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Vaccination, dépis­tage, auto­pré­lè­ve­ments… : le point sur les avan­cées dans la lutte contre le papillomavirus

Changement de pro­cé­dure, auto­pré­lè­ve­ment, taba­gisme, vac­ci­na­tion… Causette vous met à jour sur les avan­cées des professionnel·les de san­té dans la lutte contre le HPV.

La Société fran­çaise de col­po­sco­pie et de patho­lo­gie cervico-​vaginale (SFCPCV) pré­sen­tait aujourd’hui les résul­tats de ses recherches et nou­veaux pro­to­coles dans la lutte contre le papil­lo­ma­vi­rus et les can­cers qui y sont liés, notam­ment celui du col de l’utérus.

Une “sous-​vaccination pré­oc­cu­pante” au collège

Mesure très atten­due, la vac­ci­na­tion contre le papil­lo­ma­vi­rus pour les élèves de cin­quième – filles comme gar­çons – au col­lège est effec­tive depuis cette année. “Idéalement, il faut vac­ci­ner entre 11 et 14 ans”, explique le Dr Geoffroy Canlorbe. La France est l’un des der­niers pays d’Europe en termes de cou­ver­ture vac­ci­nale, se clas­sant 28e sur une liste de trente et un pays. Le vac­cin contre le HPV per­met pour­tant de réduire consi­dé­ra­ble­ment l’apparition de lésions pré­can­cé­reuses. Alors que cette cam­pagne de vac­ci­na­tion n’avait pour cible que 30 % des collègien·nes de cin­quième, ses résul­tats sont très loin des objec­tifs fixés par le gouvernement.

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Selon le minis­tère de la Santé, moins de 10 % de ces élèves ont reçu une pre­mière dose de vac­cin à l’issue de cette cam­pagne, 20 % de moins que l’objectif déjà très bas fixé par le gou­ver­ne­ment. Pour expli­quer ce très faible pour­cen­tage, la SFCPCV avance notam­ment la mort d’un ado­les­cent près de Nantes. Le jeune gar­çon était décé­dé d’une bles­sure à la tête après un malaise pro­vo­qué par le stress de la vac­ci­na­tion. Depuis, “les tapis au sol sont recom­man­dés dans les lieux de vac­ci­na­tion”, explique le Dr Canlorbe, qui pré­cise que les gar­çons sont plus sus­cep­tibles de souf­frir de syn­copes liées à l’anticipation du vac­cin. Ce décès aurait refroi­di les parents, dont le consen­te­ment est néces­saire pour que les enfants accèdent à la vaccination. 

Démarrage dif­fi­cile pour le dépis­tage orga­ni­sé du can­cer du col 

Depuis 2018, le dépis­tage du can­cer du col de l’utérus doit être réa­li­sé selon un pro­gramme orga­ni­sé et simi­laire chez tous et toutes les professionnel·les de san­té à tra­vers la France. Selon ces direc­tives, on pré­fère désor­mais réa­li­ser un seul test de dépis­tage pri­maire, à savoir une cyto­lo­gie (ancien­ne­ment appe­lée “frot­tis”) pour les femmes âgées de moins de 30 ans et un test HPV pour les autres. Cette mesure vise à favo­ri­ser un dépis­tage plus effi­cace et à ne pas opé­rer de col­po­sco­pies (exa­men du col de l’utérus avec un micro­scope bino­cu­laire) qui ne seraient pas néces­saires. En effet, un test HPV pra­ti­qué sur une femme de moins de 30 ans a de grandes chances de reve­nir posi­tif, mais n’indique pas for­cé­ment des lésions sur le col de l’utérus. Au début de leur vie sexuelle, 80 % des femmes sont conta­mi­nées par le papil­lo­ma­vi­rus sans pour autant néces­si­ter une col­po­sco­pie, 93 % des patientes ne pré­sen­tant pas de lésions pré­can­cé­reuses mal­gré un test HPV positif. 

Malgré l’annonce de ces nou­velles pra­tiques, le SFCPCV constate que de nombreux·euses praticien·nes font le choix du co-​testing (test HPV et cyto­lo­gie). Une déci­sion qui tend à aug­men­ter les col­po­sco­pies, sans preuve du béné­fice de cette vieille habi­tude. La doc­teure Christine Bergeron sou­ligne qu’à cette com­mu­ni­ca­tion com­pli­quée entre les acteur·rices du dépis­tage s’ajoutent des dif­fi­cul­tés de cen­tra­li­sa­tion des résul­tats. Les professionnel·les de san­té sont tenu·es par le RGPD (règle­ment géné­ral sur la pro­tec­tion des don­nées) d’obtenir le consen­te­ment de leurs patientes avant de trans­mettre les conclu­sions de leurs dépis­tages aux Centres de coor­di­na­tion des dépis­tages des can­cers (CRCDC). Cependant, un grand nombre de ces méde­cins ne cochent pas la case pré­vue à cet effet et ne com­mu­niquent donc pas ces résul­tats pour en assu­rer le sui­vi. Face à ces freins, Christine Bergeron ne cache pas une cer­taine frus­tra­tion envers l’organisation pré­vue par l’État pour ces dépis­tages, dont le nou­veau dérou­le­ment est cen­sé être mise en place depuis 2018.

