Depuis que la Cour suprême des États-Unis, remaniée par Donald Trump, a annulé la protection constitutionnelle de l’avortement en 2022, les conservateur·rices ont perdu chaque référendum ou scrutin abordant la question de l’avortement. Ce, même dans des États qui leur sont d’habitude acquis, comme l’Ohio ou le Kansas.
À sept mois de la présidentielle américaine, les voyants sont au rouge pour les républicain·es sur l’avortement, un sujet que la victoire surprise d’une démocrate à un scrutin dans l’Alabama a replacé au cœur de la campagne présidentielle.
Inconnue du grand public, Marilyn Lands a décroché, mardi, un siège d’élue locale dans cet État très conservateur, en faisant campagne sur la protection de l’avortement et des fécondations in vitro (FIV). Sa victoire écrasante est un nouveau revers pour les républicain·es, qui seront représenté·es par Donald Trump à la présidentielle du 5 novembre.
Depuis que la Cour suprême des États-Unis, remaniée par Donald Trump, a annulé la protection constitutionnelle de l’avortement en 2022, les conservateur·rices ont perdu chaque référendum ou scrutin abordant la question de l’avortement. Et ce, même dans des États qui leur sont d’habitude acquis, comme l’Ohio ou le Kansas. Dans l’Alabama, où se trouvent certains des comtés avec le plus haut taux de soutien à Donald Trump, le sujet était particulièrement brûlant : l’accès aux FIV y a temporairement été menacé en février par une décision judiciaire très décriée.
“Contre-courant”
“Il s’agit sans aucun doute d’un nouvel avertissement pour les républicains leur indiquant qu’ils sont à contre-courant sur la question”, affirme le politologue Larry Sabato. L’avertissement est d’autant plus retentissant que l’avortement promet, selon plusieurs sondages, d’être un des grands dossiers de la campagne opposant le républicain Donald Trump au président démocrate Joe Biden.
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Si les républicain·es ont longtemps répliqué en accusant les démocrates de vouloir proposer des “avortements à la demande”, plusieurs voix se sont élevées dans le “Grand Old Party” pour appeler à un changement de cap urgent.
Sur cette question, Donald Trump, qui ne rate jamais l’occasion de rappeler que c’est grâce à lui que la Cour suprême a effectué son revirement historique sur l’avortement, est délibérément ambigu. Veut-il faire adopter une interdiction nationale de l’avortement ? Si oui, à partir de combien de semaines de grossesse ? Interrogé de façon répétée, le septuagénaire esquive. Lors d’une interview radio mi-mars, le candidat républicain a suggéré qu’il pourrait, éventuellement, être ouvert à une interdiction de l’avortement après quinze semaines de grossesse. Avant d’assurer qu’il ne revenait pas selon lui à l’administration américaine de trancher sur ces questions.
Référendums locaux
Le parti des démocrates, de leur côté, capitalise sur ce sujet brûlant, bien conscient que la question a fait d’eux une machine à gagner, du moins dans les scrutins locaux. La colistière de Joe Biden, Kamala Harris, se déplace régulièrement sur des campus américains dans les États les plus disputés de l’élection pour évoquer le sujet. “Dans tout le pays, des extrémistes s’en prennent à l’accès des femmes aux soins de santé et aux droits reproductifs”, a‑t-elle encore dénoncé mardi en Caroline du Nord, exhortant les Américain·es à soutenir Joe Biden le 5 novembre pour protéger l’accès à l’avortement. Mi-mars, elle est devenue la première vice-présidente en exercice à se rendre dans une clinique effectuant des IVG, dans le Minnesota.
À travers le pays, les démocrates ont aussi encouragé à l’organisation de mini-référendums sur l’avortement dans plusieurs États décisifs pour la présidentielle – l’Arizona, le Nevada, la Pennsylvanie – le même jour que l’élection qui opposera Donald Trump à Joe Biden.
La logique veut que les voix pro-avortement pourraient grandement profiter à Joe Biden et mobiliser des jeunes électeur·rices qui auraient autrement pu snober le scrutin. “Si l’élection est aussi serrée qu’on le pense […], il est évident que l’avortement peut faire la différence”, assure Larry Sabato, professeur à l’université de Virginie.
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