Camerawalker Athens Pride 2018 12
Gay Pride à Athènes. © Camerawalker / Wikimedia Commons

La Grèce dit “oui” au mariage homo­sexuel et à l’adoption pour les couples de même sexe

Malgré l’opposition de l’Église ortho­doxe et de l’extrême droite, le par­ti au pou­voir conser­va­teur a convain­cu le par­le­ment grec de voter ce texte met­tant fin à une “grave inéga­li­té pour [la] démo­cra­tie” grecque, selon les mots du Premier ministre.

Une joie arc-​en-​ciel dans les rues d’Athènes. La Grèce a dit “oui”, jeu­di, au mariage homo­sexuel et à l’adoption d’enfants par des couples de même sexe, une réforme socié­tale majeure por­tée par le Premier ministre conser­va­teur qui y a vu “un tour­nant pour les droits de l’homme”. Sur les 254 député·es présent·es au par­le­ment mono­ca­mé­ral, 176 ont voté pour, 76 contre et 2 se sont abstenu·es, à l’issue de deux jours d’un débat par­fois houleux. 

Une fois la loi pro­mul­guée, ce pays médi­ter­ra­néen, dans lequel l’influente Église ortho­doxe était farou­che­ment oppo­sée à la réforme, va deve­nir le 37e pays dans le monde, le 17e pays de l’Union euro­péenne et le pre­mier pays chré­tien ortho­doxe à léga­li­ser l’adoption pour des parents de même sexe.

Au moment de l’annonce du résul­tat, des dizaines de per­sonnes bran­dis­sant des dra­peaux arc-​en-​ciel ont lais­sé écla­ter leur joie devant le Parlement, dans le centre d’Athènes. Pour les asso­cia­tions LGBT+, la Grèce a vécu avec ce vote “une jour­née his­to­rique”, selon Adriana Zahari, une étu­diante de 22 ans pré­sente devant le Parlement. “Nous sommes si heu­reux de ce résul­tat, nous l’attendions depuis si long­temps”, s’est féli­ci­tée la jeune femme.

Lire aus­si l En Grèce, “un jour his­to­rique” approche pour les couples homo­sexuels et leurs enfants

Le Premier ministre de droite Kyriakos Mitsotakis a salué “un tour­nant pour les droits de l’homme” dans un “pays pro­gres­siste et démo­cra­tique, pas­sion­né­ment atta­ché aux valeurs euro­péennes” au moment où le Parlement euro­péen, dans une récente réso­lu­tion, s’est alar­mé “des menaces très graves qui pèsent sur la démo­cra­tie, l’État de droit et les droits fon­da­men­taux en Grèce”, notam­ment autour du recul de la liber­té de la presse.

À par­tir de demain, une bar­rière de plus entre nous [citoyens, ndlr] sera sup­pri­mée et devien­dra un pont de coexis­tence dans un État libre entre citoyens libres”, avait-​il éga­le­ment assu­ré lors d’une inter­ven­tion devant les député·es plus tôt dans la journée.

L’adoption du pro­jet de loi ne fai­sait guère de doutes en rai­son du sou­tien de plu­sieurs par­tis d’opposition de gauche. Mais Kyriakos Mitsotakis était confron­té à la rébel­lion de l’aile la plus conser­va­trice de son par­ti, Nouvelle-​démocratie (ND), oppo­sée à cette réforme.

Mesure phare

Confortablement réélu l’an der­nier, il a fait du mariage entre per­sonnes du même sexe une mesure phare de son deuxième man­dat. Elle “amé­liore consi­dé­ra­ble­ment la vie de nos conci­toyens” homosexuel·les et de leurs enfants, a‑t-​il jugé, rap­pe­lant qu’il s’agissait là d’“une réa­li­té sociale exis­tante” et qu’en votant pour le mariage homo­sexuel, les député·es allaient lever “une grave inéga­li­té pour notre démo­cra­tie”. Depuis 2015, la Grèce dis­pose d’une union civile, mais elle n’offre pas les mêmes garan­ties juri­diques que le mariage civil. 

Le Premier ministre a éga­le­ment insis­té sur la néces­si­té de mettre un terme à des situa­tions ubuesques en ce qui concerne l’homoparentalité. Car jusqu’à pré­sent, seul le parent bio­lo­gique dis­pose de droits sur l’enfant. En cas de décès de celui-​là, l’État retire la garde à l’autre parent. Et les enfants de deux pères ne peuvent pas obte­nir de papiers d’identité, le nom d’une mère étant obli­ga­toire à l’état civil.

"Moment his­to­rique"

Pour Konstantinos Androulakis, un Grec de 46 ans marié au Royaume-​Uni avec Michael et père de deux enfants de 6 et 11 ans, la Grèce vit "un moment his­to­rique". "C'est un trem­plin impor­tant", affirme à l'AFP ce consul­tant lon­do­nien venu en Grèce pour l'occasion, affi­chant l'espoir qu'à l'avenir, "les droits des per­sonnes LGTB+ s'améliorent en Grèce de manière géné­rale". Certains ont tou­te­fois déplo­ré que le pro­jet de loi n'accorde pas la ges­ta­tion pour autrui (GPA) aux couples homosexuels.

L'essentiel de l'âpre débat qui a agi­té le pays ces der­nières semaines a concer­né la ques­tion de l'homoparentalité. Les études d'opinion ont mon­tré que les Grec·ques étaient plu­tôt favo­rables au mariage homo­sexuel mais opposé·es à l'adoption par les couples de même sexe.

Dans un pays à une écra­sante majo­ri­té ortho­doxe, l’Église s’est tota­le­ment oppo­sée au pro­jet. “Les enfants ont un besoin inné et donc le droit de gran­dir avec un père de sexe mas­cu­lin et une mère de sexe fémi­nin”, assure le Saint-​Synode, qui a adres­sé une mis­sive à tous et toutes les député·es. Mais seul·es quatre mille opposant·es envi­ron, emmené·es notam­ment par Niki, le par­ti d’extrême droite proche de la Russie, se sont retrouvé·es dimanche devant le Parlement, bran­dis­sant des icônes de la Vierge et des croix chrétiennes.

Tout un sym­bole : en sep­tembre, Stefanos Kasselakis, qui affiche publi­que­ment son homo­sexua­li­té et s’est récem­ment marié aux États-​Unis à son par­te­naire, a pris les rênes du par­ti de gauche Syriza, pre­mière force d’opposition au parlement.

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