Le site d’investigation en ligne Mediapart a dévoilé mardi un reportage vidéo, fruit de plusieurs mois d’enquête, au cours duquel huit femmes accusent Éric Zemmour de violences sexuelles et de comportement inappropriés.
« On voit bien que pour lui, les femmes ne sont pas des hommes comme les autres, ce sont des sous-hommes, des objets. » Mardi, pour la Journée internationale des droits des femmes, Mediapart a mis en ligne un reportage de plus de trente-cinq minutes, au cours duquel huit femmes accusent le candidat à l’élection présidentielle Éric Zemmour de violences sexuelles et de comportements inappropriés. La vidéo comprend les témoignages face caméra de cinq femmes, parfois anonymisées, et reprend les récits de trois autres victimes présumées, confiés au site d’investigation en ligne lors de deux précédentes enquêtes en avril et mai 2021. Plusieurs témoins accréditent également certains faits présumés, qui s’étalent de 1999 à 2019.
Claire, une ingénieure et ancienne stagiaire au Figaro, ouvre ce reportage. La jeune femme de 37 ans témoigne pour la première fois publiquement. En 2002, tout juste majeure et le bac en poche, elle réalise un stage au Figaro grâce à une amie de ses parents, journaliste politique au quotidien. Quelques jours après son arrivée, elle raconte qu’Éric Zemmour fait alors son entrée à la rédaction. Il l’appelle à son bureau, lui expliquant qu’il rencontre un problème avec son ordinateur et qu’elle saura probablement l’aider comme elle est jeune. « Il m’invite à m’accroupir à côté de lui, se souvient-elle. À ce moment-là, j’ai la tête à hauteur de son épaule, je suis plus basse que lui. Je commence à jouer avec la souris pour essayer de régler son problème, et là, je sens sa main dans mon dos qui fait des allers-retours de bas en haut. Je lui demande ce qu’il fait et il me répond : “Tu es stagiaire non ? Les stagiaires, ça sert à quoi à ton avis ?” »
Claire a rapidement fait part de cet épisode à la personne qui s'occupe d'elle pendant son stage, Pascale Sauvage. Le média d'investigation a retrouvé cette dernière en Bretagne. Elle n'est plus journaliste au Figaro mais y a travaillé pendant huit ans, occupant un bureau voisin de celui d'Éric Zemmour. Elle confie se souvenir du malaise de sa stagiaire et être directement allé voir le polémiste, qui a minimisé la situation en ces termes : « Les stagiaires, c’est fait pour faire des pipes et du café. » « Je suis repartie de là avec l'idée qu'Éric faisait ça et que c'était normal », résume de son côté l'ancienne stagiaire.
« Indigne » de la fonction de président
Comme elle, Séverine et Anne (le prénom a été changé), une ancienne stagiaire du Figaro et une journaliste, ont également témoigné auprès de Mediapart. La première aurait été embrassée de force dans l'ascenseur du journal. La deuxième aurait aussi été embrassée, sans son consentement, à deux reprises lors d'une rencontre dans un café à côté de la rédaction.
Les témoignages d'une attachée presse, d'une hôtesse d'accueil à I‑télé (l'ancien nom de la chaîne CNews), d'une maquilleuse de l'émission Ça se dispute, où a officié Éric Zemmour de 2003 à 2014, de la journaliste belge Aurore Van Opstal et de l'élue municipale d'Aix-en-Provence Gaëlle Lenfant complètent les récits récoltés par différents journalistes du média.
Contacté, le candidat d’extrême droite n’a pas répondu aux sollicitations de Mediapart. Son entourage a, à sa place, accusé Mediapart de vouloir « faire un coup le jour de la Journée de la femme en recyclant des témoignages déjà sortis l’an dernier ». Lors de l’émission Élysée 2022 sur France 2, le 9 décembre dernier, Éric Zemmour avait affirmé qu’il n’avait « pas à répondre », car il s’agit de « la vie privée ». « Je ne parle pas de ma vie privée. Ces femmes-là m’accusent sans aucune preuve, c’est parole contre parole », avait-il ajouté. Pour Anne, le journaliste candidat à la présidentielle avec son parti Reconquête « est indigne de cette fonction » au vu des accusations dévoilées.