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© Dima Solomin

Le groupe d’extrême droite FR DETER som­mé de fer­mer ses boucles de dis­cus­sions sur Telegram

Ce lundi, le ministre de l'Intérieur a demandé à Telegram de fermer toutes les boucles de discussions du groupe d'extrême droite FR DETER dans lesquelles des nationalistes et néonazi·es appelaient à des actions violentes contre des étranger·ères, des élu·es de gauche et des journalistes. Plusieurs plaintes sont actuellement en cours de préparation.

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a envoyé, ce lundi 3 avril, « un signalement, via la plateforme Pharos » à la messagerie cryptée Telegram, lui demandant de fermer les boucles de discussion utilisées par le groupe d’extrême droite « FR DETER ». Via ces canaux de discussions, des nationalistes et néonazi·es échangeait des propos racistes et des appels à la violence contre des musulman·es, avocat·es, journalistes, élu·es, rapporte Le Parisien. FR DETER a depuis fermé ses boucles, mais plusieurs plaintes sont en cours de préparation.

L'existence de ces groupes a été révélée ce dimanche 2 avril par le compte Twitter Tajmaât, qui se présente comme une « plateforme collaborative pour les Maghrébins ». Le compte a publié un thread révélant l’existence du groupuscule et son fonctionnement en ligne, à l’issue d’une infiltration de deux semaines. Tajmaât a diffusé plusieurs captures d’écran des boucles de discussion du « groupe nationaliste français Deter » (pour déterminés), comme le nomme Libération.

Mais selon l'entourage du ministre de l'Intérieur, ce groupe d’extrême droite n’est pas inconnu des autorité·es. Certain·es de ses membres sont d’ailleurs sous surveillance depuis « fin 2022 », a ajouté une source policière, selon Libération. D’autres étaient même connu·es des services de renseignement. En plus de la démarche de fermeture engagée, le ministre de l'Intérieur a « également demandé aux services de travailler aux suites judiciaires à donner, en lien avec l’autorité judiciaire ».

Dans sa présentation, le canal Telegram qui comportait 7 300 abonné·es avant suppression, indiquait avoir créé « plusieurs groupes de discussions menant aux 95 départements, pour pouvoir s’aider entre [nationalistes] dans toute la France ». Au fil de la présentation, le quotidien rapporte qu'on pouvait lire « FR DETER va être connu dans toute la France. On rassemblera tous les gars déterminés et on va créer quelque chose d’énorme. » En guise de logo, le groupe a choisi un symbole faisant référence à la croix celtique, reprise par les mouvements d’extrême droite en Europe.

Parmi les utilisateur·rices, « certains se prévalent de la qualité de militaires ou de fonctionnaires de police, mais cela reste à démontrer, car beaucoup de ces comptes n’ont pas encore été identifiés », a précisé une source policière au Parisien. Les boucles ont « d’abord été constituées pour servir de plateformes d’échange d’idées identitaires, pour permettre aux sympathisants de ces idéologies de se retrouver par région », rapporte la source policière au quotidien, expliquant ensuite que « des profils plus violents et extrémistes sont apparus sur ces boucles, suscitant d’ailleurs parfois la désapprobation d’anciens membres ».

Des attaques à Lille 

Au-delà des nombreuses insultes proférées contre les minorités de genre et religieuses, le compte Tajmaât a mis en évidence des appels à commettre des actions violentes, notamment à Lille. Dans le groupe de discussion du Nord, qui compte 200 membres selon Libération, les utilisateur·rices échangent des propos racistes et évoquent des actions violentes à l'encontre de la communauté musulmane pendant la période du ramadan. Certaines de leurs déclarations visent directement la communauté musulmane du quartier de Wazemmes à Lille. On peut notamment lire : « Qui est disponible le 13 avril, à Lille, à 19h ? ». Et la date n'est pas choisie au hasard : ce soir-là, la communauté musulmane a prévu de se rassembler à l'église St-Pierre-St-Paul de Wazemmes pour partager un repas, précise France bleu.

Libération s'est procuré l'ensemble du fil de discussion du groupe Nord grâce à une source de Tajmaât qui s'était infiltrée. Les échanges remontent jusqu'en juin 2022. On peut y lire : « Salut mec, mon lycée est à Berck sur mer, on pourrait peut-être se croiser et aller casser quelques untermensch, d’autant plus qu’il y en a beaucoup là-bas. » Des propos tenus par un membre qui s'est présenté comme mineur. « Untermensch », est un mot allemand, utilisé par les nazi·es, qui signifie des « sous-hommes ». Et nombreux sont les appels à la violence sur ce groupe. « Rejoins-moi à la mosquée de saint denis […] pour la brûler bien évidemment », a écrit un membre du canal en novembre 2022, selon le quotidien.

De vives réactions sur Twitter

En réaction à ces menaces, la préfecture du Nord a annoncé « mobiliser ses services ». La maire de Lille, Martine Aubry, a, elle aussi, réagi ce lundi soir sur son Twitter. Elle explique avoir communiqué immédiatement les éléments au préfet, « comme elle le fait systématiquement pour ce type de messages explicites et haineux, afin qu’il puisse prendre toutes mesures nécessaires ».

Le député de La France Insoumise du Nord, David Guiraud, a relayé l'information sur Twitter. Pour lui, il faut absolument être vigilant : « C'est quand même préoccupant, il y a des groupuscules d'extrême droite néonazis qui sévissent dans le pays. Les services de renseignement le savent. D'ailleurs, des patrons du renseignement ont dit que cela faisait partie des préoccupations majeures pour l'État français. Il faut être vigilant et protéger les musulmans comme n'importe lesquels de nos concitoyens. »

Liste de personnalités islamo-gauchistes

Au sein de ces groupes, des personnes précises sont également visées. C’est le cas du journaliste Taha Bouhafs ou encore de deux journalistes de Libération qui traitent régulièrement de l’extrême droite. Comme l'a relevé Tajmaât, une liste de personnalités à cibler a été diffusée le 29 mars sur le canal. Ce fichier PDF, intitulé « Liste de nos amis ! », est suivi du commentaire suivant : « Si ça peut donner des idées à certains de nos amis nationalistes qui tombent dessus. » Puis celui-ci : « C’est 100 % légal ne vous inquiétez pas et puis disons que tout est légal pour faire mal à l’ennemi », détaille Libération.

Ce document est en fait une actualisation d’une liste de personnalités décrites comme « islamo-gauchistes », initialement diffusée par le site d’extrême droite Fdesouche en 2021. Sur le canal Telegram, la liste en question comprend une centaine de noms, dont ceux de nombreux·ses élu·es (les député·es Alexis Corbière et Danièle Obono, la sénatrice Esther Benbassa, l’adjoint à la mairie de Paris Ian Brossat, l’eurodéputée Manon Aubry), de journalistes (comme Rokhaya Diallo, Edwy Plenel et Alain Gresh), d’avocats comme (Nabil Boudi, Arié Alimi et Raphaël Kempf), ainsi que de personnalités classées dans la catégorie « Islam », toujours selon le quotidien.

Des plaintes en cours

Une plainte collective est en train d'être rédigée, à laquelle le fondateur du journal en ligne Orient XXI, Alain Gresh prend notamment part. Ce dernier a toutefois souligné auprès de Libération, que « les plus menacés dans cette liste, ce sont les musulmans, pas nous [les journalistes]. »

En parallèle, au moins une autre plainte est en préparation. « Nous discutons actuellement » avec  «d’autres personnes sur la liste », a confié l’avocat Nabil Boudi à Libération. Elias d’Imzalène, fondateur du site Islam et info, lui aussi visé dans la liste, souhaite également se joindre à l’une ou l’autre plainte. Du côté du camp politique, Alexis Corbière, a assuré qu’une « action collective » sera menée, mais attend que le bureau de La France insoumise se réunissant ce lundi soir fixe la marche à suivre, indique le quotidien.

Aujourd'hui, le canal d’origine « FR DETER » et ses groupes régionaux ont bien été supprimés. Mais selon Libération, les boucles de discussions auraient été supprimées non pas à la demande du ministre de l'Intérieur, mais le 2 avril au moment de la publication du thread de Tajmaât. Reste à savoir maintenant si cette suppression aura une quelconque utilité. D'après le quotidien, des messages insultants et porteurs de menaces contre des politiques et des journalistes ont été également diffusés, à la minute près, dans un autre canal Telegram d’extrême droite, qui est, lui, toujours actif.

À lire aussi I Allemagne : une vague néonazie de menaces de mort à l’encontre des femmes

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