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“J’ai l’impression d’être folle” : com­ment le racisme nuit gra­ve­ment à la san­té mentale

Épuisement, faible estime de soi, hyper­vi­gi­lance, stress… La san­té men­tale des per­sonnes non blanches est sérieu­se­ment mise à mal par le racisme, qui favo­rise les troubles anxieux et dépres­sifs. Un enjeu de san­té publique qui, en France, reste lar­ge­ment ignoré. 

En quarante-​deux ans d’existence, Prisla ne “compte plus” les fois où elle a essuyé des paroles, des gestes et autres atti­tudes racistes. Les mains incon­nues qui s’invitent dans ses che­veux, les “Tu res­sembles à Whoopi Goldberg”, les “Avant il y en avait une comme toi”, les "Oh votre rire ! Je pré­fère tel­le­ment les Noirs aux Arabes, vous êtes tel­le­ment plus drôles qu’eux”, ou les “Je peux tou­cher ta peau ? On dirait du cho­co­lat, ça fond au soleil”… “Plus jeune, je m’agaçais, ça me met­tait en colère. Aujourd’hui, j’éduque et j’explique à mes copines et à leurs enfants quand ils ont des pro­pos dépla­cés ou bles­sants, en retour­nant la situa­tion avec un exemple qu’ils com­prennent”, confie cette Congolaise de nais­sance, qui vit en France depuis l’âge de 3 ans. 

Dernièrement, la loi immi­gra­tion est venue en remettre en couche, jusqu’à lui faire “des nœuds au cer­veau”.En ce moment, j’ai l’impression d’être folle. On me pose des ques­tions qui, avant, étaient taboues. Alors quelque part, c’est ras­su­rant, les gens s’interrogent vrai­ment sur ce qu’il se passe. Mais être la per­sonne noire que l’on connaît et à qui l’on peut poser les ques­tions parce qu’elle doit savoir pour tous les autres… pffff, c’est insup­por­table”, rapporte-​t-​elle. “Fatiguée” d’être sans cesse rame­née à la cou­leur de sa peau, d’être mise “dans une case”, elle qui, dit-​elle, ne s’est “jamais posi­tion­née en tant que per­sonne noire. Ce sont les gens qui me mettent dans cette case”.

Cette fatigue men­tale que Prisla res­sent est l’une des consé­quences de la charge raciale. Ce concept, auquel l’écrivaine Douce Dibondo vient de consa­crer un essai, a été théo­ri­sé, en France, par l’universitaire Maboula Soumahoro, qui la défi­nit comme “la tâche épui­sante d’expliquer, de tra­duire, de rendre intel­li­gibles les situa­tions vio­lentes, dis­cri­mi­nantes ou racistes”. Faisant écho à la charge men­tale, elle recouvre éga­le­ment le tra­vail d’anticipation, à la fois invi­sible et constant, qui échouent aux per­sonnes non blanches dans un contexte majo­ri­tai­re­ment blanc : s’attendre à faire l’objet de blagues ou de remarques racistes, pen­ser à une réponse ou à une stra­té­gie d’évitement, craindre d’être discriminé·e ou violenté·e, adap­ter son atti­tude, cacher cer­tains goûts cultu­rels, veiller à sa façon de par­ler, de rire, de mar­cher, s’interdire de por­ter une capuche, un jog­ging (pour ne pas paraître suspect·e) ou une jupe longue (pour évi­ter toute sus­pi­cion d’islamité)… “C’est en fait une pres­sion psy­cho­lo­gique constam­ment res­sen­tie chez les mino­ri­tés per­çues comme non blanches, les for­çant à être sur le qui-​vive et à anti­ci­per tous les pré­ju­gés dans toutes les sphères de la vie”, résu­mait Lou ève, écri­vaine fémi­niste et déco­lo­niale, créa­trice du compte La charge raciale (qui a depuis lais­sé place à Mangouinistan), dans un entre­tien à Dièses, en 2021.

