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© Kelli Mc Clintock / Unsplash

Commission d’enquête par­le­men­taire sur les crèches : pour la rap­por­teure Sarah Tanzilli, le sys­tème est "à bout de souffle"

Le pro­jet de rap­port de la com­mis­sion d’enquête de l’Assemblée natio­nale sur les crèches, sou­mis à un vote ce lun­di, fait le constat d’un sys­tème “à bout de souffle”, selon sa rap­por­teure, la dépu­tée Renaissance Sarah Tanzilli, sur fond de cri­tiques de LFI qui l’accuse de ména­ger le sec­teur pri­vé lucratif.

Les député·es se réunissent ce lun­di 27 mai pour dis­cu­ter du finan­ce­ment et du fonc­tion­ne­ment des crèches et approu­ver le rap­port de la com­mis­sion d'enquête par­le­men­taire à ce sujet. "Complexité kaf­kaïenne, sous-​financement chro­nique, insa­tis­fac­tion des usa­gers et des per­son­nels, mul­ti­pli­ca­tion des déro­ga­tions : le sys­tème d’accueil des jeunes enfants en crèche est à bout de souffle", observe la dépu­tée Renaissance Sarah Tanzilli, autrice du rapport.

“Les tra­vaux ont démon­tré que les défaillances iden­ti­fiées n’étaient pas la consé­quence de l’ouverture du sec­teur des crèches au sec­teur pri­vé ou de l’influence des fonds d’investissement”, a pré­ci­sé l’élue du Rhône. “C’est le modèle éco­no­mique et les règles de fonc­tion­ne­ment des crèches qui ont contri­bué à éta­blir un cercle vicieux de la défaillance”, explique-​t-​elle.

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Après la paru­tion en sep­tembre de deux livres-​enquêtes met­tant en cause les crèches pri­vées, Le Prix du ber­ceau et Babyzness, La France insou­mise (LFI) avait obte­nu en novembre, contre l’avis des groupes Les Républicains (LR) et Renaissance, la créa­tion de cette com­mis­sion char­gée d’enquêter sur le modèle éco­no­mique des crèches et la qua­li­té d’accueil du jeune enfant. Mais le poste de pré­sident est reve­nu à un dépu­té LR, Thibault Bazin, et celui de rap­por­teure à Sarah Tanzilli. Vice-​président, le dépu­té LFI William Martinet a indi­qué à la presse qu’il publie­rait un contre-rapport.

"Cercle vicieux"

Les pou­voirs publics ont mis l'accent sur la quan­ti­té de places plu­tôt que la qua­li­té d'accueil, pour­tant essen­tielle quand "les neu­ros­ciences montrent que les 1000 pre­miers jours de l’enfant sont déter­mi­nants dans son ave­nir", selon Sarah Tanzilli. "Un cercle vicieux de la défaillance" s'est ins­tal­lé : face au manque de per­son­nel, les pou­voirs publics ont "allé­gé les taux d'encadrement". Le finan­ce­ment incite à "accueillir le plus d'enfants pos­sible" dans une crèche. Cela dégrade les condi­tions de tra­vail des pro­fes­sion­nelles et les pousse à quit­ter le métier. Avec in fine moins de ber­ceaux : 10 000 places sont "gelées" en France faute de per­son­nel, sou­ligne encore la dépu­tée. Pour la rap­por­teure, des pro­blèmes liés à la qua­li­té d'accueil s'observent par­tout, dans le pri­vé (un quart des quelque 500 000 places) comme dans le public (la moi­tié) ou l'associatif (un quart). 

Mais pour William Martinet, au contraire, “les tra­vaux ont fait la démons­tra­tion des effets néfastes des crèches pri­vées lucra­tives” : 93 % des vingt-​six fer­me­tures admi­nis­tra­tives de crèches ont eu lieu chez des ges­tion­naires pri­vés lucra­tifs, a‑t-​il indi­qué dans une confé­rence de presse jeu­di der­nier. “Une des révé­la­tions” des audi­tions est un “mon­tage finan­cier pro­blé­ma­tique” : cer­tains groupes paient des loyers pour une par­tie de leurs bâti­ments à des socié­tés civiles immo­bi­lières qui appar­tiennent à leurs action­naires, a‑t-​il décla­ré à la presse.

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Selon Sarah Tanzilli, les audi­tions ont mon­tré que "les fonds d'investissement n'ont pas un modèle basé sur la ren­ta­bi­li­té à court terme ou le ver­se­ment de divi­dendes à leurs action­naires". "Le modèle éco­no­mique de ces fonds inclut la qua­li­té d'accueil pour pou­voir croître", observe-​t-​elle, sou­li­gnant les déboires du groupe pri­vé People & Baby depuis la mort d'un enfant dans une micro­crèche à Lyon en 2022. Les crèches pri­vées ont four­ni 90% des nou­velles places en dix ans. 

Parmi les pistes envi­sa­gées par la rap­por­teure, rame­ner le taux d’encadrement à un adulte pour cinq enfants (un pour six actuel­le­ment) d’ici à 2027 pour per­mettre aux professionnel·les de bien faire leur tra­vail et atti­rer des voca­tions. “De belles pro­messes sans moyens pour aug­men­ter les salaires et donc qui ne ver­ront jamais le jour”, grince William Martinet. La rap­por­teure pro­pose en outre de sup­pri­mer le méca­nisme de réser­va­tion de ber­ceaux par les employeurs, qui crée un “coupe-​file” pour leurs employé·es. Dans une logique de ser­vice public de la petite enfance, la com­mune doit deve­nir, selon elle, l’interlocuteur unique des parents, sou­te­nue par un “ver­se­ment petite enfance” impo­sé aux employeur·euses.

Alors que manquent 200 000 places d’accueil du jeune enfant, four­nir des "solu­tions fiables" aux familles pour qu'elles aient autant d'enfants qu'elles le sou­haitent peut aider à contrer la chute de la nata­li­té (-7% en 2023), sou­ligne la dépu­tée, fai­sant écho à l'ambition de "réar­me­ment démo­gra­phique" for­mu­lée par Emmanuel Macron.

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