Le ministre délégué chargé du Numérique, Jean-Noël Barrot, a annoncé dimanche vouloir imposer une certification de l’âge qui doit passer par une attestation numérique dès le mois de septembre.
L’année 2023 va marquer « la fin de l’accès aux sites pornographiques pour nos enfants », selon le ministre délégué chargé du Numérique, Jean-Noël Barrot. Le gouvernement va en effet mettre en place un dispositif de vérification de l’âge afin de bloquer efficacement l’accès aux sites pornographiques aux mineur·es, a annoncé dimanche 5 février le ministre dans une interview accordée au Parisien.
La certification de l’âge des internautes passera par une « attestation numérique » dont les détails doivent être présentés dans la semaine par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) et l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). D’après Le Parisien, le dispositif entrera en vigueur dès le mois de septembre. « Un utilisateur d’un site pornographique, lorsqu’il souhaitera y accéder, devra certifier de sa majorité en cliquant sur cette attestation numérique, a expliqué le ministre. Cela fonctionnera un peu comme le contrôle demandé par votre banque lorsque vous réalisez un achat en ligne, sauf que ce certificat de majorité sera anonyme ».
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En mettant en place ce nouveau dispositif, « la France sera le premier pays du monde à proposer une solution comme celle-là », a déclaré le ministre délégué chargé du Numérique dans les colonnes du journal. Selon un rapport sénatorial sur le porno publié en septembre 2022, 2,3 millions de mineur·es se rendent sur des sites pornographiques chaque mois en France. Parmi eux·elles, deux tiers ont moins de quinze ans. « Cette solution technique sur laquelle nous travaillons pourra être utilisée pour faire respecter les limites d’âge qui existent dans notre droit, mais qui ne sont pas suffisamment respectées en ligne », a‑t-il souligné ajoutant que « des opérateurs télécoms, qui disposent de l’âge de leurs clients, pourraient par exemple être dans la boucle ».
Tous les sites pornographiques accessibles depuis la France « devront s’y conformer sous peine de voir la diffusion interdite sur le territoire national », a encore indiqué le ministre au Parisien. Pour être appliquée, la mesure – qui nécessiterait un simple décret à en croire l'article du quotidien – devra prochainement obtenir les validations de la Commission européenne et du Conseil d’État.
Utilisation d'une carte bleue
Actuellement, les sites pornographiques accessibles en France demandent à l'internaute une simple vérification de l'âge en entrant une date de naissance, ou en appuyant sur un encadré indiquant qu'il·elle est majeur·e. Or, depuis la loi du 30 juillet 2020 contre les violences conjugales, les éditeurs de sites présentant des contenus pornographiques accessibles en France ne peuvent plus s'en contenter.
Le pouvoir a aussi été donné à l’Arcom de mettre en demeure les contrevenants et, dans le cas où ces derniers ne se mettent pas en conformité, de demander leur blocage par la justice. Mais concrètement, les choses sont plus compliquées.
Face à l'inaction de ces sites de proposer un système efficace pour vérifier l’âge des internautes, le gouvernement avait un temps pensé à imposer l’enregistrement d’une carte bleue pour accéder à du contenu pornographique. Une vérification finalement jugée « imparfaite » par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) puisqu’une carte bleue peut facilement être octroyée à un·e mineur·e ou être subtilisée par un enfant à ses parents pour contourner le filtrage.
La Cour de cassation rejette la QPC de Pornhub
Cinq des sites pornographiques les plus consultés en France ont ainsi été mis en demeure par l’Arcom en décembre 2021. Devant leur inaction, le gendarme de l’audiovisuel a demandé, en mars 2022, au tribunal judiciaire de Paris de bloquer l’accès à ces sites. Depuis, le volet judiciaire avance difficilement. Le 5 janvier dernier, la Cour de cassation a refusé d’adresser au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) de la plateforme pornographique Pornhub, menacée de blocage par la justice. Dans son arrêt, la Cour de cassation a notamment expliqué que la « question posée ne présente pas un caractère sérieux ».
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