Alors que la mortalité infantile augmente en France, des médecins alertent sur le délabrement des services de soins intensifs et de réanimation qui accueillent les nouveau-nés les plus fragiles.
Places insuffisantes, lits occupés à plus de 90 %, mortalité infantile en hausse… “Il est urgent de revoir l’organisation” des soins intensifs et de réanimation qui accueillent les nouveau-nés vulnérables, alerte la Société française de néonatologie (SFN) dans un rapport paru le 9 octobre.
À rebours de nombreux pays occidentaux, “la mortalité infantile [soit les enfants décédés dans leur première année de vie, ndlr] augmente en France depuis 2012”, déplore l’organisation. La France, “qui se trouvait en troisième position des pays à la mortalité infantile la plus faible d’Europe entre 1996 et 2000, se trouve désormais en vingtième position”, souligne la SFN dans ce document, qui compile les résultats de plusieurs enquêtes, notamment de l’Insee et l’Inserm.
Selon la SFN, cette hausse de la mortalité infantile est “en grande partie due à un excès de mortalité néonatale” : parmi ces décès de bébés, 74 % sont intervenus dans le “premier mois de vie”, contre 65 % en 2005, rapporte la société savante. Selon son président, Jean-Christophe Rozé, ces excès de mortalité sont généralement liés à une “extrême prématurité”, ou des cas de bébés nés à terme mais “très malades”. Pour expliquer la hausse de la surmortalité infantile, la SFN avance plusieurs hypothèses : “la hausse de l’âge des mères”, “l’accroissement des grossesses multiples”, “les situations de précarité” mais aussi “une dégradation du circuit de soins”.
Près d’un quart des services contraints de refuser des bébés
L’offre de “soins critiques” (soins intensifs et réanimation) est “insuffisante et inégalement répartie sur le territoire”, déplore-t-elle. En réanimation néonatale, le nombre de lits “varie du simple au double” dans les régions métropolitaines (entre 0,60 pour 1 000 naissances en Provence-Alpes-Côte d’Azur et 1,28 dans le Grand Est). Mais les besoins augmentent, notamment car l’extrême prématurité peut être prise en charge bien plus tôt qu’auparavant.
“En conséquence, les taux d’occupation sont très élevés”, constate la SFN. Dans l’ensemble des services dits “de type 3" (prenant en charge les grossesses à haut risque), ces taux d’occupation atteignent, en moyenne, entre 91,3 % et 93,8 %. “En réanimation, il est supérieur à 100 %” environ 20 % du temps, et le taux moyen dépasse 95 % dans près de la moitié des unités”, poursuit la SFN.
Résultat, quelques “23 % des services déclarent refuser régulièrement des entrées critiques faute de place”. Par manque de médecins, ces services peinent à assurer les gardes. Ils sont aussi en “sous-effectif infirmier” chronique. Dans près de 80 % d’entre eux, “au moins un tiers de l’effectif infirmier a moins de deux ans d’expérience”, durée considérée comme “nécessaire” pour ce type de soins.
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