L'Arcom a publié ce lundi les résultats de sa double étude sur la représentation des femmes à la télévision et à la radio ainsi que dans la publicité. Des chiffres en hausse concernant la présence des femmes à l'antenne, mais toujours en stagnation sur leur temps de parole.
Alors que mercredi se tiendra la Journée internationale des droits des femmes, l'Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), en partenariat avec l’INA, a publié lundi 6 mars, les résultats de la 8e édition de son étude annuelle comportant deux volets. Un volet sur la représentation des femmes à la télévision et à la radio et l'autre sur la représentation des femmes dans les publicités télévisées. Pour la première fois, la part des femmes présentes à l'antenne atteint 44%, soit un point de plus par rapport à l'année 2021 et six points de plus par rapport à l'année 2016. En revanche, le temps de parole des femmes a, lui, stagné, restant à 36%. « On n'est plus très loin de la parité et je ne désespère pas qu'on arrive enfin à l'atteindre », précise Roch-Olivier Maistre président de l'Arcom lors de la conférence de presse visant à détailler les résultats de l'étude.
Dans le détail de cette nouvelle étude, les résultats montrent que les femmes sont toujours mieux représentées à la télévision (46 %) qu’à la radio (42 %). Néanmoins, aux heures de grande écoute pour la télévision (18 h‑23 h), les femmes restent plus rares, avec une présence inférieure à cinq points par rapport au reste de la journée. Mais à l'inverse, sur les heures de grandes écoutes de la radio (6 h‑9 h), leur temps d'antenne est supérieur de trois points par rapport au reste de la journée.
Le service public fait mieux
« Nous constatons un décrochage [dans le temps d'antenne des femmes] entre le service public et le service privé », a indiqué Laurence Pécault Rivolier, conseillère de l'Arcom, lors de la conférence de presse de présentation de l'étude. Effectivement, autre constat de cette étude, dans les médias audiovisuels du service public, les femmes ont un temps de parole supérieur de 10 points par rapport aux antennes des médias privés, ainsi qu'un temps d'exposition visuelle supérieur de 9 points. « Les chaînes publiques ont tenu leurs engagements. Nous sommes en dialogue avec les diffuseurs privés pour qu’ils en prennent eux aussi l’ambition », a précisé Laurence Pécaut-Rivolier, selon Le Parisien.
De plus en plus d'expertes
La nette progression de cette étude est la part de terrain gagnée par les expertes. « Un élément de fierté collective, puisqu'on est parti d'assez loin pour arriver assez haut », précise Laurence Pécaut-Rivolier. Effectivement, le nombre d'expertes dans les médias audiovisuels s'établit désormais à 45%. Il s'agit de la septième année consécutive que la représentation des expertes progresse. Leur nombre a augmenté de 15 points depuis 2016. Il faut dire que l'Arcom avait fait de ce sujet une priorité, comme l'a précisé la conseillère.
À lire aussi I Femmes dans les médias : on est encore très loin de la parité !
Et c'est la radio qui enregistre la plus grande progression avec une part d'expertes à 43% en 2022, soit trois points de plus qu'en 2021. Néanmoins, les trois thématiques dans lesquelles les femmes restent les moins bien représentées – « international », « société » et « culture/loisirs » – sont aussi les trois rubriques qui représentent plus de la moitié de sujets traités par les médias.
Le bât blesse en politique
Du côté de la représentation des femmes en politique, « le chiffre n'est pas celui qu'on pouvait espérer », tonne Laurence Pécaut-Rivolier. Les femmes ne représentent que 32% des invitées politiques. Pour la sixième année consécutive, il s'agit de la catégorie qui compte le moins de femmes. En moyenne, sur l'année 2022, pendant et hors campagne présidentielle, les femmes politiques ont eu seulement 29% de temps de parole.
