Le procès des ancien·nes collégien·nes du Bois d’Aulne,à Conflans-Sainte-Honorine, démarre aujourd’hui, lundi 27 novembre, pour “association de malfaiteurs” dans l’affaire de l’assassinat du professeur Samuel Paty par un jeune jihadiste. Le ministère de l’Éducation nationale se constitue partie civile, a annoncé le ministre Gabriel Attal.
“Après mûre réflexion, j’ai décidé que le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse se constituerait partie civile dans le procès de ces élèves”, a déclaré le ministre Gabriel Attal dans un communiqué publié ce lundi, peu avant l’ouverture du procès à huis clos de six mineur·es. Cinq ancien·nes élèves du collège du Bois d’Aulne, à Conflans-Sainte-Honorine, comparaissent devant le tribunal pour enfants de Paris pour “association de malfaiteurs” et une autre pour “dénonciation calomnieuse”.
“Cela me semble indispensable pour réaffirmer avec force notre volonté de défendre les valeurs de la République que Samuel Paty incarnait. Mais aussi pour exprimer mon soutien indéfectible à l’ensemble du corps enseignant, profondément meurtri par l’assassinat barbare de leur collègue”, ajoute-t-il, rappelant que “cet acte tragique a créé un traumatisme durable chez de nombreux professeurs”.
“Je veux leur dire que je mesure pleinement le choc qu’ils ont subi et que je me tiens à leurs côtés en ces moments douloureux et en toute circonstance” et “je pense évidemment à la famille de Samuel Paty, comme à celle de Dominique Bernard”, poignardé à mort en octobre dernier devant son lycée à Arras par un ancien élève radicalisé.
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Les jeunes prévenu·es sont arrivé·es au tribunal peu avant 9 heures, le visage camouflé sous leurs manteaux, certain·es portant des lunettes de soleil ou un masque chirurgical, accompagné·es de leurs parents et de leurs avocat·es. Avant eux·elles, on avait vu entrer dans la salle certain·es proches de Samuel Paty, dont ses parents, visages fermés, ainsi qu’une dizaine d’ancien·nes collègues du professeur, qui veulent se constituer partie civile au procès, malgré l’opposition du parquet national antiterroriste. La question doit être abordée dès le début de l’audience.
Cinq des adolescent·es, à l’époque âgé·es de 14 et 15 ans, sont jugé·s pour association de malfaiteurs en vue de préparer des violences aggravées. Ils·elles sont accusé·es d’avoir surveillé les abords du collège et désigné Samuel Paty à l’assaillant, contre rémunération. Une sixième adolescente, âgée de 13 ans au moment des faits, comparaît pour dénonciation calomnieuse. Cette collégienne avait, à tort, soutenu que M. Paty avait demandé aux élèves musulman·es de la classe de se signaler et de sortir de la classe avant de montrer les caricatures de Mahomet. Elle n’avait en réalité pas assisté à ce cours. Les adolescent·es, aujourd’hui lycéen·nes, encourent deux ans et demi d’emprisonnement.
“Comprendre les véritables causes qui ont mené ces collégiens sur le chemin de l’irréparable”
La défense va sans surprise plaider “l’erreur de jeunesse”, mais ce procès est “très attendu pour qui cherche à comprendre les véritables causes qui ont mené ces collégiens sur le chemin de l’irréparable”, a déclaré devant la salle avant l’ouverture des débats, Me Louis Cailliez, avocat de Mickaëlle Paty, l’une des sœurs du professeur assassiné.
L’enquête avait retracé comment, en dix jours, le piège s’était refermé sur Samuel Paty : du mensonge de la collégienne aux attaques en ligne, jusqu’à l’arrivée de l’assaillant devant le collège le 16 octobre, où il avait donné 300 euros à des collégien·nes pour identifier M. Paty, qu’il voulait “filmer en train de s’excuser”. Lors d’auditions où ils·elles se sont effondré·es en larmes, ces collégiens ont juré avoir imaginé que le professeur se ferait tout au plus “afficher sur les réseaux”, peut-être “humilier”, “taper”… mais “jamais” que ça irait “jusqu’à la mort”.
Le procès est prévu jusqu’au 8 décembre et se tient sous strict huis clos étant donné le jeune âge des prévenu·es à l’époque des faits. Seules les personnes directement concernées par le dossier peuvent assister à l’audience. La presse n’a pas accès à la salle, gardée par des policier·ères, et il est interdit de rapporter ce qu’il se dit pendant les débats, même via la parole des avocat·es. Un deuxième procès, pour juger huit adultes, aura lieu devant la cour d’assises spéciale de Paris fin 2024.