Épuisement et hypervigilance

Faïda, 36 ans, raconte ain­si com­ment elle a pris conscience du poids quo­ti­dien de ce far­deau. “Avec mon mari, nous avons vécu pen­dant un an en Guadeloupe. Même si c’est un dépar­te­ment fran­çais, la majo­ri­té des per­sonnes sont noires. Du coup, là-​bas, je ne me sen­tais pas du mau­vais côté de la bar­rière. Et je me suis ren­du compte que j’allais beau­coup plus faci­le­ment vers les gens”, témoigne cette femme d’origine como­rienne. Alors qu’en Île-​de-​France, où elle a pas­sé une bonne par­tie de sa jeu­nesse et vit encore actuel­le­ment, elle est comme en alerte per­ma­nente. “Par exemple, quand je vais voir la bou­lan­gère, par­fois je me rends compte que je retiens ma res­pi­ra­tion, je rentre mon ventre, je suis un peu sur le qui-​vive, en train de me dire : ‘est-​ce qu’il y a un truc qui ne va pas aller ?’, ‘est-​ce qu’on va encore me ser­vir de manière rude alors qu’avec la cliente d’avant, la ven­deuse a été gen­tille ?‘. C’est insi­dieux. On ne te dit pas “sale noire”. Ce sont des choses que tu ne peux pas prou­ver. Tu sens juste que la per­sonne change quand c’est ton tour. Que tu ne peux pas te trom­per, hési­ter ou dire ‘fina­le­ment je vou­drais ça’”, explique-t-elle.

Entre hyper­vi­gi­lance et auto­con­trôle qua­si per­ma­nent, elle aus­si évoque sa fatigue psy­chique face aux micro-​agressions du quo­ti­dien – soit ces mots ou ces com­por­te­ments d’apparence banale mais qui sont, en réa­li­té, offen­sants et stig­ma­ti­sants pour une per­sonne issue d’une mino­ri­té. À ce pro­pos, elle revient sur une expé­rience pro­fes­sion­nelle par­ti­cu­liè­re­ment éprou­vante. “Il y a quelques années, j’étais AESH [accom­pa­gnante d’élèves en situa­tion de han­di­cap, ndlr]. Quand je suis arri­vée dans la classe, il y avait une sorte de réplique de Tintin au Congo, avec un per­son­nage noir repré­sen­té selon les cli­chés racistes de l’époque. Je l’ai signa­lé à la maî­tresse, mais elle n’a pas vou­lu l’enlever. Donc, j’ai tra­vaillé en voyant ça toute l’année. Parfois, il y avait aus­si des petites piques, pas for­cé­ment à mon encontre, mais devant moi, par exemple à pro­pos de jeunes filles noires. Avec, der­rière, des sous-​entendus vrai­ment déshu­ma­ni­sants, dans les­quels je me sen­tais com­prise. Le midi, pen­dant la pause, je me retrou­vais à faire l’avocate des mino­ri­tés, pour essayer de nuan­cer un peu la rhé­to­rique des per­sonnes blanches autour de moi. Quand une col­lègue séné­ga­laise est arri­vée dans l’école, ça m’a fait beau­coup de bien. J’avais quelqu’un avec qui je pou­vais être moi-​même”, se sou­vient cette média­trice cultu­relle et entre­pre­neure, actuel­le­ment mère au foyer.

Racisation et fra­gi­li­sa­tion psychique

Derrière le vécu de Faïda, de Prisla et de tant d’autres, un même pro­ces­sus à l’œuvre : celui de la racia­li­sa­tion ou de la raci­sa­tion – d’où vient l’expression de “per­sonnes raci­sées”. “Je trouve impor­tant d’expliquer ce terme, car il per­met de com­prendre ce qu’il se passe pour les per­sonnes qui subissent ces micro-​agressions, voire ces dis­cri­mi­na­tions et ces agres­sions raciales. La raci­sa­tion, ou racia­li­sa­tion, est un pro­ces­sus qui conduit à attri­buer du sens à l’apparence de l’autre, à son appar­te­nance cultu­relle. C’est un pro­ces­sus qui alté­rise les per­sonnes – qui sont caté­go­ri­sées comme “autre”, dif­fé­rentes – et les place dans une posi­tion d’infériorité”, expli­cite la psy­cho­logue cli­ni­cienne et psy­cho­thé­ra­peute Yaotcha d’Almeida. Or ce pro­ces­sus, à tra­vers les micro-​agressions et les dis­cri­mi­na­tions raciales qu’il engendre, a des effets directs sur le psy­chisme des per­sonnes qui en sont victimes. 