À lire aussi I Yaël Braun-Pivet devient la première femme présidente de l’Assemblée nationale
Pendant la présidentielle, alors que les femmes représentaient un tiers des candidatures, elles n'ont eu qu'entre 24 et 32% de temps de parole en fonction des médias. Un manque de représentation politique qui s'est retranscrit sur le second semestre de l'année 2022, où les femmes ne représentaient que 5 des 20 personnalités politiques les plus présentes dans les médias audiovisuels. Un chiffre certes en augmentation comparé aux 3 places sur 20 que les femmes représentaient en 2017, mais qui reste toujours très faible.
Dans les programmes sportifs, les femmes ne représentent que 11% du temps de parole et 21% des personnes présentes en plateau
Début février, l'Arcom a lancé son opération « Sport Féminin Toujours », visant à inviter les médias à diffuser davantage de retransmissions de sport pratiqué par des femmes sur les antennes, mais aussi à aborder les thématiques liées à la pratique féminine du sport. Une opération nécessaire selon les résultats de l'enquête, puisque les femmes restent largement minoritaires dans le milieu du sport. « C’est là où nous notons le plus fort décrochage », s’inquiète Laurence Pécaut-Rivolier. Dans les programmes sportifs, les femmes ne représentent que 11% du temps de parole et 21% des personnes présentes en plateau. Ce manque de parité se retrouve également dans les retransmissions sportives genrées. En 2021, les compétitions 100 % féminines ne représentaient que 4,8 % de celles diffusées à la télévision, contre 74,2 % pour leurs homologues masculines, et 21 % pour les épreuves mixtes.
Objectif JO
Pour Laurence Pécaut-Rivolier, il s'agit « d'un sujet très important pour les mois et les années à venir, c'est vraiment un axe prioritaire que l'Arcom se donne avec pour objectif les Jeux Olympiques 2024 ». Un discours appuyé par Isabelle Lonvis Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes qui entend garantir « grâce à la charte établie par l'association Femmes journalistes de sport, l'égalité femmes-hommes dans les rédactions sportives, et que d'ici 2025, 90% des médias aient adhéré à cette charte ».
Sexisme et stéréotypes en publicité
De manière ponctuelle, l'Arcom joint à son étude annuelle un volet complémentaire sur la représentation des femmes dans les publicités télévisées, la dernière datant de 2017. D'après l'étude, les femmes sont aujourd'hui majoritaires dans les apparitions publicitaires (51%). « On s'approche de la réalité sociale » note Laurence Pécault Rivolier. Dans le détail de ces apparitions, les expertes dans les publicités représentent 34%, une nette augmentation puisqu'elles étaient seulement de 18% en 2017. L'autre aspect positif d'après les résultats est que la publicité arrive enfin, après des années de réclames sexistes et de dénonciations des militantes féministes, à amorcer une remise en question stéréotypes de genre. En effet, les femmes sont maintenant majoritaires au volant dans les publicités de conduite et les hommes majoritairement représentés dans les publicités de ménages : « Des publicités en avance sur la réalité sociale », observe la conseillère de l'Arcom.
Néanmoins, un certain nombre de stéréotypes demeurent, notamment sur les termes employées en fonction du genre dans une publicité. Les résultats démontrent que les actrices utilisent en majorité des termes relatifs aux descriptions et à la douceur tandis que les acteurs interviennent dans un vocabulaire relevant de l'action, des aventures. De même que des domaines restent encore très masculins et féminins comme le bricolage et les produits de beauté, ce sont le plus souvent les femmes qui sont nues et sexualisées dans les publicités. Ainsi, si « on avance, on se questionne, je crois qu'il y a encore un certain nombre d'avancées à avoir », indique Laurence Pécault Rivolier.
Au-delà de l'objectif de parité des Jeux Olympiques, l'Arcom entend aussi mettre en place des plans d'actions sur d'autres sujets. D'après la conseillère, l'Arcom souhaite travailler sur le traitement médiatique des femmes victimes de violences conjugales, en faisant évoluer la classification dans la rubrique « faits divers » des journaux de l'audiovisuel. Le régulateur entend aussi mesurer la part des femmes qui sont derrière les caméras, un travail encore jamais réalisé.
À lire aussi I Les initiatives de Paris 2024 pour tendre vers l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport