l ofdeur de la guerre
© Thomas O'BRIEN

“L’odeur de la guerre” : l’odyssée de la vie d’une femme sur les planches

Devant le suc­cès et le bouche-​à-​oreille dont il béné­fi­cie (à juste titre), ce seul en scène poi­gnant sur la tra­jec­toire d’une jeune femme face aux intem­pé­ries de la vie joue les pro­lon­ga­tions à Paris.

C’est le genre d’histoire qui fait chaud au cœur. Celui d’une jeune comé­dienne, incon­nue du grand public, qui n’en finit plus de faire salle comble depuis des mois avec un spec­tacle en par­tie auto­bio­gra­phique, qu’elle a écrit et qu’elle joue seule sur scène. L’aventure a com­men­cé cet été au Festival d’Avignon, temple des pos­sibles quand le public se met à se pas­ser le mot. Et petit à petit, dans le cou­rant du mois de juillet, il s’est pres­sé pour aller voir L’Odeur de la guerre, écrit et inter­pré­té par Julie Duval et mis en scène par ses com­parses Juliette Bayi et Élodie Menant. Il conti­nue à s’y bous­cu­ler à La Scala de Paris au point que le spec­tacle qui devait se ter­mi­ner fin décembre est pro­lon­gé jusqu’en mars.

Alors pour­quoi gagne-​t-​il le cœur des foules ? D’abord parce qu’il est inter­pré­té avec une force et une fougue notables. Mais aus­si parce qu’il résonne avec l’époque en ce sens qu’il raconte une tra­jec­toire d’émancipation fémi­nine. Pas héroïque. Pas par­ti­cu­liè­re­ment spec­ta­cu­laire. Mais celle que vivent tant de femmes fina­le­ment, peu ména­gées par l’existence en rai­son de leur genre et qui trouvent en elles la force de se cher­cher, de se trou­ver et de s’épanouir loin des vio­lences en tous genres et de la colère qu’elle entraîne.

Sur scène, donc, Jeanne, double fic­tif de Julie Duval, que l’on sui­vra de son enfance à son pas­sage à l’âge adulte. Une petite fille du sud de la France, bal­lot­tée entre un père aimant mais qui ne sait pas tou­jours gérer sa vio­lence, une mère un peu dépas­sée, obsé­dée par son chien, une meilleure copine “cagole” ado­rable et des copain·ines de classe pas tou­jours bienveillant·es. Sur scène, la comé­dienne fait tous les rôles, tel un Philippe Caubère au fémi­nin, pas­sant de l’un à l’autre avec une agi­li­té rare. Hilarante dans le per­son­nage de la copine Dounia, effrayante dans le rôle de son père.

Dans cette famille, les mots manquent autant que les maux gran­dissent. Et que la colère sourde gran­dit en Jeanne. Vient l’adolescence. Personne pour lui expli­quer ce que sont les règles, per­sonne pour lui deman­der ce qu’elle fait quand elle sort toute la nuit, seule face à sa détresse qui se meut trop sou­vent en agres­si­vi­té envers les autres. Personne, sur­tout, à qui elle peut dire que sa pre­mière fois avec un gar­çon était non consen­tie. Et qu’il s’agissait, – ce qu’elle ne savait pas alors -, d’un viol. Puis viennent les débuts dans l’âge adulte. Jeanne quitte le Sud et monte à Paris, comme on dit. Elle est très jeune, n’a pas fait d’études. Mais elle découvre l'art dra­ma­tique. Et la boxe. Les deux dis­ci­plines seront son salut. Là encore, la comé­dienne est irré­sis­tible en prof de théâtre habi­té ou en coach de boxe au grand cœur.

Julie Duval est une révé­la­tion. Vêtue d’une simple bras­sière de sport et d’un short noirs du début à la fin, il n’y a sur scène qu’elle, un petit banc en bois et un punching-​ball. Et pour­tant, grâce à un geste, une atti­tude, un accent, un regard, on voyage des cigales du sud aux boîtes de nuit bruyantes, du ring de boxe aux cours Florent comme si on y était. Son spec­tacle est un bal­let. Son incar­na­tion, un coup de poing. Car ce que retrace ici la comé­dienne, ce n’est pas sa vie. C’est la vie de toutes les femmes. Elles sont nom­breuses dans la salle. Mais pas que. Il faut conti­nuer d’aller l’applaudir.

40x60 LODEUR DE LA GUERRE

L’Odeur de la guerre, de et avec Julie Duval. À La Scala, à Paris. Du 9 jan­vier au 30 mars. Du mar­di au mer­cre­di à 21 h 30, le same­di à 21 h 30. à par­tir de février, le dimanche à 17 h 30.

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