Le 3 novembre, le monde entier aura les yeux rivés sur l’élection présidentielle américaine qui départagera deux vieux mâles blancs. Mais, depuis les élections de mi-mandat de 2018, c’est essentiellement avec des jeunes femmes racisées, que la révolution se prépare. Cinq élues progressistes secouent notamment le paysage politique. Leurs objectifs : dégager Trump et changer le Parti démocrate.
Alexandria Ocasio-Cortez, l'idole des jeunes
![« The Squad » : ces élues qui bouleversent le paysage politique américain 2 u.s. rep. Ocasio Cortez talks to reporters on Capitol Hill in Washington](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/10/u.s.-rep.-Ocasio-Cortez-talks-to-reporters-on-Capitol-Hill-in-Washington-1024x684.jpg)
Les éditorialistes de Fox Newsen sont convaincus : Alexandria Ocasio-Cortez (AOC), en bonne « socialiste », n’a qu’un but : « Elle veut voler vos hamburgers. » L’anecdote est drôle, mais elle illustre à merveille l’effet qu’AOC, 30 ans, élue du Bronx et du Queens (New York) à la Chambre des représentants depuis 2018 et en lice pour un second mandat, produit sur les gens de droite. Elle les obsède. Avec son éloquence, son esprit tranchant et son ardeur au travail, l’ancienne serveuse latina, dont la mère vient de Porto Rico, est vite devenue la nouvelle star de The Squad et du Parti démocrate. Chacune de ses interventions politiques, chacun de ses Tweet font immédiatement le tour du monde. Dernière vidéo en date : sa routine beauté pour Vogue. Très à l’aise dans l’exercice, elle en profite néanmoins pour faire passer un message politique. Pendant dix minutes, tout en appliquant consciencieusement sa crème de jour sur le visage et son rouge sur les lèvres, elle déroule sur le chômage qui explose aux États-Unis. « J’envisage mon métier comme une activiste, et mon métier, c’est de faire des lois, a‑t-elle confié dans une interview à Vanity Fair début septembre. Je suis capable de mélanger ces deux aspects et de prendre des risques, de faire des choses de manière non conventionnelle pour créer le débat. »
Ayanna Pressley, la grande soeur
![« The Squad » : ces élues qui bouleversent le paysage politique américain 3 115 politique americaine Ayanna Presley © Chip Somodevilla Getty Images AFP](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/10/115-politique-americaine-Ayanna-Presley-©-Chip-Somodevilla-Getty-Images-AFP-1024x682.jpg)
Dans cette équipe hors du commun, Ayanna Pressley, 46 ans, c’est la grande sœur. Déjà parce qu’elle a de l’expérience en politique. Avant d’être élue dans le Massachusetts, elle a gravi les échelons du Parti démocrate en travaillant notamment comme assistante parlementaire de John Kerry. Elle a aussi été conseillère municipale à Boston il y a plus de dix ans. C’est une grande sœur, car, dans sa vie de militante pour les droits des femmes, elle a aidé un paquet de jeunes filles en difficulté. Des jeunes filles mises à la porte du foyer familial après avoir fait leur coming out, des jeunes filles cherchant à se faire avorter. Victime d’abus sexuels dans son enfance et de viol dans sa jeunesse, elle a refusé de s’exprimer davantage sur cet épisode, estimant que « les survivant·es devaient avoir le droit de choisir quand, comment et à qui ils ou elles se confiaient ». Début 2019, elle a mis en ligne une vidéo très émouvante dans laquelle elle révèle souffrir d’alopécie, une maladie provoquant la chute des cheveux. Connue pour ses tresses et ses coiffures, elle ôte sa perruque pour dévoiler son crâne rasé. Un moment à la fois intime et politique.
