Dans un rapport remis à l'Académie de médecine ce mardi, le chef de la maternité de l'hôpital Necker à Paris recommande de ne plus donner naissance dans une centaine de petites maternités pour « éviter de mettre en danger les femmes et les enfants ».
C’est un rapport choc que le professeur Yves Ville, chef de la maternité de Necker à Paris, a présenté ce mardi 28 février à l'Académie de médecine. D'après ce rapport qu'il a réalisé avec 14 autres spécialistes, il faudrait regrouper une centaine de maternités en France « au nom de la sécurité de la mère et de l’enfant ». Et « si on ne le fait pas, on court à la catastrophe » indique le professeur dans son rapport dévoilé en exclusivité par Le Parisien.
Leur « maintien est illusoire ! À terme, elles [les petites maternités] finiront par fermer », tonne Yves Ville dans son rapport. La centaine de maternités françaises sur la sellette sont celles qui mettent au monde moins de 1 000 bébés chaque année et qui s'occupent des grossesses sans risque. Parmi elles, celles de Sedan, Guingamp, Autun ou encore Porto-Vecchio sont notamment sur un siège éjectable. D’après le professeur, certains de ces établissements ferment déjà quelques jours par semaine faute de personnel et de sage-femme. « Pour continuer à tourner, ils font appel à des intérimaires. Cette organisation sous forme de rustines ne permet pas d’assurer la sécurité et la qualité des soins », explique-t-il. Un problème qui ne date pas d'hier puisqu'en vingt ans, plus de 30 % des maternités françaises ont totalement fermé, par manque de blouses blanches.
Des maternités surmenées
Selon le rapport, les femmes préféreraient accoucher dans des établissements de type 2 (maternités qui disposent d'une unité de néonatologie) et de type 3 (maternités qui disposent d'un service de réanimation néonatale et sont spécialisées dans le suivi des grossesses pathologiques) qui sont plus sécurisés. Mais à l'inverse des petites maternités, le problème de ces établissements surnommés « usines à bébé » est qu’ils sont « saturés » et offrent « des conditions de travail dégradées ». Certaines sage-femmes peuvent faire accoucher jusqu’à cinq femmes en 12 heures lors de nuits de gardes, indique le rapport. C'est pourquoi le professeur Yves Ville préconise de regrouper les petites et grandes maternités pour leur donner plus de moyens et permettre ainsi un suivi plus personnalisé.
Il faudrait donc sacrifier 111 petites maternités, sur les 452 que compte la France. « Le suivi avant et après grossesse y serait toujours assuré, mais les femmes n’y accoucheraient plus », explique le professeur dans son rapport. Insistant sur le fait qu'il ne s’agirait pas de « condamner » ces maternités. Après l’accouchement, les jeunes mères seraient transférées par ambulance vers les petites maternités proches de leur domicile.
Un rapport qui divise
D’après le professeur, rassembler les naissances autour des grandes maternités n’aurait qu’un impact limité sur l’accessibilité. « 89 % des naissances auraient lieu au maximum à trente minutes de la maternité la plus proche, 3 % à plus de 45 minutes, soit une hausse de 1,8 %, et 0,9 % à plus d’une heure », explique le rapport.
Mais difficile pour les autres spécialistes de trouver un consensus. « Nous sommes complètement contre ! C’est une angoisse terrible pour les femmes d’accoucher loin de chez elles ! », s’alarme Michèle Leflon, présidente de la coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité, selon Le Parisien. Pour limiter les risques, les auteur·rices du rapport préconisent de loger les futures mères dans des hôtels près d’une grande maternité, quelques jours avant l’accouchement.
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