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Le XV de France affronte l’Angleterre, au Tournoi des six nations féminin, le 30 avril 2022. © SIPA

Rugby fémi­nin : pas un rond pour l'ovalie

Le Tournoi des six nations fémi­nin a débu­té le 25 mars – les Françaises se sont impo­sées 22 à 12 dimanche à Parme – et la dis­ci­pline n’est tou­jours pas pro­fes­sion­nelle. Mais depuis quelques mois, un club du Nord lutte pour offrir des CDD à son équipe.

Une médaille d’argent au rug­by à sept aux Jeux olym­piques de Tokyo en 2020, une médaille de bronze à la Coupe du monde 2022 en Nouvelle-​Zélande, cinq Grands Chelems pour le XV de France depuis la créa­tion du Tournoi des six nations fémi­nin en 1999… Ces der­nières années, le rug­by fémi­nin fran­çais s’impose en force sur la scène inter­na­tio­nale. Malgré ce beau pal­ma­rès et un vrai élan média­tique, avec des retom­bées réelles sur le nombre d’inscriptions dans les clubs, il est l’un des seuls sports col­lec­tifs de l’Hexagone où les joueuses ne sont pas professionnelles.

Les pré­ju­gés autour de la pra­tique fémi­nine du rug­by – long­temps per­çu comme un sport viril, réser­vé aux hommes – ont frei­né son déve­lop­pe­ment, au point que la dis­ci­pline souffre encore d’un manque de recon­nais­sance et des moyens néces­saires à sa structuration.

Au-​dessus de la mêlée, seules les inter­na­tio­nales du XV de France (elles sont 32 cette année) sont, depuis 2019, sous contrat semi-​professionnel avec la Fédération fran­çaise de rug­by et per­çoivent entre 2 000 et 3 000 euros par mois. Une rétri­bu­tion bien en deçà de celle de leurs homo­logues mas­cu­lins du Top 14, dont le salaire avoi­sine en moyenne les 10 000 euros men­suels. Et, contrai­re­ment à la pre­mière divi­sion mas­cu­line, l’Élite 1, son équi­valent fémi­nin, est, elle, tou­jours « ama­teure ». Les rug­by­wo­men touchent seule­ment des primes de match (quelques cen­taines d’euros par mois), qui dif­fèrent selon les clubs. Alors, pour joindre les deux bouts, elles sont obli­gées de tra­vailler, en plus des entraî­ne­ments le soir, des dépla­ce­ments et des matchs le week-​end. Un emploi du temps ser­ré, dans lequel l’Ovalie occupe une place majeure, mais ne leur rap­porte pas un rond. 

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Un club du Nord a tou­te­fois déci­dé de tout mettre en place pour chan­ger la donne. Le Stade Villeneuvois Lille Métropole (LMRCV), club de Villeneuve‑d’Ascq (Nord), qui évo­lue en Élite 1, a enta­mé des démarches pour pro­po­ser à ses joueuses un contrat semi-​professionnel en CDD spor­tif, à par­tir de la sai­son pro­chaine. « On a mis du temps pour faire tom­ber les bar­rières autour du rug­by fémi­nin. Aujourd’hui, on a une loco­mo­tive : l’équipe de France et ses bons résul­tats. Il faut sur­fer sur ces suc­cès et accro­cher les wagons der­rière, sans perdre l’élan », pré­cise Laura Di Muzio, ancienne joueuse du XV de France et pré­si­dente du LMRCV, qui s’est mise en quête de fonds : 200 000 euros d’ici à fin mars. Jusqu’alors, aucun club n’avait ten­té l’essai.

Soutenue dans ce com­bat par ses joueuses, elle veut impul­ser un mou­ve­ment au sein du rug­by fran­çais. « La situa­tion doit évo­luer, de nom­breuses joueuses sont dans une situa­tion pré­caire. Elles jonglent entre le rug­by, leurs études et un tra­vail pour pou­voir payer le loyer. La charge men­tale est consi­dé­rable. Forcément, à un moment, ça coince dans un des pro­jets. » Épuisement, fatigue, bles­sure, le men­tal et le corps des joueuses de l’Élite 1 sont mis à rude épreuve, au détri­ment des per­for­mances et des résul­tats. « Si on ne leur donne pas les moyens de s’y consa­crer plei­ne­ment, elles arrê­te­ront le rug­by », pour­suit l’ancienne internationale.

Actuellement, celles qui par­viennent à atteindre le haut niveau mettent géné­ra­le­ment un terme à leur car­rière plus tôt que les hommes, avant 30 ans. Laura Di Muzio inter­pelle alors les dirigeant·es : « Quels moyens donne-​t-​on au rug­by fémi­nin pour gran­dir et pro­gres­ser ? » Si la pro­fes­sion­na­li­sa­tion est amor­cée, les filles espèrent rapi­de­ment trans­for­mer l’essai et faire recon­naître une pro­fes­sion à part entière : rugbywoman.

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