Selon une étude dévoilée mardi 4 juillet par Santé publique France, le nombre de nouveaux cancers chez les femmes a doublé entre 1990 et 2023, avec une augmentation de 104 %, en raison notamment d’une hausse du tabagisme.
433.136. C’est le nombre de nouveaux cancers estimé pour l’année 2023, selon les prévisions dévoilées mardi par Santé publique France (SpF), l’Institut national du cancer (Inca), le service de biostatistique-bioinformatique des Hospices civils de Lyon et le réseau français des registres des cancers. C’est 51.136 cas de plus qu’en 2018 et deux fois plus qu’en 1990.
Première cause de mortalité chez les hommes et deuxième chez les femmes après les maladies cardiovasculaires, le cancer progresse d’ailleurs davantage chez ces dernières. « Entre 1990 et 2023, le nombre de nouveaux cas de cancers a doublé, avec une augmentation de 98 % des cancers chez l’homme et de 104 % chez la femme », indique l’étude publiée dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire de SpF. L'étude porte sur les dix-neuf cancers les plus fréquents, dont les cancers de la prostate, du sein, du poumon et du colon.
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La hausse des cancers chez les femmes s’explique en partie par l’évolution démographique, mais aussi par le surpoids, la pollution ou l’augmentation de la consommation d’alcool et de tabac. « On voit chez la femme, des cancers plutôt liés à l'homme, du fait des facteurs de risques comme la consommation d’alcool et de tabac qui ont fortement augmenté chez les femmes », souligne ainsi Delphine Loirat, oncologue à l’Institut Curie, spécialiste du cancer du sein, au micro de France Inter.
Le nombre de cancers de la lèvre, de l’œsophage et des poumons liés au tabagisme a ainsi « considérablement augmenté » chez les femmes alors qu’il baisse chez les hommes, pointe l’étude. « Aujourd’hui, beaucoup de patientes qui développent des cancers du poumon se sont mises à fumer dans les années 1960–1970 avec l’émancipation des femmes et l’arrivée de la cigarette dans leurs habitudes. Elles arrivent maintenant à un âge où des pathologies se développent », explique ainsi à L’Express la professeure Marie Wislez, pneumologue à l’hôpital Cochin.
L'augmentation du nombre de cancers du poumon chez les femmes mérite d’ailleurs « un très très gros signal d'attention », pointe auprès de 20 Minutes Norbert Ifrah, le président de l'Institut national du cancer. Selon lui, « la mortalité de ce type de cancer chez la femme pourrait dépasser celle liée à celui du sein » d’ici « les trois prochaines années ».
61.124 nouveaux cas de cancers du sein en 2023
Pour l’heure, le cancer du sein reste sans surprise le plus fréquent chez les femmes avec 61.124 cas estimés pour l'année 2023. « La légère diminution des taux d'incidence (TSM) observée pour les cancers du sein entre 2004 et 2008 ne s’est pas maintenue. Les projections pour 2023, qui tiennent compte de l’augmentation qui a suivi, correspondent ainsi au niveau le plus élevé depuis 1990 », note d’ailleurs Santé publique France. Cette hausse est liée à l’évolution des facteurs de risque que sont les facteurs hormonaux et reproductifs, l’alcool, le surpoids, la sédentarité et le tabac.
Selon l’étude, les cancers colorectaux ont eux augmenté de 0,4 % chez la femme, et diminué de 0,5 % chez l’homme. Enfin, celui du foie s’est stabilisé pour les hommes, mais a connu une hausse de 2,2 % chez les femmes. À l’inverse, le cancer de l’ovaire diminue régulièrement depuis 1990. Même chose en ce qui concerne les cancers du col de l’utérus dont on observe une baisse depuis 2010. Santé publique France précise que le dépistage du cancer du col de l’utérus par frottis cervical a permis de réduire l’incidence de ce dernier.
Meilleur diagnostic
Si le nombre de cancers augmente, ils se détectent en revanche mieux qu’avant. Selon l'étude, l’âge moyen en ce qui concerne le diagnostic chez les femmes est de 68 ans, deux ans de plus pour les hommes. « On détecte mieux les cancers, on a des moyens de détection beaucoup plus développés et on les diagnostique mieux », souligne ainsi Sarah Watson, oncologue à l'institut Curie, spécialiste des cancers rares, au micro de France Inter. Elle rappelle aussi l’importance d’expliquer aux patient·es que « certains cancers ne sont pas liés à des expositions, mais sont la "faute à pas de chance" ». « Il faut savoir repérer les facteurs de risques mais aussi déculpabiliser les patients, qui ne sont pas du tout responsables, impliqués et où ils cherchent quand même une explication », ajoute-t-elle.
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