L'autoprélèvement, mais pas pour tout le monde

Le dépis­tage du can­cer du col de l’utérus fait face à un autre pro­blème de taille : d’après la SFCPCV, 40 % des femmes ne répon­draient pas aux invi­ta­tions au dépis­tage, alors même que ce can­cer est res­pon­sable d’envi­ron 1 100 décès par an. Ainsi, de nom­breuses femmes issues de popu­la­tions pré­ca­ri­sées (mais pas que) ne se font pas dépis­ter ou ne dis­posent pas même d’un·e méde­cin traitant·e. Pour lut­ter contre ces dis­pa­ri­tés, l’État sou­haite pro­po­ser des auto­tests – sortes de Coton-​Tige vagi­naux – qui per­met­traient aux femmes de récol­ter elles-​mêmes leurs sécré­tions vagi­nales à envoyer à un labo­ra­toire. Ce dis­po­si­tif se pré­sente sous forme de kit rem­bour­sé en cas de déten­tion d’une ordon­nance médi­cale. Il est par ailleurs aus­si sen­sible qu’un pré­lè­ve­ment pro­fes­sion­nel, mais ne s’apparente pas à une cyto­lo­gie car il n’atteint pas le col de l’utérus.

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Pour l’heure, l’envoi par la poste de cet auto­test ne concer­ne­rait que les femmes de plus de 30 ans n’ayant pas répon­du au pre­mier appel à se faire dépis­ter. Il est néan­moins dis­po­nible sur demande. Il s’agit d’un “moindre mal”, d’après le gyné­co­logue Xavier Carcopino, qui ajoute qu’une consul­ta­tion avec un·e professionnel·le est tou­jours pré­fé­rable. Il pré­cise par ailleurs qu’actuellement l’envoi de ces dis­po­si­tifs a été “vali­dé” par l’Institut natio­nal du can­cer et le gou­ver­ne­ment, mais ne sera effec­tif que “dans les mois à venir”. Des délais tou­jours flous pour une mesure essen­tielle cen­sée empê­cher l’augmentation des can­cers du col de l’utérus non diagnostiqués. 

Quelques chiffres

Lors de ces annonces, la SFCPCV s’est éga­le­ment pen­chée sur la façon d’aborder les patientes – sou­vent effrayées par la men­tion du papil­lo­ma­vi­rus – et de répondre au mieux à leurs questions. 

Le Dr Jean Luc Mergui rap­pelle ain­si à quel point le HPV est un virus répan­du. La majo­ri­té de la popu­la­tion contrac­te­ra un jour le papil­lo­ma­vi­rus. Parmi toutes les per­sonnes expo­sées, seul 7% déve­lop­pe­ront néan­moins des lésions pré­can­cé­reuses, poten­tiel­le­ment res­pon­sables de l'apparition d'un can­cer si elles ne sont pas trai­tées. Pour la plu­part des indi­vi­dus en revanche, l’immunité s'accroît et le virus dis­pa­raît dans les années qui suivent l'exposition au HPV.

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Puisqu’il est si répan­du, la plu­part des per­sonnes atteintes du papil­lo­ma­vi­rus le trans­met­tront un jour à leur par­te­naire. Le risque de déve­lop­per des lésions est bien plus faible mais pas inexis­tant chez les patients mas­cu­lins, 40 000 (pré)cancers fémi­nins se déclarent par an pour 1900 chez les hommes (ils ont néan­moins trois fois plus de chances de déve­lop­per des lésions aux amyg­dales). Le Dr Mergui affirme par ailleurs que le·la par­te­naire des per­sonnes infec­tées ne devrait consul­ter qu’en cas de lésions visibles.

Ce pro­fes­sion­nel rap­pelle éga­le­ment qu’il n’existe pas de trai­te­ment connu contre le papil­lo­ma­vi­rus et que la vac­ci­na­tion ne sert à rien une fois contaminé·e. “Certains méde­cins vont jusqu’à l’hystérectomie, inter­ven­tion qui est com­plè­te­ment inef­fi­cace.” Selon lui, une seule solu­tion en cas de conta­mi­na­tion : la sur­veillance régulière.

Le taba­gisme, une don­née qui ne vaut pas des clopinettes

Sans sur­prise, le tabac est peu recom­man­dé en matière de can­cer du col de l’utérus. Il en est d’ailleurs la pre­mière cause modi­fiable, puisquecela relève du style de vie des patient·es. Il est éga­le­ment la seconde cause de contrac­tion de la mala­die, après l’exposition au HPV. Arrêter la ciga­rette favo­ri­se­rait la dis­pa­ri­tion des lésions pré­can­cé­reuses d’après la Dre Julia Maruani, qui ajoute que “le taba­gisme est encore plus néfaste lorsqu’il com­mence avant l’exposition au papil­lo­ma­vi­rus”. Même si l’idéal, “c’est de ne pas com­men­cer”, conclut la médecin.

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