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© Pete Alexopoulos

Au Texas, des Américaines portent plainte pour refus d'une IVG médi­ca­le­ment nécessaire

Mardi, cinq femmes ont por­té plainte contre l'Etat du Texas, sou­hai­tant cla­ri­fier les excep­tions sur la loi texane anti-​avortement, après s’être vu refu­ser un avor­te­ment mal­gré des com­pli­ca­tions. C’est la pre­mière fois que des per­sonnes affec­tées par la nou­velle loi les contestent devant les tribunaux. 

Cinq habi­tantes du Texas qui se sont vu refu­ser leur avor­te­ment, mal­gré de graves com­pli­ca­tions, ont déci­dé de pour­suivre l’Etat en jus­tice en dépo­sant une plainte ce mar­di 7 mars. Elles sou­haitent obte­nir des cla­ri­fi­ca­tions sur les excep­tions que pré­voit la loi anti-​avortement en vigueur dans l'Etat du Texas depuis 2021, selon The Texas Tribune.

La plainte a été dépo­sée par le Center for Reproductive Rights, un groupe d'avocats new-​yorkais qui a mené de nom­breux com­bats juri­diques récents pour pro­té­ger l'accès à l'avortement (il avait notam­ment défen­du la Jackson Women's Health Organization dans l'affaire qui a ren­ver­sé l'arrêt Roe v. Wade l'été der­nier). Il s’agit de la pre­mière plainte dépo­sée par des Américaines ayant essuyé des refus d’Interruptions volon­taires de gros­sesses (IVG) depuis que la Cour suprême des Etats-​Unis a dyna­mi­té, en juin 2022, le droit à l’avortement.

Les plai­gnantes ont annon­cé l’action en jus­tice, lors d’une confé­rence de presse mar­di 7 mars, au cours de laquelle elles ont racon­té les com­pli­ca­tions de gros­sesses aux­quelles elles avaient dû faire face et com­ment elles se sont vu refu­ser l’avortement en met­tant leur vie en dan­ger. « L'État du Texas affirme vou­loir pré­ser­ver la vie en inter­di­sant l'avortement légal et sûr », a décla­ré Anna Zargarian, une des plai­gnantes, qui a dû se rendre au Colorado pour se faire avor­ter, après avoir per­du les eaux à 19 semaines de gros­sesse. « Je n'ai jamais eu l'impression que ma vie comp­tait moins que dans cette situa­tion », d'après le Texas Tribune.

La loi texane, qui pré­voit jusqu’à 99 ans de pri­son pour les méde­cins pra­ti­quant des avor­te­ments, admet des excep­tions, mais uni­que­ment « en cas de dan­ger de mort ou de grave han­di­cap pour la mère », selon Le Monde.

À lire aus­si I Droit à l’IVG aux États-​Unis : les ultimes recours

L'histoire bou­le­ver­sante de Lauren Hall…

L'action en jus­tice demande au juge de sta­tuer que l'avortement est auto­ri­sé dans les cas où une per­sonne enceinte souffre d'une condi­tion phy­sique ou d'une com­pli­ca­tion de la gros­sesse qui rend la pour­suite de la gros­sesse dan­ge­reuse, souffre d'une condi­tion qui est exa­cer­bée par la gros­sesse ou ne peut être trai­tée pen­dant la gros­sesse, ou reçoit un diag­nos­tic d'une condi­tion fœtale incom­pa­tible avec la vie, explique le quo­ti­dien amé­ri­cain. Avec cette plainte, les cinq femmes sou­haitent éga­le­ment faire valoir que ces lois évo­quées ci-​dessus sont vagues et contra­dic­toires, ce qui laisse les méde­cins dans l'incertitude quant à la manière de pro­cé­der en toute sécurité.

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Conférence de presse
© Rick Kern/​Getty Images for the Center for Reproductive Rights

Lauren Hall, une autre des plai­gnantes, a expli­qué, lors de la confé­rence de presse, qu'elle était ravie lorsqu'elle a appris qu'elle était enceinte. Mais au moment de son exa­men ana­to­mique à 18 semaines, elle a appris que son fœtus se déve­lop­pait sans crâne, une ano­ma­lie fœtale mor­telle connue sous le nom d'anencéphalie. Dans le Texas Tribune, elle avait racon­té en sep­tembre que son méde­cin lui avait dit qu'il ne pou­vait pas l'aider et qu'elle devrait res­ter enceinte jusqu'à ce qu'elle fasse une fausse couche ou qu'elle accouche d'un bébé qui ne pour­rait pas sur­vivre en dehors de l'utérus, tout en lui sug­gé­rant dis­crè­te­ment de quit­ter l'État avec son mari. 