“Le pre­mier, c’est un impact néga­tif sur l’estime de soi. Comme pour n’importe quel être humain, le fait d’être régu­liè­re­ment déva­lo­ri­sé est péna­li­sant en termes de déve­lop­pe­ment, et ce, d’autant plus si ça com­mence dans l’enfance. Deuxièmement, ça va atteindre l’humeur, qui va se tein­ter de tris­tesse. En fonc­tion de la fré­quence et de l’intensité de ces évé­ne­ments, ça peut aller jusqu’au déses­poir et, dans les situa­tions les plus extrêmes, aux idées sui­ci­daires. Troisièmement, il y a la peur qui va s’installer : celle d’être à nou­veau agres­sé, sans savoir à l’avance d’où l’agression vien­dra ni dans quelle situa­tion elle aura lieu. Puisque les micro-​agressions à carac­tère raciste ont pour carac­té­ris­tique de sur­prendre le rece­veur et de sur­ve­nir dans toutes les situa­tions, y com­pris dans un cadre ami­cal ou même fami­lial – je pense par exemple aux per­sonnes adop­tées ou dont une par­tie de la famille est blanche. Et cela va impac­ter la vision du monde, qui peut alors être per­çu comme dan­ge­reux et injuste. Ce qui peut faire naître une colère, que les per­sonnes vont par­fois refou­ler”, déve­loppe Yaotcha d’Almeida, qui y a consa­cré un livre, Impact des microa­gres­sions et de la dis­cri­mi­na­tion raciale sur la san­té men­tale des per­sonnes raci­sées (L’Harmattan), en 2022.

“Je n’en peux plus”

Remarques déso­bli­geantes, pré­ju­gés, dis­cri­mi­na­tion pro­fes­sion­nelle… Si, jusqu’ici, Samia* avait réus­si à ne pas se lais­ser atteindre par le racisme dont elle a pu faire l’objet, elle dit aujourd’hui le vivre plus dif­fi­ci­le­ment. D’autant qu’elle l’a vu se décom­plexer, ces der­nières années. “Rien qu’hier, on a encore essayé de me prendre la main et de me tou­cher dans les trans­ports. Il y a quelques semaines, on m’a dit : “Ha bah tiens, elle est bien bron­zée celle-​là.” Je n’ai pas encore trou­vé le moyen de faire face à ça : à chaque fois que ça m’arrive, je m’effondre, je me sens mal. J’ai l’impression que je n’ai pas le droit d’exister”, témoigne cette res­pon­sable juri­dique de 43 ans, qui pointe l’influence du racisme véhi­cu­lé chaque jour dans les médias. À tel point que, depuis un an, sa san­té men­tale a fini par dévis­ser. “Ça a été insi­dieux. J’ai un métier qui m’impose de m’informer. L’actualité, c’est ma vie. Et là, je n’y arrive plus, ça m’atteint trop. Parce que j’ai l’impression qu’on parle de moi tout le temps dans les médias. De moi, ou alors de ma mère, de mes cou­sines qui portent le voile. Cet été, on m’a mis en arrêt, car je n’en pou­vais plus. Et ça repart sur cette his­toire d’abaya à la ren­trée…”, poursuit-​elle, dépitée.

Lire aus­si I Douce Dibondo : “La charge raciale nous tue à petit feu”

Ce racisme ambiant, dont elle sait qu’il est entre­te­nu “par oppor­tu­nisme poli­tique”, a fini par impac­ter son rap­port au tra­vail. “Pour moi, c’est vrai­ment le double effet Kiss Cool, car j’ai un métier d’intérêt géné­ral. Et là, l’intérêt géné­ral, je ne le com­prends plus”, déplore cette Française d’origine algé­rienne, qui se dit, elle aus­si, “épui­sée”. En octobre der­nier, lorsque Gérald Darmanin a lan­cé une polé­mique – une de plus –, après que Karim Benzema a témoi­gné son sou­tien aux habitant·es de Gaza, elle s’est sen­tie “HS”. “Ça a été un point de bas­cule. J’ai eu des crises de larmes, j’étais incon­so­lable. Parce que c’était incom­pré­hen­sible pour moi. C’est du domaine du délire”, constate-​t-​elle. Alors, depuis quelques mois, elle a déci­dé de prendre ses dis­tances avec l’actualité, pour se pré­ser­ver. “J’ai éteint Instagram tout le mois d’août. Depuis sep­tembre, j’ai cou­pé Twitter. Ça m’a per­mis de souf­fler. Je ne regarde plus les infos, seule­ment quelques émis­sions, sans édi­to­ria­listes. J’ai des amis qui veulent me par­ler d’actualité du matin au soir, mais moi, je ne veux plus. Petit à petit, je mets des bar­rières saines. Et j’en parle avec des amies qui sont noires ou d’origine arabe, avec qui l’on forme un petit cercle assez bien­veillant”, explique Samia. 

Une méca­nique perverse 

La psy­chiatre Fatma Bouvet de la Maisonneuve pointe jus­te­ment le coût psy­cho­lo­gique et social de ce racisme politico-​médiatique, dans un pays où un·e Française sur trois a des liens avec l’immigration et où 12% de la popu­la­tion a des ori­gines extra-​européennes. “Ces dis­cours dis­cri­mi­nants, ces attaques récur­rentes créent de vraies souf­frances, par­fois extrêmes”, constate chaque jour cette pro­fes­sion­nelle. Qui y voit la consé­quence d’une méca­nique per­verse. “C’est-à-dire qu’aujourd’hui, vous avez énor­mé­ment de débats sur l’immigration, les quar­tiers, le voile, sans qu’on ne fasse jamais inter­ve­nir de per­sonnes qui soient concer­nées ou qui aient vécu cette expé­rience. On est véri­ta­ble­ment dans un pro­ces­sus de per­ver­sion : on squatte votre esprit, on dit de vous ce que vous pen­sez – même si ce n’est pas ce que vous pen­sez. En plus, on ne vous auto­rise pas la parole. Et quand vous êtes dans une situa­tion où vous ne maî­tri­sez même plus votre psy­ché, c’est qua­si­ment que vous n’existez plus. En fait, on vous déshu­ma­nise. Ce qui vous amène à dou­ter et à perdre le contrôle sur vos pro­jets, vos amours, vos émo­tions, votre confiance”, ana­lyse cette psy­chiatre et écrivaine. 

Elle qui place la ques­tion de la détes­ta­tion de soi au cœur de son der­nier roman (L’Odeur d’un homme, édi­tions Au Pont 9, 2023) alerte sur les risques que font peser les pré­ju­gés racistes en matière de san­té men­tale. “L’intériorisation des idées péjo­ra­tives, ça impacte évi­dem­ment l’estime de soi, par­fois jusqu’à la dépres­sion. Ça peut géné­rer un sen­ti­ment d’imposture au tra­vail, au point où vous tra­vaillez deux, trois fois, quatre fois plus que les autres. Ça peut don­ner des situa­tions de colère intense et de pas­sage à l’acte. Ça peut don­ner des situa­tions d’envie de se dis­so­cier de cette réa­li­té qui est dure, à des conduites addic­tives”, énu­mère Fatma Bouvet de la Maisonneuve.

Dans son essai bio­gra­phique Décolonisons-​nous, paru à l’automne 2023 chez JC Lattès, Franck Lao, qui tient le compte Instagram du même nom, consacre un sous-​chapitre à la ques­tion de la san­té men­tale. Dans lequel il raconte sa propre des­cente aux enfers : sa dépres­sion non diag­nos­ti­quée appa­rue après la mort de son père (vic­time de l’affaire du “sang conta­mi­né”), son anxié­té, son addic­tion au can­na­bis, sa poly­con­som­ma­tion de drogues, puis sa confron­ta­tion avec ses souf­frances psy­chiques. “Dans quelle mesure le racisme a‑t-​il pu contri­buer à cette des­cente aux enfers, à la fra­gi­li­sa­tion de ma san­té men­tale ? Bien sûr qu’il n’en est pas la cause unique. Tout un ensemble de para­mètres entrent en jeu dans la sta­bi­li­té et la san­té psy­cho­lo­gique d’une per­sonne. Mais dans notre socié­té actuelle, l’impact de la race, en tant que pro­duit du racisme, sur la san­té men­tale des per­sonnes non blanches, est encore trop peu consi­dé­rée”, écrit-​il. Alors même qu’il s’agit d’un enjeu de san­té publique.

