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Sport : les séna­teurs votent (encore) un amen­de­ment visant à inter­dire le port du voile dans les compétitions

Les séna­teurs ont adop­té, la semaine der­nière, une pro­po­si­tion de loi visant à démo­cra­ti­ser le sport en France. Un amen­de­ment, por­té par Les Républicains, entend inter­dire le port du voile dans les com­pé­ti­tions sportives.

Ce 24 jan­vier, c'est la jour­née inter­na­tio­nale du sport fémi­nin. En France, outre les dif­fé­rents évé­ne­ments des­ti­nés à pro­mou­voir la pra­tique spor­tive des femmes, l'actualité est mar­quée par un amen­de­ment séna­to­rial en forme d'obsession de la droite. Mercredi der­nier, le Sénat a adop­té, en pre­mière lec­ture, une pro­po­si­tion de loi visant à démo­cra­ti­ser le sport en France. Le texte, « essen­tiel » aux yeux de Roxana Maracineanu, la ministre délé­guée char­gée des Sports, vise à rendre la pra­tique spor­tive « la plus acces­sible à tous, par­tout, à tous les âges et moments de nos vies », a‑t-​elle expli­qué sur Twitter. Mais la chambre haute du Parlement y a ajou­té un amen­de­ment, por­té par le séna­teur (LR) de Maine-​et-​Loire Stéphane Piednoir, qui n'était pas dans le texte d'origine. Il entend inter­dire le port de signes reli­gieux osten­ta­toires lors de com­pé­ti­tions spor­tives orga­ni­sées par les fédé­ra­tions et les associations.

« Si cha­cun peut exer­cer en toute liber­té sa reli­gion, sur un ter­rain de sport la neu­tra­li­té s’impose. Il n’y a pas de dif­fé­rences ou d’appartenances par­ti­cu­lières à mettre en avant. Aujourd’hui, un flou juri­dique existe sur le port de signes reli­gieux, et il est néces­saire que l’État défi­nisse clai­re­ment des règles. Si le port du voile n’est pas expli­ci­te­ment inter­dit, on pour­rait voir émer­ger des clubs spor­tifs com­mu­nau­taires pro­mou­vant cer­tains signes reli­gieux », affirment les séna­teurs LR dans la pré­sen­ta­tion de leur amen­de­ment, voté par 160 voix contre 143. Par ailleurs, « le voile repré­sente dans de nom­breux cas un risque majeur pour la sécu­ri­té des pra­ti­quants », défendent-​ils encore.

Un autre amen­de­ment et une pro­po­si­tion de loi

Ce n'est pas la pre­mière fois qu'une telle inter­dic­tion est for­mu­lée. Un amen­de­ment simi­laire avait été intro­duit, à l'initiative du séna­teur (LR) de l'Isère Michel Savin, lors de l'examen du pro­jet de loi sépa­ra­tisme, en avril 2021, comme l'indiquait à l'époque Public Sénat.

Ce même Michel Savin, ain­si que Stéphane Piednoir et le chef de file de la majo­ri­té séna­to­riale Bruno Retailleau, ont éga­le­ment dépo­sé le 8 décembre 2021 une pro­po­si­tion de loi visant à assu­rer le res­pect des prin­cipes de la laï­ci­té dans le sport. Avec, dans l'exposé des motifs, les mêmes expli­ca­tions, mot pour mot, que dans l'amendement voté mar­di, concer­nant le port de signes reli­gieux ostentatoires.

« S'il n'y a pas de cadre juri­dique, les per­sonnes qui se retrouvent face à ces situa­tions créées par idéo­lo­gie ou pro­vo­ca­tion sont dému­nies », jus­ti­fie encore Michel Savin, le rap­por­teur de la pro­po­si­tion de loi au Sénat, auprès de Marianne.

« On ne fait pas l'apologie d'une religion »

Or, dans cer­tains sports, comme dans le foot­ball, le voile est déjà inter­dit. La Fédération fran­çaise de foot­ball (FFF) inter­dit ain­si aux femmes de por­ter le hijab lors des ren­contres offi­cielles, alors que la Fédération inter­na­tio­nale de foot­ball asso­cia­tion (Fifa) l'autorise, elle, depuis 2014. Interrogée l'été der­nier par Libération, la FFF avan­çait les valeurs de « neu­tra­li­té » et de « laï­ci­té » garan­ties dans ses sta­tuts. Ces der­niers inter­disent « tout port de signe ou tenue mani­fes­tant osten­si­ble­ment une appar­te­nance poli­tique, phi­lo­so­phique, reli­gieuse ou syn­di­cale » lors des compétitions. 

En 2020, des foot­bal­leuses musul­manes ont créé le syn­di­cat des Hijabeuses, afin « de faire entendre leur voix et faire recon­naître leur droit de jouer au foot », indiquent-​elles sur leur site inter­net. Certaines portent le voile, d'autres non. « On est exclues des ter­rains alors que l’on est comme les autres. On paye notre licence en club et on se donne à fond lors des entraî­ne­ments pour qu’au final, le jour du match, on nous dise qu’on ne peut pas jouer parce qu’on est voi­lées… », déplo­rait Founé Diawara, co-​présidente du syn­di­cat, auprès de Libération. Une autre joueuse, Karthoum, ajou­tait alors : « À par­tir du moment où on ne fait pas l’apologie d’une reli­gion, je ne vois pas où est le pro­blème. On n’est pas neutre soi-​même lorsqu’on écarte les femmes musul­manes voi­lées des ter­rains. Moi, j’appelle cela de la dis­cri­mi­na­tion. » Concernant l'argument de la sécu­ri­té et de la san­té avan­cé par les Sénateurs, il existe aujourd’hui des hijabs de sport, com­mer­cia­li­sés par Nike par exemple, et uti­li­sés lors de cer­taines com­pé­ti­tions internationales.

« Les Hijabeuses sont des femmes qui se battent pour leur droit tout sim­ple­ment de jouer au foot avec leur voile en match en com­pé­ti­tion », résu­mait Bouchra, l'une des membres, au Bondy Blog. Le syn­di­cat a, par ailleurs, sai­si, à la fin de l'année 2021 le Conseil d'État concer­nant cette inter­dic­tion de la FFF.

Une com­mis­sion mixte pari­taire convoquée

De son côté, la ministre char­gée des Sports, Roxana Maracineanu, a émis un avis défa­vo­rable à cet amen­de­ment lors des débats au Sénat. Elle a notam­ment mis en avant le contrat d’engagement répu­bli­cain, issu de la loi sépa­ra­tisme, que doivent désor­mais signer les fédé­ra­tions et asso­cia­tions. Un dis­po­si­tif des­ti­né à les contrô­ler et à évi­ter des dérives sépa­ra­tistes ou com­mu­nau­taires, comme semblent le craindre les séna­teurs LR.

Après le vote de la pro­po­si­tion de loi par la chambre haute du Parlement, une com­mis­sion mixte pari­taire a été convo­quée jeu­di der­nier. Composée de sept député·es et de sept sénateur·trices, elle a pour mis­sion d’aboutir à la conci­lia­tion du par­le­ment sur un texte com­mun, en cas de désac­cords per­sis­tants. L'amendement pour­rait donc dis­pa­raître. La com­mis­sion doit se réunir le 31 jan­vier, avant la fin de la ses­sion par­le­men­taire, sus­pen­due le 26 février pour lais­ser place à la cam­pagne présidentielle.

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