Dans une tribune publiée dans Libération ce 9 août, les membres du Collectif français contre le viol conjugal demandent l’abolition définitive de la notion de « devoir conjugal » dans les interprétations des textes de loi.
En France, le viol conjugal est un crime encore trop souvent banalisé, peu médiatisé et encore moins conscientisé par notre société. C’est l’amer constat dressé par les membres du Collectif français contre le viol conjugal qui signent une tribune dans Libération ce mercredi. Ce texte déplore que malgré la loi française qui définit pourtant le viol comme une circonstance aggravante, « l’application des textes de lois sur ce sujet et la prise en charge des victimes n’est toujours pas au rendez-vous ». C’est pourquoi, les signataires demandent une prise en charge adaptée « du fait de la spécificité du viol sur conjoint, qui se manifeste sur différents plans : affectif, financier, familial, psychologique et médical ».
Le Collectif français contre le viol conjugal, lancé mardi 8 août pour sensibiliser et alerter sur ce fléau, demande une journée de formation obligatoire dédiée au viol conjugal pour tous·tes les fonctionnaires en contact avec des victimes. « Nous réclamons également que la notion de viol conjugal soit abordée dans le cursus d’études supérieures des élèves de droit, psychologie et médecine », ajoutent-iels. « Beaucoup de victimes témoignent avoir été forcées par leur partenaire, mais ne posent pas le mot “viol” sur leur vécu, pensant que leur conjoint est dans son bon droit, poursuivent les signataires. Bon nombre d’agresseurs admettent d’ailleurs forcer leur partenaire, tout en se sentant légitimes pour le faire sous couvert de devoir conjugal. »
Abolition de la notion de « devoir conjugal »
Parmi les signataires on note la journaliste et écrivaine Giulia Foïs, Arnaud Gallais, cofondateur du collectif Prévenir et Protéger, et Be Brave France, ou encore Muriel Salmona, présidente de l’association Mémoire traumatique et victimologie.Iels demandent surtout l’abolition définitive de la notion de « devoir conjugal » dans les interprétations de textes de loi et que cette notion ne puisse plus être utilisée comme argument de faute grave lors d'un divorce.
En 1992, le viol conjugal fait son entrée dans la loi avec une subtilité : la présomption de consentement n’existe que jusqu’à preuve du contraire. Puis, la loi du 4 avril 2006 estime que le fait d’être en couple, marié ou non, est une circonstance aggravante, passible de vingt ans de prison. Avec la loi du 9 juillet 2010, la présomption de consentement disparaît des textes de loi mais « dans les faits, la majorité des viols conjugaux ne sont pas pris sérieusement en compte par la justice et sont requalifiés en tant que délit ou classés sans suite », rapporte la tribune.
Du côté de la loi, rien sur le devoir conjugal. La loi sur le mariage prévoit que les époux « s’obligent mutuellement à une communauté de vie ». Aucune référence explicite à l’obligation d’avoir « une communauté de lit », et, donc, des relations sexuelles. Dans les faits, certain·es juges condamnent pourtant encore des hommes et des femmes qui ne respecteraient pas leur « devoir conjugal », c’est-à-dire qui n’auraient pas de relations sexuelles régulières avec leur conjoint·e. « Il s’agit d’un enjeu de santé publique contre lequel il convient d’agir urgemment. Le consentement n’est pas et ne doit jamais être une option, quel que soit le contexte relationnel », rappellent les signataires de la tribune.