Mardi, le ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye a annoncé qu’en cas de harcèlement scolaire en école primaire, il souhaite rendre possible l’exclusion des élèves harceleur·ses. Une proposition reçue avec réserve par les associations, qui demandent en priorité plus de moyens.
Au micro de RTL, mardi 11 avril, le ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye, a annoncé vouloir modifier le code de l’éducation pour protéger les enfants harcelé·es dans les écoles primaires. Le ministre a proposé « un changement réglementaire » pour que, « en dernier recours », ce soit l’élève harceleur·se qui soit transféré·e dans un autre établissement et non l’élève harcelé·e.
« Dans les écoles primaires, il n’y a pas de conseil de discipline, et dans le cas où il faut séparer l’élève harceleur de l’élève harcelé, on en arrive à une situation qui n’est pas normale, par laquelle c’est l’élève harcelé qui doit partir », a expliqué le ministre sur RTL. Le phénomène touche d'ailleurs majoritairement les élèves du primaire. Selon la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (Depp), le service statistique de l’Education nationale, le harcèlement touche 12 % des élèves du primaire, dont 5 % « de manière sévère à très sévère », a indiqué Libération. Au collège et au lycée, cela concerne respectivement 5,6 % et plus de 4 % des élèves.
Une annonce qui a suscité la réaction de la sénatrice de Saône-et-Loire, Les Républicains (LR), Marie Mercier.« Je me réjouis de voir que le ministre adhère à cette idée de bon sens, mais il a ni plus ni moins pompé ce que je propose », a‑t-elle déclaré à Libération. Sa proposition de loi était justement débattue au Sénat mardi. Déposée le 21 février, elle visait aussi à ce que les harceleur·ses changent d’établissement « quand il n’y a plus d’autres solutions pour protéger la victime et faire comprendre au harceleur, qu’il faut aussi accompagner, qu’il n’a pas bien agi pour ne pas l’enfermer dans un sentiment d’impunité », a‑t-elle affirmé au quotidien.
Une proposition de loi débattue à la suite de l’affaire du petit Maël. Début mars, cet élève de dix ans de Saône-et-Loire a été déscolarisé trois mois par ses parents après avoir déclaré qu’il voulait « mourir pour que ça s’arrête », rapporte Le Parisien. Il avait fini par reprendre le chemin de l'école après que les parents du harceleur ont décidé de changer leur enfant d'établissement. Pour le père de Maël, la proposition du ministre est « un petit pas en avant parce que ce n’est pas à la victime de partir ». Mais il met en garde, dans les colonnes de Libération, qu' « il ne faut pas que le harcèlement se poursuive dans une autre école ».
« Déplacer un enfant harceleur ne résout rien »
Les associations de parents d’élèves sont, elles, loin de se réjouir de cette annonce. « C’est vrai qu’il y avait une injustice profonde à ce que ce soit l’élève harcelé qui doive quitter l’école, mais il faudra veiller à ce que ce type de sanction ne soit utilisée qu’en toute dernière extrémité », prévient Laurence Zameczkowski, vice-présidente de la Fédération des Parents d'Élèves de l'Enseignement Public (PEEP), au Parisien. « On parle d’enfants qui n’ont qu’entre 6 et 11 ans. Se retrouver dès cet âge-là avec une étiquette de harceleur collé dans le dos, cela peut être aussi dévastateur », a‑t-elle continué auprès du quotidien.
De son côté, la Fédération des Conseils de Parents d'Elèves (FCPE) pointe le fait que « déplacer un enfant harceleur ne résout rien en soi », indique Le Parisien. « Si l’enfant ne bénéficie pas ensuite d’une réponse éducative structurante qui l’aide à grandir, on n’aura fait que déplacer le problème », tacle Grégoire Ensel, son président, dans le quotidien. Il note par ailleurs que la mesure annoncée par le ministre est floue. « Qui va être habilité à prononcer cette mesure d’exclusion ? Le directeur d’école ou bien les services locaux d’inspection ? Les parents pourront-ils faire appel comme dans le second degré ? », a‑t-il déclaré au Parisien.
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