Dans un entretien au Journal du Dimanche, ce week-end, la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé a détaillé les contours de la future loi sur la fin de vie qu’Emmanuel Macron annoncera d’ici à la fin de l’été.
Au lendemain de la clôture des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie qui s'est prononcée en majorité favorable au suicide assisté et à l'euthanasie, le 3 avril, le chef de l’Etat a annoncé « un projet de loi » sur la fin de vie d’ici « à la fin de l’été ». Dimanche 21 mai, Agnès Firmin Le Bodo, la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, qui portera le projet de loi sur la fin de vie, a, elle, annoncé dans un entretien donné au Journal du Dimanche (JDD) les contours du futur texte de loi qui devra assurer « une traçabilité de A à Z » pour un contrôle a priori et a posteriori.
Le texte « comprendra trois blocs : aide active à mourir, soins palliatifs et droits des patients », a décrit la ministre, qui ne tranche pas sur ce que serait le modèle français entre aide active à mourir et euthanasie. « Ce qui importe, c’est que la possibilité encadrée de bénéficier d’une aide active à mourir devienne effective, comme le réclament 75 % de nos concitoyens », a exposé Agnès Firmin Le Bodo qui s’impose donc comme la pilote de la réforme aux dépens du ministre de la santé, François Braun, plus réservé sur le sujet.
« La fin de vie est, depuis ma nomination au gouvernement, au cœur des missions qui m’ont été confiées », a assumé la ministre, dans l’entretien au Journal du Dimanche avant de tenter de rassurer ceux et celles qui s’inquiètent du contenu du futur projet de loi. Interrogée sur ce que serait le « modèle français » de la fin de vie, la ministre a répondu en premier lieu que « dans ce projet, rien n’est pour l’instant définitif ». D'ici quinze jours, la ministre va plancher sur son élaboration avec un groupe de soignant·es et de parlementaires déjà impliqué·es dans le débat.
Clause de conscience pour les soignant·es
Mais les lignes rouges du projet de loi sont, elles, déjà fixées. « Les mineurs en seront exclus ; le pronostic vital du patient devra être engagé à moyen terme ; sa volonté recueillie à plusieurs reprises ; son discernement, intact. » La notion de moyen terme est « au cœur du travail en cours », a‑t-elle complété. « D’autres points ne sont pas tranchés : quel délai pour réitérer la demande ? L’équipe pluridisciplinaire examinera-t-elle la première ou la deuxième requête ? Prévoit-on une consultation psychologique entre les deux ? », a‑t-elle mis en avant.
« Les patients souffrant de maladies psychiques » n’auront pas accès à l’aide active à mourir, a poursuivi la ministre. En outre, « il faudra s’assurer que le patient s’est bien vu proposer une prise en charge palliative. Car la plupart ne souhaitent plus mourir quand ils bénéficient de ces soins », a‑t-elle rappelé.
Parmi les mesures qui composeront le futur texte de loi, Agnès Firmin Le Bodo a expliqué souhaiter que les soignant·es opposé·es à l’aide active à mourir puissent « faire jouer une clause de conscience dès la première étape du processus, quand ils doivent se prononcer sur un pronostic vital engagé à moyen terme ». Pour la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), dont les propos ont été rapportés par Le Monde, « proposer aux médecins de faire jouer la clause de conscience, c’est les mettre face à la décision de devoir renoncer à la promesse de non-abandon d’un malade. Or, ce non-abandon est la seule promesse tenable quand on pratique une médecine sans espoir de guérison », regrette la docteure Claire Fourcade, présidente de la SFAP.
Quid des soins palliatifs
Pour Claire Fourcade une autre annonce de la ministre pose problème. L’idée « d’un texte unique qui mélange aide active à mourir et soins palliatifs » est inacceptable. « Donner la mort n’est pas un soin, s’indigne-t-elle. Et comment les députés qui ne veulent pas de l’aide active à mourir pourront s’opposer à un projet de loi qui développe des soins palliatifs ? », redoute-t-elle selon Le Monde.
Outre la loi, la ministre a confirmé dans Le Journal du dimanche qu’une « instruction » ministérielle, qui sera publiée « dans les prochains jours », va réorganiser l’offre de soins palliatifs. D'après les information du Monde, le cancérologue Franck Chauvin sera chargé de définir, d’ici décembre, un « plan décennal » de développement des soins palliatifs.
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