L'arrêt de la plus haute juridiction française, rendu le 8 mars dernier, concernait une affaire de 2019 dans laquelle une salariée avait poursuivi son entreprise devant le tribunal des prud'hommes pour discrimination salariale.
C'est une décision rendue à la date de la Journée internationale des droits des femmes, passée inaperçue jusque là mais qui pourrait faire jurisprudence dans d'autres situations similaires : oui, une employée peut exiger de son entreprise qu'elle lui fournisse les bulletins de salaires de ses collègues masculins si elle soupçonne une discrimination salariale en raison de son genre, a jugé la Cour de cassation. L'information a été rapportée par l'AFP à la mi-mai, comme dans cet article de 20 Minutes.
La chambre sociale de la plus haute juridiction française avait été saisie par un employeur, dans le cadre d'un conflit avec une ex-salariée. Celle-ci, dont Capital explique qu'elle travaillait dans le domaine de la finance, avait porté plainte aux prud'hommes pour discrimination salariale, soupçonnant avoir été moins bien rémunérée que ses confrères à poste et expérience équivalents. Pour établir la vérité, la requérante avait exigé que le service des ressources humaines de ancien employeur transmette les fiches de salaire de ses ex-collègues, ce que l'entreprise refusait, estimant que cette communication porterait « atteinte à leur vie privée ».
La Cour de cassation a donc rejeté le pourvoi de l'entreprise. Selon 20 Minutes, la communication de ces bulletins de paie était « indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi », à savoir « la défense de l’intérêt légitime de la salariée à l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail ». Dans le détail, « les bulletins communiqués doivent occulter les données personnelles à l’exception des noms et prénoms, de la classification conventionnelle, de la rémunération mensuelle détaillée et de la rémunération brute totale cumulée par année civile », rapporte encore 20 Minutes.
D'autres demandes de salariées dans des cas similaires pourront donc désormais s'appuyer sur cet arrêt de la Cour de cassation. En France en 2021, le taux moyen d'inégalités salariales entre les femmes et les hommes s'élève encore à 15,5% en équivalent temps plein (EQTP), selon l'Insee. Cet écart se creuse à 24,4% si l'on compare les salaires moyens des hommes à ceux des femmes, sans pondérer par le volume horaire. En ce qui concerne la statistique à poste comparable – comme dans le cas de l'affaire citée ci-dessus – la différence de salaire en EQTP entre les femmes et les hommes demeure de 4,3 %, précise l'Insee.
Lire aussi l Les Françaises travaillent symboliquement pour des prunes à partir de ce 4 novembre 2022