Patrick Poivre d’Arvor a porté plainte mardi pour « dénonciation calomnieuse » à l’encontre de seize femmes l’accusant de harcèlement sexuel ou de violences sexuelles.
Quarante-trois pages d'une plainte judiciaire dans lesquelles il fustige « un retour du purinatisme et de la censure, habilement parés de la protection des femmes ». Patrick Poivre d’Arvor est passé d’accusé à accusateur. L’ancien présentateur, star du JT de TF1, a porté plainte avec constitution de partie civile mardi pour « dénonciation calomnieuse » à l’encontre de seize femmes l’accusant de harcèlement sexuel ou de violences sexuelles a appris, Complément d’enquête, le magazine de France 2 qui diffusera demain soir l’enquête intitulée PPDA, la chute d’un intouchable.
L’avocat de PPDA a en effet confirmé auprès de l’émission avoir déposé cette plainte en début de semaine auprès du doyen des juges d’instruction du tribunal de Nanterre. « Depuis de nombreux mois, beaucoup d’accusations qui n’ont aucun fondement sont portées contre Patrick Poivre d’Arvor. Il est temps que ces accusations soient jugées. On ne peut pas accuser faussement et impunément », explique l’avocat à France Info.
Accusations contestées
« Depuis l’emballement généré par la déferlante #MeToo, la libération de la parole des femmes connaît malheureusement son lot d’excès et de dérives, et les moyens mis en œuvre pour servir cet objectif légitime peuvent s’avérer pervers et dévastateurs », fustige ainsi Patrick Poivre d’Arvor dans sa plainte que Complément d’enquête et France Info ont pu consulter. En son sein, l’ancien journaliste met en cause seize des vingt-deux femmes qui ont témoigné à son encontre à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) depuis février 2021.
Dans ce document, le plaignant est revenu sur chacune des accusations, qu’il conteste toutes formellement. Pour quatre d’entre elles, PPDA a notamment cité des extraits de correspondances qui auraient été écrits après les faits dénoncés, fragilisant selon lui la version de ces femmes. « Il ne saurait être donné le moindre crédit à ces seize femmes, journalistes ou écrivains en mal de renommée et/ou féministes de la dernière heure, venues soutenir une ancienne collègue, une amie, voire une simple militante de la cause féminine », argue-t-il dedans. Avant de poursuivre : « Regretter de ne pas avoir bénéficié de davantage d’égards, voire d’un simple regard, de la part d’un homme qu’elles ont un temps admiré rend aujourd’hui les mises en cause éconduites ou ignorées très amères, amertume qui les conduit à commettre, par vengeance tardive, le délit de dénonciation calomnieuse. »
« Pathétique diversion »
L’avocate Laure Heinich, qui défend certaines femmes qui ont déposé plainte à l’encontre de PPDA, dénonce dans un courrier adressé à Complément d’enquête « une plainte en dénonciation calomnieuse dans des termes outrageants qui ne font que l’accabler ». Les mises en cause « attendent impatiemment d’en répondre et de le confronter devant des juges, ce que la prescription leur interdisait », assure Maître Heinich. La journaliste Hélène Devynck, mise en cause dans cette plainte, a dénoncé sur Twitter une « pathétique diversion » et « [attend] que la procédure bâillon se transforme en procès et [qu’elles puissent] toutes défiler à la barre. »
Retour sur l’affaire
L'affaire Patrick Poivre d'Arvor a commencé en février 2021, lorsque l'écrivaine et journaliste Florence Porcel avait porté plainte contre lui, l'accusant de lui avoir imposé un rapport sexuel en 2004 et une fellation en 2009. PPDA avait alors, déjà, porté plainte contre elle pour diffamation et dénonciation calomnieuse. Le parquet de Nanterre avait ensuite mené une enquête préliminaire pendant quatre mois avant de classer « sans suite » la plainte de l'autrice de Pandorini (livre inspiré de ce qu'elle dit avoir vécu avec PPDA) en juin. La plainte en diffamation et dénonciation calomnieuse de l'intéressé avait, elle aussi, été classée sans suite, tout comme celles de huit autres femmes qui avaient aussi déposé plainte pour « viols, agressions sexuelles ou harcèlement sexuel » à la suite des révélations de Florence Porcel. Cette dernière s'est depuis constituée partie civile auprès du doyen des juges d'instruction, entraînant de fait l'ouverture d'une nouvelle enquête en décembre.
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Selon la vice-présidente de l’association #MeTooMédias Muriel Reus, qui a répondu aux questions de Complément d’enquête, seize femmes ont porté plainte à ce jour contre Patrick Poivre d’Arvor, dont sept pour viol. Si une majorité des faits ont été prescrits et les plaintes classées par la justice pour « insuffisance de preuves », le parquet de Nanterre a ouvert une enquête préliminaire le 17 décembre 2021 à la suite de la plainte déposée le 9 novembre par Laure Eude, qui accuse Patrick Poivre d’Arvor de l’avoir violée en 1985.
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Auprès de France Info, l'avocat de PPDA, Philippe Naepels annonce son intention de déposer une nouvelle plainte pour « dénonciation calomnieuse » avec constitution de partie civile à l'encontre de Florence Porcel, en réponse à la constitution en partie civile de cette dernière en novembre. L'instruction de la plainte de Florence Porcel est toujours en cours.
Complément d'Enquête, PPDA : la chute d'un intouchable, diffusé ce jeudi 28 avril sur France 2 à 23 h.
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