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© Matteo Badini

“C’est un pro­blème de san­té publique mon­dial !” : les risques de tumeur au cer­veau liés à la prise de pro­ges­ta­tifs confirmés

Prescrits à de très nom­breuses femmes, les pro­ges­ta­tifs entraînent un risque accru d’apparition de tumeurs au cer­veau, confirment des chercheur·euses français·es.

“C’est un pro­blème de san­té publique mon­dial !”, alerte auprès du Parisien Alain Weill, direc­teur adjoint du grou­pe­ment Epi-​Phare, alliance de l’Assurance-maladie et de l’Agence natio­nale de sécu­ri­té des médi­ca­ments (ANSM). Selon l’étude menée par ce cher­cheur et son équipe, “l’utilisation pro­lon­gée de pro­mé­ges­tone (Surgestone 0,5 mg), de médro­ges­tone (Colprone 5 mg), ou d’acétate de médroxy­pro­ges­té­rone (Depo Provera 150 mg / 3 ml) est asso­ciée à un sur­risque de ménin­giome”. Des résul­tats – sur les risques de tumeur au cer­veau liés à ces pro­ges­ta­tifs – publiés en fran­çais en juillet der­nier, mais parus mer­cre­di soir dans la revue British Medical Journal, leur offrant désor­mais une visi­bi­li­té beau­coup plus large. 

Risques connus

Essentiellement des­ti­née aux femmes, cette caté­go­rie de trai­te­ments étu­diée vise à soi­gner une large série d’affections : patho­lo­gies fémi­nines comme l’endométriose, infer­ti­li­té, accom­pa­gne­ment de la méno­pause… mais les pro­ges­ta­tifs servent aus­si par­fois de contra­cep­tion. Depuis les années 2010, cer­tains de ces médi­ca­ments se sont révé­lés favo­ri­ser l’apparition de ménin­giomes. Des tumeurs au cer­veau par­fois qua­li­fiées de “bénignes”, car elles ne sont pas sus­cep­tibles de dégé­né­rer en can­cers mor­tels, mais pou­vant pro­vo­quer de graves han­di­caps neurologiques. 

C'est d'abord le médi­ca­ment Androcur (acé­tate de cypro­té­rone) qui a été mis en cause. Théoriquement indi­qué contre une pilo­si­té exces­sive, mais pres­crit pen­dant des décen­nies par de nombreux·euses méde­cins bien au-​delà de ces indi­ca­tions – notam­ment contre l'endométriose -, son lien avec les ménin­giomes a été clai­re­ment éta­bli en 2018. Deux autres trai­te­ments, Lutéran (chlor­ma­di­none) et Lutényl (nomes­trol), ont éga­le­ment été mis en cause. Pour ces trois médi­ca­ments – qui n'ont pas pour autant été inter­dits vu leur inté­rêt dans cer­taines indi­ca­tions spé­ci­fiques – les pres­crip­tions ont depuis chuté.

Des résul­tats éclairants

Évidemment, on crai­gnait pour un cer­tain nombre d’autres pro­ges­ta­tifs”, expli­quait Alain Weill à pro­pos de l’étude lors de sa publi­ca­tion ini­tiale, qui a super­vi­sé pour l’ANSM et l’Assurance-maladie une vaste étude rétros­pec­tive sur une cen­taine de mil­liers de patientes. Cette der­nière se base sur l’observation des don­nées de plus de 18 000 femmes âgées de 45 à 74 ans et opé­rées d’un ménin­giome entre 2009 et 2 018 en France, avant de les com­pa­rer à celles de 90 000 autres femmes. 

L'étude révèle ain­si que les pro­ges­ta­tifs Colprone, Surgestone et Depo Provera mul­ti­plient bien les risques de tumeur des méninges néces­si­tant une inter­ven­tion chi­rur­gi­cale – res­pec­ti­ve­ment par 4,1, 2,7 et 5,6 – lorsqu'ils sont pris pen­dant plus d'un an. Le risque aug­mente en effet pro­gres­si­ve­ment avec la durée du trai­te­ment. Surgestone n'est plus com­mer­cia­li­sé depuis 2020 et Depo Provera est très peu pres­crit dans le pays : 5 000 per­sonnes concer­nées en France mais 74 mil­lions à tra­vers le monde. Colprone est pour sa part tou­jours actuel­le­ment admi­nis­tré à plu­sieurs dizaines de mil­liers de femmes. Il l'est même de plus en plus, car il sert d'alternative à des patientes ayant jus­te­ment aban­don­né Androcur, Lutényl ou Lutéran à cause des risques de méningiome.

Soulagement et précautions

À plu­sieurs titres, l’étude se montre cepen­dant ras­su­rante. Certains trai­te­ments, comme Utrogestan (pro­ges­té­rone) et Duphaston et Climaston (dydro­ges­té­rone), pres­crits à des cen­taines de mil­liers de patientes, se sont révé­lés inof­fen­sifs. Surtout, il n’y a pas de risque lié à l’usage d’un sté­ri­let hor­mo­nal déli­vrant des pro­ges­ta­tifs, un dis­po­si­tif implan­té sur envi­ron 2 mil­lions de femmes. “C’est très ras­su­rant”, affirme aujourd’hui au Parisien Alain Weil. De façon géné­rale, n’importe quel pro­ges­ta­tif “doit tou­jours être pres­crit à la dose mini­male effi­cace et pen­dant une durée d’utilisation la plus courte pos­sible”, conclut l’ANSM.

Le sou­la­ge­ment domine aus­si pour Emmanuelle Mignaton, pré­si­dente de l’association Amavea, qui regroupe des patientes atteintes de ménin­giomes après la prise de pro­ges­ta­tifs. Comme nombre de patientes, elle reproche cepen­dant aux auto­ri­tés sani­taires d’avoir trop tar­dé, il y a quelques années, à réagir face aux pre­mières alertes sur l’Androcur. “Là, vrai­ment, l’agence [du médi­ca­ment] prend les choses en main d’une manière qui me semble bien, rigou­reuse et rapide”, estimait-​elle alors. Elle sou­li­gnait par ailleurs le “sou­la­ge­ment” de voir “que la situa­tion [s’éclaircit] de plus en plus”.

Lire aus­si I Les can­cers frappent de plus en plus les moins de 50 ans

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