Mercredi, l’Académie nationale de médecine a mis en garde, dans un communiqué, contre les risques éventuels des lampes chauffantes, utilisées dans les ongleries pour l'application de vernis semi-permanents ou de gel, qui pourraient entraîner des cancers de la peau.
Depuis dix ans, le secteur de l'onglerie est devenu très en vogue. C’est pourquoi, ce mercredi 3 mai, l’Académie nationale de médecine, institution des plus sérieuses, chargée d’éclairer les débats de santé, a publié un communiqué dans lequel elle met en garde contre les risques liés à l'utilisation répétée des lampes chauffantes pour l'application des vernis à ongles semi-permanents et la pose de gel. Elles pourraient entraîner des cancers de la peau.
Le vernis semi-permanent et le gel sont des soins esthétiques qui durent entre deux à trois semaines sans s’écailler, contrairement au vernis classique qui disparaît en quelques jours. Mais leur application « nécessite l’usage d’une lampe combinant UV [au moins 48 watts] et diode électroluminescente [LED] pour sécher et fixer chacune des quatre couches de vernis appliquées », détaille l’Académie de médecine. « Or, ces lampes émettent des rayons UV de type A [UVA] qui pénètrent profondément dans la peau et sont connus pour favoriser le vieillissement mais surtout le développement de cancers de la peau », ajoute-t-elle.
Trois facteurs de cancer
Pour appuyer ses propos, l'Académie cite une synthèse de la littérature scientifique sur le sujet, publiée en 2022 dans une revue médicale, Clinics in Dermatology, qui recense trois types d'effets secondaires induits par le vernis semi-permanent : la plupart des problèmes (70,5%) sont des cas de réactions cutanées allergiques, suivis des atteintes mécaniques des ongles (26,1%), mais aussi, dans une moindre mesure, de cas de cancers cutanés à type de carcinome épidermoïde induit (3,4%). Le rôle favorisant des lampes UV « à ongles » dans l'induction de ces cancers cutanés avait déjà été évoqué dès 2009. Les UVA sont d'ailleurs classés comme « cancérigènes » par le Centre international de recherche sur le Cancer, indique toujours l'institution.
Pénétrant dans le derme, « les rayons UVA sont connus pour endommager l’ADN des cellules de la peau en produisant des radicaux libres, qui induisent l’apparition de mutations à l’origine de cancers dans ces cellules » et ils induisent toujours le même type de mutations, ce qui rend le lien entre les rayons et l’apparition de cellules cancéreuses scientifiquement indubitable. Le terme de « signature UVA » est même évoqué dans ces cancers cutanés, indique l'Académie de médecine. Des tests, réalisés récemment et dont les conclusions ont été publiées en janvier dernier par la National library of Medicine, ont montré le rôle cancérigène des lampes à ongles.
Mais l’Académie reconnaît la nécessité de mener des études épidémiologiques de grande ampleur pour évaluer plus précisément le risque de cancer. Elle sait en revanche que celui-ci « semble avant tout lié à trois facteurs », développe l’Académie, qui cite l’âge jeune de début d’utilisation (en moyenne 20 ans), la fréquence rapprochée (5 à 6 fois par an) et l’exposition durant plusieurs années. « L’effet cumulatif des expositions aux UVA représente un risque majeur » et il « peut être aggravé par le terrain », soit les peaux claires qui y sont plus exposées que les peaux foncées.
Une série de préconisations
En recommandation, l’Académie de médecine suggère d’appliquer une crème solaire sur les mains vingt minutes avant l’exposition aux lampes UV/LED. Elle préconise également de faire un recensement du nombre d’appareils de lampes chauffantes vendus chaque année « afin de pouvoir estimer l’évolution du marché », et demande l’obligation de joindre à chaque appareil un message écrit d’alerte et de recommandations.
L’institution souhaite aussi mettre en place des campagnes d’information pour le grand public et les professionnel·les, soulignant le risque d’ « une application continue des vernis semi-permanents dans l’année, en particulier chez les personnes de phototype clair ».
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