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Rashida Tlaib, la forte en gueule
![« The Squad » : ces élues qui bouleversent le paysage politique américain 4 democratic u.s. rep. rashida tlaib speaks at a climate rally with presidential candidate senator bernie sanders and rep. Ro Khanna in Iowa City](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/10/democratic-u.s.-rep.-rashida-tlaib-speaks-at-a-climate-rally-with-presidential-candidate-senator-bernie-sanders-and-rep.-Ro-Khanna-in-Iowa-City-1024x683.jpg)
Quand elle est arrivée à son poste de représentante du Michigan, Rashida Tlaib s’est fait remarquer. Pas parce qu’elle n’était que la deuxième femme musulmane à intégrer les rangs du Congrès, ni parce qu’elle était, tout comme Alexandria Ocasio-Cortez, membre du groupe des socialistes démocrates d’Amérique, mais parce qu’elle a dit, au sujet de Donald Trump : « We’re gonna impeach the motherfucker. » En français : « On va destituer cet enfoiré ». La promesse est très mal passée, évidemment. Même si, comme l’a précisé la patronne de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, ce n’était pas pire que ce que Trump dit lui-même. D’ailleurs, Donald ne s’est pas privé, ensuite, de lui suggérer de « retourner d’où elle venait ». D’origine palestinienne, Rashida Tlaib, 44 ans, assure vouloir en finir avec « le racisme structurel », « la politique du chiffre en matière d’incarcérations » et « les injustices du système scolaire ». Une autre polémique récente sur des sommes indûment perçues, mais pour laquelle la commission d’éthique de la Chambre des représentants a estimé qu’elle n’avait pas mal agi, aurait pu la fragiliser. Mais elle est à nouveau en lice pour un second mandat. Lors de sa victoire à la primaire démocrate, elle s’est dite convaincue que les électeurs et les électrices voulaient « une combattante sans complexes qui mettra fin au statu quo ». Elle semble taillée pour le job.
Cori Bush, la warrior
![« The Squad » : ces élues qui bouleversent le paysage politique américain 5 115 politique americaine Cori Bush ©Michael B Thomas Getty Images AFP](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/10/115-politique-americaine-Cori-Bush-©Michael-B-Thomas-Getty-Images-AFP-1024x682.jpg)
Même au travers d’un écran, son énergie est communicative. Son enthousiasme aussi. Cori Bush, 44 ans, ancienne infirmière, pasteure, devenue militante par hasard, dégage un mélange de sympathie et de cool à l’américaine. Elle a été appelée pour soigner des blessé·es lors des émeutes de Ferguson (Missouri) en août 2014 après la mort de Michael Brown, un jeune homme noir tué par un policier, et depuis, elle n’a plus jamais quitté le camp des activistes. Elle est même devenue l’une des figures de proue, souvent agrippée à son mégaphone. Sa campagne politique, elle l’a menée en faisant du porte-à-porte et en racontant ses galères. Après qu’elle a perdu son emploi, elle et son mari ont vécu dans leur voiture avec leurs deux enfants en bas âge pendant plusieurs mois. Aujourd’hui divorcée, elle élève seule ses enfants. Quand elle arrivera à Washington pour commencer son mandat d’élue du Missouri, elle assure que sa priorité sera de se battre pour l’égalité raciale et économique et pour une meilleure couverture sociale pour tous. Comme d’autres élu·es progressistes, elle soutient l’idée du « Defund the police », qui souhaite transférer les fonds publics alloués à la police vers des structures citoyennes ou des communautés locales.
Ilhan Omar, la provocatrice
![« The Squad » : ces élues qui bouleversent le paysage politique américain 6 u.s. rep. omar departs following a campaign event with democratic 2020 u.s. presidential candidate Sanders in Manchester](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/10/u.s.-rep.-omar-departs-following-a-campaign-event-with-democratic-2020-u.s.-presidential-candidate-Sanders-in-Manchester-1024x683.jpg)
Sur son compte Twitter, elle se définit en trois mots : « Maman. Réfugiée. Féministe intersectionnelle. » Elle cite aussi de la poésie comme Pourtant je m’élève, de Maya Angelou : « Vous pouvez m’abattre de vos paroles, /Me découper avec vos yeux, /Me tuer de toute votre haine, /Mais comme l’air, je m’élève encore. » Le déversement de haine, Ilhan Omar connaît. Depuis sa prise de fonctions, elle se fait insulter très régulièrement par Trump et ses partisans. Même dans son propre camp, elle suscite la controverse pour ses prises de position propalestiniennes ou hostiles à la politique d’Israël. Elle a notamment été critiquée après avoir estimé que le soutien des États-Unis à l’État hébreu reposait sur l’argent. Propos que d’aucun·es ont jugés antisémites. Elle a présenté ses excuses « sans équivoque », assurant que son intention n’était pas « d’offenser les Juifs américains ». Ilhan Omar est née en Somalie en 1982 et a rejoint les États-Unis pendant son enfance avant d’être naturalisée. Une des deux seules musulmanes, avec Rashida Tlaib, à siéger au Congrès, elle représente le Minnesota. Unique femme voilée à siéger, elle répète sans arrêt qu’elle en a marre qu’on lui demande de s’exprimer sur l’excision ou sur l’islamisme. Elle veut qu’on lui pose les mêmes questions qu’aux autres élu·es. Sa fille, Isra Hirsi, semble suivre le chemin militant de sa mère. À 17 ans, elle est la cofondatrice de la US Youth Climate Strike, mouvement de la jeunesse pour défendre le climat.