En Seine-Saint-Denis, Brigitte a lancé une épicerie durable et solidaire tractée par son vélo. Loin d’être une utopie bobo, l’initiative repose sur un modèle économique et social ambitieux et sur le bien-manger pour tous.
Une voiture rouge ralentit à l’angle de l’allée Racine, à Bondy (Seine-Saint-Denis), où est postée la charrette tirée par un vélo. La vitre se baisse et le conducteur – un homme d’une vingtaine d’années – hèle les piétons qui stationnent à côté de l’étrange convoi : « Qu’est-ce qu’on vend ici ? » « C’est une épicerie durable et solidaire », lui répond-on. Le jeune homme ouvre des yeux grands comme des soucoupes avant de lâcher sur un ton aussi étonné que définitif : « Ouh là… bon courage ! » Ce « bon courage », nul doute que Brigitte Nuchelmans a dû l’entendre plus d’une fois depuis qu’elle s’est lancée dans son projet d’épicerie itinérante à Bondy. Dans un pays où la gentrification se mesure entre autres à l’implantation des magasins bio dans les villes, on note que Bondy n’en compte pas. La commune d’un peu plus de 53 000 habitant·es affiche un taux de chômage de 16,3 % – environ le double du taux national – et un revenu médian annuel de 15 978 euros, contre 20 150 euros de moyenne hexagonale.
Retour quelques heures en arrière : dans la cour de son petit pavillon, non loin de la gare de Bondy, Brigitte prépare sa tournée. Dans sa charrette pensée avec le concours d’une coopérative rennaise, elle organise les produits qu’elle va aller vendre dans plusieurs endroits de la ville : la rhubarbe, la chicorée, les carottes – toutes bio – côtoient les abricots secs et la semoule complète, mais aussi les produits de beauté Baumora – conçus à Bondy –, ou encore les volailles et la crémerie proposés par des petits producteurs de Seine-Maritime. Les client·es ont passé commande via un formulaire sur Internet, mais la trentenaire prend[…]