Un angle mort 

“En 2012, l’Organisation mon­diale de la san­té a recon­nu les injus­tices et les dis­cri­mi­na­tions comme des fac­teurs envi­ron­ne­men­taux pré­ju­di­ciables à la san­té men­tale”, rap­pelle ain­si Yaotcha d’Almeida. Parmi les prin­ci­paux troubles psy­chiques qui touchent les per­sonnes raci­sées ? “Les troubles dépres­sifs, les troubles anxieux – dont le trouble de stress post-​traumatique, qui est le plus extrême – et le trau­ma racial”, pré­cise la psy­cho­logue. Également appe­lé “trau­ma­tisme racial” (race based trau­ma, en anglais), celui-​ci est une réac­tion consé­cu­tive à une accu­mu­la­tion d’expériences néga­tives liées au racisme, pro­vo­quant un stress trau­ma­tique. Un effet mis à jour et concep­tua­li­sé par Robert T. Carter, pro­fes­seur de psy­cho­lo­gie aux États-​Unis. Mais qui, en France, est bien peu, voire pas du tout, étudié.

Alors que, en 2019, quatre-​vingts psy­cha­na­lystes français·es ont signé une tri­bune dans Le Monde pour dénon­cer le déve­lop­pe­ment d’une pen­sée déco­lo­niale et d’une “lutte des races” dans les sciences sociales (dont la psy­cha­na­lyse, donc), force est de consta­ter que les effets du racisme sur la san­té men­tale res­tent lar­ge­ment igno­rés . “Il n’y a pas de recon­nais­sance aca­dé­mique de ce fait, qui ne fait pas l’objet de recherches, ou alors très peu et à la marge. À ma connais­sance, il existe le tra­vail de thèse réa­li­sé par [la psy­cho­logue] Racky Ka, en 2013, et il y a actuel­le­ment une doc­to­rante à Paris‑7 qui tra­vaille sur cette ques­tion”, résume Yaotcha d’Almeida. Et si la facul­té de méde­cine de Lausanne (Suisse) a, pour la pre­mière fois, évo­qué le sujet lors d’un col­loque scien­ti­fique à l’automne 2023, il est encore absent des ensei­gne­ments dis­pen­sés en France aux (futur·es) professionnel·es de santé. 

“Ça reste un angle mort. Même si la thé­ma­tique émerge timi­de­ment, du fait de per­sonnes raci­sées qui ont déci­dé de por­ter ce sujet dans le monde uni­ver­si­taire et dans le monde asso­cia­tif, comme le col­lec­tif Perspective ou le col­lec­tif déCONSTRUIRE, constate Yaotcha d’Almeida, qui évoque aus­si le tra­vail de l’association de soignant·es Pour une M.E.U.F. (Pour une méde­cine enga­gée unie et fémi­niste). Mais en atten­dant que la pro­blé­ma­tique soit enfin prise en compte dans le champ de la san­té men­tale, les per­sonnes raci­sées, elles, conti­nuent de souf­frir d’une absence d’écoute, de consi­dé­ra­tion et de prise en charge. 

Survivre au taf

Comment faire, alors, pour tenir le coup ? Faute d’avoir une réponse miracle, Yaotcha d’Almeida avance quelques pistes. “S’entourer et main­te­nir le lien avec des per­sonnes de confiance et bien­veillantes. Parler de ce qu’ils et elles vivent à des membres de leur groupe d’appartenance, à d’autres per­sonnes raci­sées – en tout cas à des per­sonnes qui vont pou­voir entendre et accueillir leur vécu sans l’invalider. En France, le com­mu­nau­ta­risme est dia­bo­li­sé, mais les recom­man­da­tions issues de recherches menées aux États-​Unis sont très claires : les cercles de paroles, les groupes de sou­tien entre femmes noires sont béné­fiques, notam­ment pour celles qui souffrent d’anxiété ou de panique”, sou­ligne la psy­cho­logue, qui anime elle-​même des groupes de paroles, à Rennes (dans le cadre de l’association déConstruire), pour les per­sonnes impac­tées par le racisme. En guise d’outil, elle invite éga­le­ment à regar­der du côté des for­ma­tions pro­po­sées par sa consœur Racky Ka, ou encore à lire Survivre au taf. Stratégies d’autodéfense pour per­sonnes mino­ri­sées, de Marie Dasylva et Stella Tiendrebeogo. De quoi pré­ser­ver un peu sa san­té men­tale, dans une socié­té qui, pour l’heure, pré­fère fer­mer les yeux sur son racisme et les souf­frances qu’il engendre.

* Le pré­nom a été modi­fié à la demande de l’interviewée.

Lire aus­si I Et les premier·ères invité·es de Lauren Bastide dans “Folie douce”, son nou­veau pod­cast sur la san­té men­tale, sont…

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