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Photo : Olga Kononenko / Unsplash

Fin de vie : après l’arbitrage d’Emmanuel Macron, le che­min légis­la­tif vers l’“aide à mou­rir” s’annonce tortueux

“Possible loi de liber­té ultime” ou “diver­sion” voire “trom­pe­rie” ? Le pro­jet de loi sur la fin de vie esquis­sé par Emmanuel Macron a été salué, lun­di, par les partisan·nes d’une “aide active à mou­rir”, mais a indi­gné certain·es soignant·es, l’Église, la droite et l’extrême droite.

Après un long che­mi­ne­ment, le pré­sident de la République a livré, dimanche, dans La Croix et Libération, ses arbi­trages pour un “modèle fran­çais de la fin de vie” : une “aide à mou­rir” qui per­met­tra à certain·es patient·es, selon des “condi­tions strictes”, de rece­voir une “sub­stance létale”. Le texte, qui tra­dui­ra une pro­messe de cam­pagne, inclu­ra aus­si des mesures pour ren­for­cer les soins pal­lia­tifs, de l’avis géné­ral insuffisants.

Le pro­jet de loi sera exa­mi­né à par­tir du 27 mai à l’Assemblée natio­nale et sera le texte phare du calen­drier par­le­men­taire des pro­chains mois, dévoi­lé lun­di deux mois après la nomi­na­tion de Gabriel Attal à Matignon. Le défi est “de trou­ver le moment car c’est un sujet qui va divi­ser”, confiait en pri­vé un ministre il y a quelques mois. Comme atten­du, les cli­vages ont été ravi­vés dès dimanche soir.

Le "sou­la­ge­ment" domi­nait par­mi les défenseur·es d'une évo­lu­tion de la loi Claeys-​Leonetti, comme l'a expri­mé lun­di le pré­sident de l'Association pour le droit de mou­rir dans la digni­té (ADMD), Jonathan Denis. S'il a salué "une avan­cée", il s'est aus­si inquié­té d'une "inap­pli­ca­bi­li­té" vu les mul­tiples cri­tères pour l'aide active à mou­rir. "J’appelle les par­le­men­taires à l'amender" pour évi­ter de "faire voter une loi qui condam­ne­rait encore des Français à par­tir en Suisse ou en Belgique", a‑t-​il ajouté.

À l’inverse, des soignant·es, l’Église catho­lique ou des voix de droite et d’extrême droite ont vive­ment pro­tes­té. Exprimant “conster­na­tion, colère et tris­tesse”, des asso­cia­tions de soignant·es, notam­ment l’influente Société fran­çaise d’accompagnement et de soins pal­lia­tifs (Sfap), ont jugé qu’“avec une grande vio­lence, le chef de l’État annonce un sys­tème bien éloi­gné des besoins des patients et des réa­li­tés quo­ti­diennes des soi­gnants, avec en pers­pec­tive de graves consé­quences sur la rela­tion de soin”. “Appeler ‘loi de fra­ter­ni­té’ un texte qui ouvre à la fois le sui­cide assis­té et l’euthanasie est une trom­pe­rie”, a esti­mé le pré­sident de la Conférence des évêques de France, éric de Moulins-​Beaufort, convain­cu que cela “inflé­chi­ra tout notre sys­tème de san­té vers la mort comme solution”.

"Liberté de vote"

Droite et extrême droite sont aus­si mon­tées au cré­neau. À l’approche des euro­péennes, “per­sonne n’est dupe du moment”, a lan­cé la tête de liste de LR au scru­tin, François-​Xavier Bellamy. Emmanuel Macron “a déci­dé de se réfu­gier dans les ques­tions de socié­té”, a‑t-​il lan­cé, sans se pro­non­cer sur le débat “infi­ni­ment com­plexe” de la fin de vie. Même angle d’attaque du RN. Son porte-​parole, Laurent Jacobelli, a jugé que “le pré­sident de la République fait un peu diver­sion en pro­po­sant des débats socié­taux” alors que “les pré­oc­cu­pa­tions des Français, c’est le pou­voir d’achat, la sécu­ri­té et l’immigration”, “le pré­sident et le gou­ver­ne­ment ont failli”.

Le che­min reste long avant une loi, pro­ba­ble­ment pas avant 2025. Le pro­jet de loi doit être trans­mis d’ici à dix jours au conseil d’État. Après son pas­sage à l’Assemblée, il devrait arri­ver au Sénat “après l’été”, a pré­ci­sé la ministre char­gée des Relations avec le Parlement, Marie Lebec. Et il n’y aura pas de pro­cé­dure accé­lé­rée, donc au moins deux lec­tures dans chaque chambre.

Face aux résis­tances atten­dues, le Premier ministre a appe­lé, lun­di, les par­le­men­taires à “un débat apai­sé, éclai­ré, res­pec­tueux des posi­tions de cha­cun”, rele­vant que cette évo­lu­tion de la loi est “atten­due de longue date” et consti­tue “un pro­grès”. Comme c’est géné­ra­le­ment l’usage sur les sujets socié­taux, les groupes par­le­men­taires ne don­ne­ront pas de consigne de vote. C’est un “sujet intime” qui “trans­cende les mou­ve­ments poli­tiques”, selon le chef de file des dépu­tés Renaissance, Sylvain Maillard, pré­ci­sant qu’“il y aura une liber­té de vote” dans son groupe. Les cen­tristes au Sénat vote­ront aus­si “en leur âme et conscience”, selon leur chef, Hervé Marseille. Si la voie est étroite, cette réforme “peut pas­ser” même à la chambre haute, a‑t-​il pro­nos­ti­qué, car “ça cor­res­pond à ce que beau­coup de groupes de gauche sou­hai­taient et les autres groupes sont par­ta­gés”. “À l’Assemblée natio­nale, il y aura une courte majo­ri­té pour le voter”, anti­ci­pait avant Noël un membre du gouvernement.

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