Ce 23 mars, le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est adressé au parlement pour exhorter la France à poursuivre ses soutiens militaires et humanitaires, tout en exigeant des entreprises françaises encore présentes sur le sol russe qu'elles suspendent leurs activités dans le pays envahisseur.
Cela fera un mois demain que la Russie livre une guerre acharnée à l'Ukraine. Dans un discours solennel retransmis en visio-conférence, Volodymyr Zelensky s'est adressé aux représentant·es de la nation française, député·es et sénateur·rices réuni·es, ce mercredi 23 mars, dans deux hémicycles pleins à craquer. Après les États-Unis, l'Union européenne, l'Italie, Israël, la Grande-Bretagne et avant la Suède demain, le président ukrainien, qu'on voit exceller dans sa communication depuis le début du conflit, s'est, une nouvelle fois, prêté à l'exercice diplomatique d'une adresse droit dans les yeux à un pays dont il exige l'attention sur les milliers de morts provoquées par le conflit.
Après avoir rappelé que c'était « la première fois de notre histoire parlementaire » que le président d'un pays en guerre est accueilli pour un discours, le président du Sénat Gérard Larcher (LR) a loué le courage des « Ukrainiens civils et militaires qui résistent jusqu'à l'héroïsme » à l'invasion russe. De son côté, le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand (LREM) a assuré à Volodymyr Zelensky que la France continuera « de mettre tout en œuvre pour vous porter assistance », qu'il s'agisse de fournitures militaires ou humanitaires.
« Je voudrais poser une question : comment arrêter cette guerre, comment instaurer la paix en Ukraine ? » a à son tour demandé Volodymyr Zelensky. Pour celui qui avait choisi la France comme premier déplacement à l'étranger après son élection en 2019, cela passe notamment par l'obligation pour les entreprises françaises qui poursuivent leurs activités en Russie à « quitter le marché russe ». « Renault, Auchan, Leroy Merlin et les autres doivent cesser d’être le sponsor de la machine de guerre de la Russie, arrêter de financer les meurtres d’enfants et de femmes, les viols », a‑t-il lancé, car « tout le monde doit se rappeler que les valeurs valent plus que les bénéfices ». Face à « l'armée russe qui ne distingue pas les objets qu'elle cible et détruise tout, les écoles, les hôpitaux, les quartiers résidentiels, les stocks de médicaments », il n'est plus admissible aux yeux de Volodymyr Zelensky que certain·es « se cachent la tête dans le sable et cherchent à trouver de l'argent en Russie ».
L'image de Verdun
Après avoir demandé une minute de silence en hommage aux Ukrainien·nes tué·es dans le conflit, le président ukrainien a comparé les destructions en Ukraine « aux ruines de Verdun ». Car, a souligné Zelensky, cette force aveugle qui s'abat sur le pays rappelle les heures les plus sombres de la Première Guerre mondiale. « Le 9 mars, les bombes russes ont été lancées sur l’hôpital pour enfants de Marioupol, a‑t-il rappelé. Il y avait des femmes qui se préparaient à accoucher et la plupart d’entre elles ont survécu, mais certaines ont été gravement blessées et le bébé de l'une d'elle est mort avant la naissance. Cette femme a été soignée mais a demandé aux médecins de la laisser mourir, de ne pas l’aider. Elle ne voyait pas de raisons pour vivre, elle en est morte. »
Dans la dernière partie de son discours, Zelensky a salué le « leadership » d'Emmanuel Macron dans ses efforts pour rétablir la paix en Ukraine, tout en rappelant la contribution de la France et de l'Allemagne au protocole Normandie. Cette série de négociations avec la Russie pour résoudre le conflit au Donbass avait permis la libération de prisonniers de guerre, perçue comme « une bouffée d'espoir » et un « signe que la Russie pouvait choisir la paix ». « Mais le 24 février est advenu, a‑t-il poursuivi. C'est le jour qui a effacé tous les efforts de négociations et même le concept de relations européennes avec la Russie. » Il est donc urgent pour Zelensky que la France contribue à « la restauration de l'intégrité territoriale de l'Ukraine » alors que, depuis bientôt un mois, les Ukrainien·nes « se battent pour leurs vies et leurs libertés ».
En conclusion, le président ukrainien a plaidé pour un monde dans lequel les gens meurent non plus sous les bombes mais dans « la dignité », que l'on dise au revoir aux personnes qui partent « de la même façon que la France a dit au revoir à Belmondo » en septembre. Cette référence inattendue marquant l'attachement d'un homme à une France magnifiée et éternelle et a été suivie d'une ovation de l'assistance.