À gauche, cinq candidat·es promettent d’investir le milliard d’euros, demandé par les associations féministes, pour lutter contre les violences faites aux femmes. Candidat·e par candidat·e, Causette s’est penchée dans les détails budgétaires.
La proposition fait consensus chez les principaux·pales candidat·es de gauche. Fabien Roussel (PCF), Anne Hidalgo (PS), Jean-Luc Mélenchon (LFI), Yannick Jadot (EELV) et Christiane Taubira se sont engagé·es à investir, s’iels sont élu·es, la somme d’un milliard d’euros dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Un montant qui n’a pas été calculé au hasard. Les cinq candidat·es répondent ainsi à la demande formulée depuis quelques années par les associations féministes d’allouer des moyens financiers conséquents à la lutte contre ces violences. La présidente de la Fondation des Femmes, Anne-Cécile Mailfert le martelait encore le 11 février sur France inter : « Pour nous, contre les violences conjugales, c'est le milliard point barre ».
Pour rappel, si l'exemple espagnol est souvent brandi en modèle sur l'obtention d'un fameux milliard d'euros contre les violences faites aux femmes, le budget en question a bien été débloqué… Mais sur cinq ans. C'est d'ailleurs ce que rétorque le gouvernement actuel pour justifier son refus. Alors, à quelques semaines du premier tour de l’élection, Causette s’est intéressée au chiffrage très ambitieux de celles et ceux qui assurent pouvoir l'aligner. Concrètement, que vont-ils et elles faire de tout cet oseille ?
Le milliard de Yannick Jadot (EELV)
Yannick Jadot prévoit de rétablir un ministère dédié aux droits des femmes à qui l’écologiste allouera cette enveloppe d’un milliard d’euros. Concernant son utilisation concrète, Yannick Jadot prévoit d’améliorer l'accueil des femmes victimes de violences dans les commissariats en mettant en place des salles dédiées à l'accueil de ces femmes où tous les examens médicaux et psychologiques pourront être réalisés sur place. Le candidat écologiste entend créer une plateforme de signalement en cas de refus de dépôt de plainte ainsi qu’une formation obligatoire de tou·tes les professionnel·les en contact avec ces victimes. Le candidat écologiste prévoit de créer avec ce milliard d’euros des juridictions spécialisées dans les violences conjugales « afin de raccourcir les temps de procédure et de faciliter la prise en charge des enfants », précise Yannick Jadot à Causette. Le candidat EELV entend également assurer un « financement suffisant » aux numéros d’aide aux victimes pour « garantir que le temps d’écoute des victimes ne soit pas une variable d’ajustement et que le numéro soit joignable 24h/24 ». Yannick Jadot prévoit de renforcer financièrement les associations qui accompagnent les femmes et les enfants. Le candidat écologiste renforcera les dispositifs de protection en généralisant l’éloignement des ex-conjoints violents, le déploiement des téléphones grave danger et des bracelets anti-rapprochement. Yannick Jadot prévoit également de « tripler » les places d'hébergement spécialisées pour l'accueil des femmes victimes de violences et de leurs enfants.
Le milliard d’Anne Hidalgo (PS)
Le programme de l’actuelle maire de Paris prévoit la création d'un ministère des Droits des femmes de plein exercice dans lequel « plus d’un milliard d’euros sera dédié exclusivement à la lutte contre les violences faites aux femmes », précise à Causette un membre de son équipe de campagne. La candidate socialiste s’engage à poursuivre, « avec les associations féministes et les collectivités territoriales », la formation des policiers, des gendarmes et des magistrats sur ces violences. Anne Hidalgo entend également mettre en place la présence obligatoire d’assistantes sociales dans les commissariats et les gendarmeries mais aussi un accompagnement social et psychologique des femmes et des enfants témoins de violence. Anne Hidalgo s’engage à « prioriser les victimes de violences conjugales dans le parc de logements sociaux ».
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Le milliard de Fabien Roussel (PCF)
Le candidat communiste allouera à son ministère des droits des femmes « l’entièreté » d’une enveloppe d’un milliard pour lutter contre les violences faites aux femmes. « Ce ne sera pas l’enveloppe globale du ministère », précise à Causette Shirley Wirden, membre de la commission des droits des femmes du PCF. Fabien Roussel entend suivre les recommandations des associations en les réactualisant si besoin. « Il conviendra de refaire une expertise chiffrée avec les associations féministes, ajoute Shirley Wirden. On a besoin de l’expertise du terrain pour faire évoluer le programme de Fabien Roussel et connaître le montant exact de l’enveloppe. » Pour le candidat communiste, la « priorité » de ce milliard, est de donner les moyens aux associations. Pour cela, Fabien Roussel prévoit la création de places d'hébergement et de centres d'accueil pour les femmes victimes de violences conjugales. Le candidat PCF souhaite aller vers une gratuité des soins psychologiques pour ces femmes et leurs enfants. « Cela pourrait aller dans cette enveloppe mais aussi dans celle du ministère de la Santé », précise Shirley Wirden.
Le milliard de Jean-Luc Mélenchon (LFI)
Jean-Luc Mélenchon souhaite la création d’un ministère de plein droit dédié à l’égalité entre les femmes et les hommes. Le candidat insoumis entend engager avec ce ministère « une politique d’ampleur qui prenne le problème des violences faites aux femmes à la racine, assure la députée LFI Clémentine Autain à Causette. Ce qui fait cruellement défaut aujourd’hui, ce sont les moyens humains et financiers. » Cette enveloppe d’un milliard entièrement allouée à la lutte contre les violences faites aux femmes permettra d’agir à la fois sur « la prévention, l’éducation, la mise en sécurité des femmes et la justice ». Jean-Luc Mélenchon souhaite développer une formation continue pour les personnels de police et de justice, financer les associations et développer les dispositifs spéciaux destinés aux femmes victimes de violences avec par exemple la création de nouvelles places d’hébergement. Le candidat insoumis prévoit également de mettre en œuvre, dès 2022, un plan d’urgence de lutte contre les féminicides financé par cette enveloppe. Ce milliard d’euros est pour La France insoumise « un bon point de départ pour donner aux associations les moyens de leur action » mais c’est « un budget qui ne suffira pas », assure Clémentine Autain. Pour la députée insoumise, c’est « l’ensemble des ministères qui, par des mesures touchant aux conditions de travail, à l’éducation dès l’école, à la formation des personnels de la police et de la justice » accompagnent cet investissement.
Le milliard de Christiane Taubira
L'ancienne ministre de la Justice souhaite consacrer un « vrai » milliard d’euros à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles sans préciser dans son programme si cette enveloppe sera allouée à un ministère aux droits des femmes. Christiane Taubira entend augmenter les places d’hébergement dédiées aux femmes vulnérables, améliorer l’accompagnement des enfants victimes de violences, et mettre en place des interventions de sensibilisation au sein des établissements scolaires. Elle souhaite « sortir » de cette enveloppe les heures que les enseignants consacrent à l’égalité pour mettre l’accent sur les violences faites aux femmes. L’ancienne garde des sceaux a précisé que « pour répondre à peu près correctement aux besoins », le gouvernement devra construire au moins 15 000 places d’hébergement supplémentaires et au moins dans chaque département, un centre d’accueil sécurisé pour les mères avec enfants.
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