La Fédération des associations générales étudiantes (Fage) dévoile une enquête sur la précarité menstruelle chez les étudiantes. Grande oubliée des plans gouvernementaux, la tranche des 18–25 ans est pourtant parmi la plus touchée.
Devoir choisir entre un paquet de pâtes ou un paquet de serviettes hygiéniques, c’est le dilemme que doivent affronter chaque mois, en France, les 1,7 million de femmes concernées par la précarité menstruelle. Ce lundi 8 février, la Fédération des associations générales étudiantes (Fage) publie une enquête menée auprès des étudiant·es menstrué·es, afin de pouvoir quantifier le problème au sein de la population étudiante. Et « apporter des réponses adéquates à une situation souvent dramatique », explique Anna Prado de Oliveira, vice-présidente de la Fage, interviewée par Causette. Réalisée auprès de plus de six mille jeunes – dont une mince part d’hommes transgenres ou de personnes non binaires –, l’étude met en lumière des chiffres alarmants. Sur ce panel, 33 % déclarent avoir besoin d’aide pour se procurer des protections hygiéniques, quand 13 % reconnaissent devoir faire un choix entre nourriture et tampons ou serviettes. Un·e sur dix se résigne même à fabriquer soi-même ses protections, à base de chiffons ou de draps. Et un·e sur vingt adopte la « technique » du papier toilette. Sans protection qui assure une véritable efficacité, un·e étudiant·e sur dix a déjà manqué le travail ou les cours par peur de fuites. Une précarité qui va jusqu’à entraîner un mauvais suivi médical. D’après l’enquête, un·e étudiant·e menstrué·e sur quatre a déjà renoncé à un rendez-vous médical lié à ses menstruations pour des raisons financières.
Car avoir ses règles ce n’est pas seulement acheter des protections hygiéniques. C’est aussi se procurer des antidouleurs et consulter quand la dysménorrhée devient trop handicapante. Toujours d’après les estimations de l’enquête, c’est environ 20 euros par mois qu’il faut ajouter aux 7,50 euros (en moyenne) que coûtent déjà les tampons et serviettes. Avec cette étude, la Fage vient apporter une nouvelle pierre au travail associatif de fond, réalisé depuis plusieurs années, pour mettre sur le devant de la scène le sujet de la précarité menstruelle.
Les étudiant·es enfin dans les plans du gouvernement
Et cela marche. Le 15 décembre dernier, le gouvernement avait ainsi annoncé débloquer un budget de 5 millions d’euros pour 2021 « à l’attention des femmes incarcérées ainsi que des femmes et des filles en situation de précarité et de très grande précarité comme les sans-abri ou dans les collèges et les lycées en éducation prioritaire. » Problème : dans cette liste, les étudiant·es semblent avoir été oublié·es. Avec 20 % d’entre eux et elles vivant sous le seuil de pauvreté, les 18–25 ans sont pourtant parmi les plus pauvres du pays.
À la suite des nombreuses alertes des associations étudiantes, l’État semble aujourd’hui vouloir corriger le tir. « Un des publics visés, au niveau régional, ce sont les étudiantes, déclare à Causette une collaboratrice du ministère chargé de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances. Cela passera notamment par le Crous et les universités. Il s’agira de favoriser la coordination des dons, ainsi que des actions avec, par exemple, Marguerite et Cie qui met en place des distributeurs dans les établissements scolaires. Un comité de pilotage national sera lancé normalement à la fin du premier trimestre, peut-être un peu avant. Et les appels à projets régionaux seront lancés dans la foulée. »
Lire aussi : Au lycée Gutenberg de Créteil, un distributeur gratuit de protections hygiéniques bio
Certaines structures n'ont pas attendu avant de proposer une aide à leurs étudiant·es les plus précaires. L'école d'ingénieur·es EPF – qui compte 35 % de filles – a mis en place depuis janvier des distributeurs de protections hygiéniques en coton bio dans les toilettes de ses trois campus.
En attendant que ce type d'initiatives se popularisent, les associations continuent de se mobiliser. Elles organisent, notamment au sein des épiceries sociales et solidaires Agoraé, des distributions régulières de protections périodiques aux étudiant·es bénéficiaires afin de pallier le manque de dispositifs les concernant.