Elle explique que cette nou­velle tra­gique et bou­le­ver­sante lui a pro­vo­qué une crise de san­té men­tale. Mais elle crai­gnait que le fait de par­ler de sa situa­tion à un pro­fes­sion­nel de la san­té ne sus­cite davan­tage de ques­tions et, éven­tuel­le­ment, des réper­cus­sions juri­diques. Lauren Hall a fina­le­ment ras­sem­blé l'argent néces­saire pour ache­ter un vol de der­nière minute vers Seattle, où elle a pu se faire avor­ter, d'après le jour­nal local. 

Elle racon­tait com­ment son entou­rage était cho­qué de sa situa­tion, et se disait : « Il y a sûre­ment une excep­tion pour ça », et qu' « il ne leur est pas venu à l'esprit qu'une inter­dic­tion pou­vait s'appliquer à des cas comme celui-​ci », continue-​t-​elle.

À lire aus­si I Isabelle Hanne : « Avec ce roman, j'avais envie de rendre hom­mage à la vita­li­té de la résis­tance pro-​choice, par­ti­cu­liè­re­ment stig­ma­ti­sée dans cer­tains Etats américains »

… ou d'Amanda Zurawski
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Amanda Zurawski lors de la confé­rence de presse
© Rick Kern/​Getty Images for the Center for Reproductive Rights

L'une des autres plai­gnantes, Amanda Zurawski, a appris à 17 semaines de gros­sesse qu'elle fai­sait une fausse couche et qu'elle cou­rait un risque éle­vé d'infection. Mais le fœtus avait encore un bat­te­ment de cœur et sa vie n'était pas en dan­ger. Elle a donc été ren­voyée chez elle jusqu'à ce qu'elle ait une infec­tion. Celle qui a assis­té à l'état de l'Union (un évé­ne­ment annuel aux États-​Unis au cours duquel le pré­sident pré­sente son pro­gramme pour l'année en cours), en février der­nier en tant qu'invitée de la pre­mière dame Jill Biden, a été mar­quée phy­si­que­ment et émo­tion­nel­le­ment par ce retard de diag­nos­tic. Elle a défi­ni­ti­ve­ment per­du l'une de ses trompes de Fallope. Lors de la confé­rence de presse mar­di, elle a décla­ré qu'elle était ter­ri­fiée à l'idée de reprendre un trai­te­ment de fécon­da­tion in vitro, selon le Texas Tribune.

« Les res­tric­tions bar­bares adop­tées par nos légis­la­teurs ont des consé­quences concrètes sur des per­sonnes réelles », a‑t-​elle décla­ré lors de la confé­rence de presse qui s'est tenue sur la pelouse nord du Capitole de l'État du Texas et rap­por­té par le quo­ti­dien. « Les per­sonnes qui se trouvent dans le bâti­ment der­rière moi ont le pou­voir de régler ce pro­blème, mais elles n'ont rien fait. En fait, ils essaient actuel­le­ment de faire pas­ser des mesures encore plus res­tric­tives », a‑t-​elle continué. 

Faire recon­naître les excep­tions à l'IVG

Le Center for Reproductive Rights a décla­ré quant à lui mar­di qu'il conti­nuait à cher­cher d'autres moyens de contes­ter devant les tri­bu­naux les inter­dic­tions d'avortement au niveau des États, tout en plai­dant en faveur de pro­tec­tions fédé­rales en matière d'avortement. Le groupe avait déjà contes­té, mais sans suc­cès, le pro­jet de loi du Sénat du Texas, qui inter­di­sait en 2021 l'avortement après envi­ron six semaines de grossesse.

« Ces femmes […] ne repré­sentent que la par­tie émer­gée de l'iceberg », a décla­ré Mme Northup, pré­si­dente du Center for Reproductive Rights (Centre pour les droits repro­duc­tifs), selon le Texas Tribune. « Il s'agit de la pre­mière action en jus­tice dans le pays, mais tra­gi­que­ment, il est peu pro­bable qu'elle soit la der­nière ».

À lire aus­si I Droit à l’avortement aux États-​Unis : l’Amérique démo­crate entre déso­la­tion et mobilisation

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