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©Egor Gordeev

Une étude le prouve : plus les hommes aiment la viande rouge, plus ils sont sexistes

Selon une étude de l’Ifop dévoilée ce 22 septembre sur le profil des hommes consommateurs de viande, les idées sexistes sont dominantes chez les gros mangeurs de barbaque.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les hommes aux idées sexistes sont surreprésentés chez les « viandards ». C’est le résultat d’un sondage Ifop pour le média en ligne Darwin Nutrition, publié ce jeudi 22 septembre. Une étude qui survient moins d’un mois après le brasier déclenché fin août par une petite phrase de la députée Europe Écologie-Les Verts (EELV) Sandrine Rousseau, lors des journées d’été du parti à Grenoble.

Alors qu’elle participait à une table ronde consacrée à la consommation de viande et ses répercussions pour le climat, Sandrine Rousseau avait déclaré qu’il « faut changer de mentalité pour que manger une entrecôte cuite sur un barbecue ne soit plus un symbole de virilité ». Il n’en fallait pas plus pour que la polémique s’enflamme du côté des épris de barbaque et que la députée féministe s'attire une fois de plus les railleries d'internautes et des réactions politiques indignées.

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Mais voilà que les chiffres vont dans le sens des propos de Sandrine Rousseau. Réalisée du 5 au 7 septembre auprès de 2 033 hommes, l’étude s’est penchée sur la consommation de viande rouge et de gibier chez les hommes qui, on le sait déjà, en consomment plus que les femmes. Plus particulièrement, ils ont été questionnés ici sur leur rapport à la viande, à la politique et au genre. Des questions par ailleurs déjà abordées par la journaliste Nora Bouazzouni dans son essai Steaksisme, en finir avec le mythe de la végé et du viandard, paru en 2021 chez Nouriturfu et qui ont aujourd’hui trouvé des réponses statistiques.

Car bingo ! Les hommes qui se caractérisent eux-mêmes comme « très viandards » sont aussi ceux qui se placent le plus à droite sur l’échiquier politique, adhèrent davantage aux stéréotypes sexistes et ont une vision traditionaliste de la famille ainsi qu’un concept misogyne des relations de couple. Des résultats particulièrement édifiants selon l’Ifop. « Nous avons rarement vu des résultats avec des écarts aussi marqués. Personnellement, je ne m’y attendais pas », s’étonne François Kraus, directeur du pôle Politique/Actualité de l’Ifop auprès du Parisien.

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L’Ifop s’est premièrement penché sur le profil politique des consommateurs de viande rouge et de gibier. 72 % des hommes qui s’auto-définissent comme « très viandards » se situent politiquement à droite et, parmi eux, 33 % se situent même « très à droite ». À l’inverse, seuls 12 % des hommes se situant politiquement à gauche se définissent comme « très viandard ». « La viande rouge est, pour les plus droitards, incontestablement un marqueur de virilité, avec une volonté d’envoyer bouler le politiquement correct de l’alimentation », analyse François Kraus.

Les gros consommateurs de viande rouge adhèrent plus facilement aux valeurs de droite, mais aussi aux stéréotypes sexistes. Si selon l'Ifop, 21 % des Français répondent qu’ils sont d’accord avec l’affirmation suivante : « Dans un couple, il est normal que la femme effectue plus d’activités ménagères que l’homme », ce chiffre grimpe à 47 % chez les hommes consommateurs quotidiens de viande rouge. Contre 16 % chez les non-consommateurs. Un point de vue sexiste que l’on retrouve aussi chez les hommes votant à droite : 38 % des sympathisants de Reconquête le partagent tandis qu’ils sont 10 % chez EE-LV. 

Culture du viol et barbaque font bon ménage 

On retrouve ce phénomène dans toutes les affirmations de l’enquête : quel que soit le stéréotype sexiste, les consommateurs quotidiens de viande rouge y souscrivent volontiers, et ce, très loin devant les autres qui en mangent moins ou pas du tout. Sur la culture du viol par exemple, 38 % des consommateurs quotidiens sont d’accord avec l’affirmation suivante : « Pour la séduire, un homme doit pouvoir être libre d’importuner une femme qui lui plaît ». Et 39 % d’entre eux acquiescent à celle-ci : « Lorsqu’on veut avoir une relation avec elles, beaucoup de femmes disent “non” mais ça veut dire “oui“ ». Un chiffre qui retombe à 12 % chez les hommes ne consommant pas de viande. 

À la question « le travail d’un homme, c’est de gagner de l’argent, celui d’une femme de s’occuper de la maison et de la famille ? » , là encore, c’est un oui franc pour 41 % des carnivores contre 12 % chez les non-consommateurs. Chez ceux qui mangent du bœuf tous les jours, ils sont d’ailleurs 38 % à trouver « gênant » si leur femme gagne un jour plus d’argent qu’eux. À la différence, ils sont 9 % chez ceux qui n’en mangent jamais.

Le sondage de l’Ifop s’est évidemment penché sur la cruciale gestion du barbecue dans le couple. Là aussi les résultats parlent d’eux-mêmes : 78 % des hommes en couple s’occupent plus souvent du barbecue que leur conjoint·e. D'ailleurs, pour 40 % d’entre eux, faire cuire de la viande sur le grill est leur apanage exclusif. L’objectif de l’enquête étant de souligner les liens entre genre, politique et consommation de viande, elle pointe aussi que 53 % des votants d’Éric Zemmour à l’élection présidentielle ont le monopole du barbecue. Ils sont 42 % chez Jean-Luc Mélenchon (LFI).

Les « machos-viandards » 

Au sein des consommateurs quotidiens, l’Ifop distingue une sous-catégorie : les « machos-viandards » qui représentent 15 % des mangeurs de viande rouge. Leurs caractéristiques ? Ils ont entre 25 et 49 ans, sont issus de catégories sociales populaires aux revenus modestes et se situent politiquement aux extrêmes (droite ou gauche). Catholiques pratiquants ou musulmans, ils revendiquent le monopole du barbecue et rejettent le féminisme. Autre point : la chasse y est surreprésentée.

« Tous les viandards ne sont pas des machos, mais une minorité a un rapport au genre et à la société très conservateur, pour ne pas dire réactionnaire », pointe François Kraus, avant d’assurer que cette minorité « ne pèse pas tant que ça au sein de la population masculine. » Selon le sondage de l’Ifop, 62 % des consommateurs de viande sont même finalement d’accord avec Sandrine Rousseau et affirment souhaiter que « manger une entrecôte cuite sur un barbecue ne soit plus un symbole de “virilité” ».

Pas sûr que cela soit suffisant pour éteindre les flammes. Cette étude prouve que dans un contexte de vifs débats sur les inégalités sociales et l’urgence climatique, la viande est plus que jamais un sujet de crispation politique.

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