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Rabat, Maroc. ©YoTuT/Wikipedia Commons

Maroc : les peines alour­dies en appel pour les trois hommes accu­sés de viols à répé­ti­tion sur une fillette

Les trois hommes condam­nés en pre­mière ins­tance à des peines légères – allant jusqu’à deux ans de pri­son ferme – ont éco­pé en appel, ven­dre­di 14 avril, à vingt ans de pri­son ferme pour le prin­ci­pal accu­sé et dix ans pour les deux autres. 

En pre­mière ins­tance, la clé­mence de la jus­tice avait indi­gné l’opinion maro­caine. Vendredi 14 avril, la cour d’appel de Rabat a alour­di les peines des trois hommes accu­sés de viols à répé­ti­tion sur une fillette. L’un des accu­sés a été condam­né à vingt ans de pri­son ferme, les deux autres à dix ans de réclu­sion ferme cha­cun. Leur condam­na­tion fin mars à des peines plus légères – allant jusqu’à deux ans de pri­son ferme –avait sus­ci­té l’indignation, ce qui avait pous­sé le minis­tère public à faire appel. 

« Nous sommes satis­faits du ver­dict qui a ren­du jus­tice à la vic­time, ceci dit nous n’avons pas com­pris pour­quoi deux accu­sés ont éco­pé de 10 ans cha­cun seule­ment », a réagi l’avocat de la famille de la vic­time, Abdelfattah Zahrach, auprès de l’Agence France Presse (AFP), rap­porte fran­cein­fo. Comme en pre­mière ins­tance, les trois hommes étaient pour­sui­vis pour « détour­ne­ment de mineure » et « atten­tat à la pudeur sur mineure avec vio­lence ». Selon le Code pénal maro­cain, ils encou­raient jusqu’à trente ans de pri­son ferme. Le pro­cu­reur du roi avait d’ailleurs requis cette peine à l’encontre des accu­sés qui ont nié en bloc les accu­sa­tions devant la cour. La par­tie civile avait deman­dé au début de l’audience jeu­di que le « viol » soit ajou­té aux chefs d’accusations. Une requête reje­tée par le juge. 

Lire aus­si I Au Maroc, le pro­cès en appel des trois vio­leurs d'une enfant de onze ans calmera-​t-​il l'indignation ?

Pourvoi en cassation 

L’avocat de la famille envi­sage désor­mais le pour­voi en cas­sa­tion. « Nous allons nous pour­voir en cas­sa­tion après consul­ta­tion avec la famille de la vic­time, car nous ne com­pre­nons pas pour­quoi les deux accu­sés n’ont été condam­nés qu’a 10 ans de pri­son alors qu’ils méritent tous une lourde peine compte tenu de la mons­truo­si­té des actes com­mis », a pré­ci­sé Abdelfattah Zahrach auprès de l'AFP, rap­porte la chaîne de télé­vi­sion Africanews.

Sanaa, onze ans au moment des faits, a « subi des viols à répé­ti­tion sous la menace » pen­dant des mois en 2021, par trois voi­sins de sa ville de Tiflet, située au nord-​ouest du Maroc entre Rabat et Meknès. Les trois hommes l’ont mena­cée de tuer sa famille si elle par­lait. C’est la gros­sesse de Sanaa, dont elle s’est ren­du compte presque au terme, engen­drée par les mul­tiples viols, qui a mis un terme aux vio­lences sexuelles, a déclen­ché les pour­suites en jus­tice et a per­mis l’arrestation des hommes. Quinze jours après, Sanaa accou­chait d’un petit gar­çon. Le prin­ci­pal vio­leur et géni­teur de l’enfant a été iden­ti­fié par des ana­lyses ADN. 

La fillette a depuis été prise en charge par l’Institut natio­nal de soli­da­ri­té avec les femmes en détresse (Insaf). « Sanaa recom­mence à sou­rire peu à peu mais elle reste cho­quée », a décla­ré à l’AFP la secré­taire géné­rale de l’Insaf après le pro­cès en appel, rap­porte Le Monde. Aidée finan­ciè­re­ment par l’Insaf, elle a com­men­cé une for­ma­tion de coif­feuse à Rabat. 

L'espoir d'une jurisprudence

Le ver­dict en pre­mière ins­tance avait pro­vo­qué une vague de colère et d’écœurement chez les asso­cia­tions maro­caines de défense des droits humains. Ces der­nières ont donc vécu les peines pro­non­cées en appel comme un sou­la­ge­ment. « C’est une grande avan­cée par rap­port à la déci­sion de pre­mière ins­tance. Le mes­sage est quand même pas­sé pour dire qu’au Maroc, on ne viole pas des petites filles maro­caines dans l’impunité », a obser­vé Ghizlane Mamouni, pré­si­dente de l’association fémi­niste maro­caine Kif Mama Kif Baba qui lutte contre les inéga­li­tés de genre, auprès de RFI

Les asso­cia­tions espèrent désor­mais que cette affaire fera juris­pru­dence dans un pays où les auteur·trices de vio­lences faites aux femmes et aux filles béné­fi­cient sou­vent d’une jus­tice clé­mente. Le Monde rap­pelle ain­si que, selon une étude publiée en 2020 par le col­lec­tif maro­cain Masaktach qui dénonce les vio­lences faites aux femmes, 80 % des pré­ve­nus condam­nés pour viol (sur la base de 1 169 pro­cès) ont éco­pé de peines infé­rieures à celles pré­vues par le Code pénal maro­cain. « On espère que cette affaire sera un exemple pour d’autres pro­cès et j’espère que les magis­trats pren­dront en consi­dé­ra­tion les dou­leurs et la souf­france des vic­times », a affir­mé Amina Khalid, secré­taire géné­rale de l’Insaf à RFI. 

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