ÉDITO. Bien sûr, il tient à préciser que « [ses] problèmes ne sont vraiment rien comparé » à ce que vivent les Ukrainien·nes. Mais tout de même. Dans un entretien donné au média économique américain Bloomberg, l’oligarque russe Mikhail Fridman se demande à voix haute « comment [il va] payer [ses] services de nettoyage ». Touché au porte-monnaie par les sanctions européennes, le milliardaire n'a pas peur de regarder la cruelle réalité en face : « Je vais peut-être devoir nettoyer la maison moi-même ».
Au moment où l'article est publié, le 17 mars à 4h du matin UTC (Temps universel coordonné), il est 6h du matin en Ukraine et les secours tentent de passer entre les bombes pour sauver le millier de civils écrasé·es sous les décombres du théâtre de Marioupol, réduit à néant par une attaque aérienne de l'armée russe la veille. Dans l'aube qui s'avance sur l'Ukraine, il y a des enfants qui se réveillent orphelin·es, des soldat·es qui réarment, des morts que l'on découvre puis recouvre.
Depuis, et à l'heure où nous écrivons ces lignes, au moins 130 personnes ont été retrouvées vivantes des cendres du théâtre de Marioupol. D'autres viendront, d'autres, probablement plus nombreux·euses, n'auront pas cette chance. Pourtant, les habitant·es de Marioupol avaient bien pris le soin, avant de se terrer au sous-sol du théâtre, d'inscrire en russe en grand sur le sol le mot « enfants » pour signaler leur présence dans le refuge. En grand pour être vu du ciel d'où les avions larguent leurs missiles, en grand et en vain.
Dans l'entretien accordé à Bloomberg, le puissant Mikhail Fridman plaidait l'impuissance : « Si les dirigeants de l’Union européenne pensent que je peux m’approcher de M. Poutine et lui dire d’arrêter la guerre, alors je crains que nous ayons tous de gros problèmes. » Soit. Mais le magnat de la multinationale Alfagroup a pour autant le pouvoir de se taire pour ne pas se vautrer dans l'incédence.