme », tels que vous les définissez ?
Alex Mahoudeau : Quand je me suis rendu au Royaume-Uni dans le cadre de mes études, on était au milieu de ce qu’on appelait alors les free speech wars [guerres de la liberté d’expression, ndlr], entre 2014 et 2017. C’était une période où, au Royaume-Uni et aux États-Unis, il y avait des débats très virulents sur le soi-disant fait que des[…]