Au lendemain de la clôture des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie qui s'est montrée en majorité favorable au suicide assisté et à l'euthanasie, le président de la République a annoncé sa volonté d'élaborer un projet de loi « d’ici la fin de l’été ».
Emmanuel Macron souhaite un projet de loi sur la fin de vie « d’ici la fin de l’été ». Le président s’est exprimé ce lundi matin, après avoir reçu les 184 membres de la Convention citoyenne sur la fin de vie, rapporte franceinfo, dont les travaux terminés ce dimanche doivent orienter l’action de l’exécutif sur le sujet. Dimanche 2 avril, la Convention a conclu ses travaux en annonçant être favorable au suicide assisté et à l'euthanasie pour les personnes majeures, tout en demandant à ce que soit renforcée l'offre de soins palliatifs.
« En lien avec les parlementaires », avec « toutes les parties prenantes et sur la base des conclusions », rendues par la Convention citoyenne, le chef de l'État a désormais la volonté de bâtir ce qu’il a appelé un « modèle français de la fin de vie » via un projet de loi dédié. Il n'a pas fait part de son positionnement personnel sur le sujet.
Lancée en septembre 2022 par Emmanuel Macron, la Convention citoyenne devait amorcer une réflexion sur l’aide active à mourir, afin d’aboutir à un état des lieux sur une question vertigineuse, source de vifs débats en France. Fruit de vingt-sept jours de travail étalés sur quatre mois et d’une soixantaine d’auditions d’expert·es, de représentant·es des cultes, de philosophes mais aussi de soignant·es, le rapport final des 184 citoyen·nes tiré·es au sort en décembre dernier, a été adopté dimanche au terme d’un vote solennel à 92 % (162 voix pour, sur 176 votant·es) dans l’hémicycle du palais d’Iéna, à l’issue de la dernière session de travail au siège du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Un nuancier d’opinions
Les membres de la Convention citoyenne expliquent en préambule avoir abordé « la question de l’aide active à mourir dans ses dimensions éthiques, médicales, philosophiques et spirituelles », précisant que leur travail « révèle un nuancier d’opinions construites à partir de [leur] vécu et de [leurs] convictions ».
Sur l’aide active à mourir, 76 %, des membres de la convention sont favorables à l’accès au suicide assisté et à l’euthanasie, « selon certaines conditions et au terme d’un parcours balisé ». Pour 28 % d’entre eux·elles, « le suicide assisté doit prévaloir et l’euthanasie demeurer une exception », afin d’éviter une trop grande implication des soignant·es. Parmi ces exceptions : un malade qui ne pourrait accomplir seul le geste de mettre fin à ses jours par exemple. Les opposé·es à l’ouverture de l’aide active à mourir plaident de leur côté pour une meilleure mise en œuvre de la loi Claeys-Leonetti et s’inquiètent « des risques de dérives que l’ouverture de l’aide active à mourir pourrait faire peser sur les personnes vulnérables ».
En ce qui concerne les conditions d’accès à cette aide active à mourir, la Convention indique les critères suivants dans son rapport : le discernement de la personne, l’incurabilité, le pronostic vital engagé, le degré élevé des souffrances et l’âge. Sur ce dernier point – l'accès à l'aide active à mourir pour les mineur·es – , les avis demeurent « très partagés », explique le rapport. Sur cette question, Emmanuel Macron a été clair ce lundi matin : « L’absence de conclusions sur l’aide active à mourir pour les mineurs suggère de ne pas ouvrir cette faculté », a‑t-il tranché.
Dans le rapport final de 150 pages produit par ces citoyen·nes, il est précisé : « Nous appelons à des changements profonds parmi lesquels une garantie d’accès aux soins palliatifs, le renforcement de la formation des professionnels de santé et une meilleure information de toutes et tous. » Pour 97 % d'entre eux·elles, le cadre d’accompagnement de la fin de vie doit être amélioré en respectant le choix et la volonté du·de la patient·e, même si celui-ci va à l’encontre de l’avis du·de la médecin.
Accompagner la fin de vie à domicile
La Convention estime en effet que la loi Claeys-Leonetti, en vigueur depuis février 2016 et permettant d’aller jusqu’à une « sédation profonde [fait d'endormir une personne malade, ndlr] et continue » de certain·es malades jusqu’à leur mort, mais ne permettant pas de provoquer activement leur décès ou de leur donner les moyens de le provoquer, a montré ses limites. La Convention a en effet constaté dans son rapport que vingt-et-un départements de plus de 100 000 habitant·es ne disposent pas d’unité de soins palliatifs.
Parmi les 146 recommandations adoptées, on trouve donc le développement de l’accompagnement à domicile de la fin de vie, notamment par une sédation profonde et continue, la formation des soignant·es avec la création d'un tronc commun universitaire sur la fin de la vie dans le cadre de la formation initiale ou encore l’obligation pour les EHPAD d’avoir du personnel formé aux soins palliatifs. Globalement, l’objectif prioritaire est « le développement de l’accès aux soins palliatifs qui permettent de soulager les douleurs des malades incurables ».
Plan décennal pour les soins palliatifs
« Notre système d’accompagnement de la fin de vie reste mal adapté aux exigences contemporaines », a reconnu Emmanuel Macron ce lundi matin. Le chef de l'État a annoncé qu’il lancerait « un plan décennal national pour la prise en charge de la douleur et pour les soins palliatifs, avec les investissements qui s’imposent » afin d’assurer un « accès effectif et universel aux soins d’accompagnement à la fin de vie ». Selon Le Monde, le plan pourrait aller jusqu’à fixer un seuil de lits réservés aux soins palliatifs dans chaque territoire.
Les travaux de la Convention désormais achevés, viendra désormais le temps de l’intégration ou non de ces recommandations dans un projet de loi. Emmanuel Macron a indiqué que le gouvernement s'attellera prochainement à la tâche en lien avec des parlementaires désigné·es par le président du Sénat, Gérard Larcher, et la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.