Le ministre du Travail qatari a annoncé, ce mercredi 2 novembre, que le Qatar ne financerait pas de fonds d’indemnisation pour les travailleurs blessés et les familles des ouvriers tués sur les chantiers de la Coupe du monde de football.
Le Qatar ne veut rien savoir. À dix-huit jours du coup d’envoi de la coupe du monde de football, le riche émirat du Golfe s’est opposé à la création d’un fonds d’indemnisation pour les travailleurs migrants blessés et les familles des ouvriers tués sur les chantiers de l’événement. Le ministre du Travail qatari Ali Ben Samikh Al-Marri a indiqué ce mercredi 2 novembre qu’un tel fond de compensation n’était pas réalisable. « Chaque mort est une tragédie, mais il n’y a pas de critères pour établir ce fonds », s’est-il justifié auprès de l’AFP.
« Où sont les victimes ? Avez-vous des noms ? », a interrogé le ministre. Pour rappel, le gouvernement qatari ne reconnaît que trois décès d’ouvriers immigrés depuis la nomination du pays il y a dix ans. Bien peu en comparaison du chiffre effrayant, avancé par une enquête du Guardian en février 2021, qui fait état de 6 750 travailleurs migrants d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh et du Sri Lanka, morts pendant la construction des stades, des routes et des hôtels. Un chiffre aujourd’hui sous-estimé, puisque les décès survenus depuis 2020 n’ont pas été pris en compte. À ces morts s’ajoutent également des milliers de blessés et des « centaines de milliers de travailleurs ayant subi des violations des droits humains » (maltraitances, menaces, salaires impayés, confiscations de passeport…) selon Amnesty international.
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Les ONG Human Rights Watch et Amnesty International mènent depuis cinq une campagne visant à obtenir des compensations financières de la part de l’instance dirigeante du football mondiale, la FIFA et du pays hôte du mondial, qui débute le 20 novembre. Ali Ben Samikh Al-Marri a qualifié ces appels « de coup de communication », auprès de l'AFP, fustigeant des critiques « motivées par du racisme ». « Ils ne veulent pas permettre à un petit pays, un pays arabe, un pays musulman, d'organiser la Coupe du monde », a‑t-il avancé.
De son côté, la FIFA a fait savoir mi-octobre qu'il y avait un « dialogue en cours » pour prendre des mesures en faveur des ouvriers qui ont travaillé sur les chantiers. Dans un rapport rendu en mai, Amnesty International proposait que l'instance réserve un montant d’au moins 420 millions d’euros à investir dans des fonds destinés aux réparations. Une somme correspondant aux primes offertes aux équipes participant à la Coupe du monde.
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Le ministre du Travail qatari a rappelé que l'émirat a mis en place en 2018 un fonds d’indemnisation pour les travailleurs ne percevant pas leur salaire, avançant le chiffre de 320 millions d’euros versés rien qu’en 2022. « Si une personne ayant droit à une indemnisation ne l’a pas reçue, qu’elle se manifeste et nous l’aiderons », a‑t-il ajouté. Selon deux rapports de l’Organisation internationale du travail (OIT) publiés le 1er novembre, 34 425 plaintes de travailleurs migrants ont été enregistrées entre octobre 2021 et octobre 2022 pour non-paiement de salaire. C’est deux fois plus que l’année précédente.
En France, la Fédération française de football (FFF) s’est, elle, montrée favorable à la mise en place d’un fond d’indemnisation « pour tous ceux qui ont été victimes d'accidents du travail au cours des chantiers de la Coupe du monde », a déclaré le 4 octobre son vice-président Philippe Diallo.