Les ultraconservateur·rices ont réussi à faire retirer des magasins Target certains produits célébrant le mois des fiertés LGBTQI et agitent le fantasme d'un marketing orienté sur les enfants.
La panique morale autour de tshirts affichant des messages du type « Cure transphobia, not transpeople » (« Soignez la transphobie, pas les personnes transgenre ») prend une triste tournure aux États-Unis : la chaîne de supermarchés Target a annoncé mercredi 24 mai le retrait des rayons comme de son site internet de plusieurs produits mis en avant pour célébrer le Pride mounth (mois des fiertés), qui se tient tout au long du mois de juin dans le pays.
En cause : des menaces à l'encontre de ses employé·es agitées par l'extrême droite américaine, montrant là l'expression décomplexée d'une haine homophobe et transphobe. « Depuis le lancement de la collection de cette année, nous avons été informés de menaces affectant la sécurité et le bien-être de nos collaborateurs, a indiqué Target dans un communiqué. Compte tenu de ce contexte instable, nous allons procéder à des changements, notamment au retrait des articles ayant suscité les comportements les plus agressifs. »
Selon CNN, ce sont notamment les produits de la marque britannique Abprallen qui ont été retirés de la vente. Abprallen propose des tshirts ou tote-bag aux messages gentiment provocateurs (« God loves us. Just ask her » (« Dieu nous aime, tu peux lui demander [à elle] ») ; « Satan respects pronouns » (« Satan respecte les pronoms », en référence à l'identification de genre des personnes queer)), accusés d'être « sataniques » par certain·es ultraconserveteur·rices américain·es. Ainsi, l'éditorialiste trumpiste Candace Owens du média Daily Wire a assuré dans une chronique vidéo : « Target a embauché un designer satanique. Je ne plaisante pas. Ce designer s’identifie vraiment comme un sataniste. » Par la suite, elle assimile la transidentité à une culture satanique et perverse, détaille le Huffington Post et assène : « N'achetez pas chez Target, ou alors vous êtes gay et vous êtes un pervers. »
Interrogé par CNN, le fondateur de la marque, Erik Carnell, a expliqué que cette fin de collaboration met fin à « la plus grande opportunité de sa carrière ». Le jeune homme trans affirme avoir lui aussi reçu des menaces de mort. « Le niveau de backlash auquel je fais face est accablant, a‑t-il témoigné. J'espère seulement que j'entraperçois le début de la fin des messages et de l'agressivité que je reçois. »
Fake news sur les enfants
Cette vague de haine se formalise aussi avec le succès viral du clip Boycott Target du rappeur Forgiato Blow, a alerté l'observateur français des mouvements complotistes et de l'extrême droite Tristan Mendès-France dans un thread sur Twitter. Cet artiste grand fan de Trump – jusqu'à avoir produit une chanson intitulée Trump's nephew – déambule dans le clip de Boycott Target dans des rayons du magasin en chantant « Why is Target targetting our kids ? » (« Pourquoi Target cible nos enfants ? »), bien que les produits présentés dans le cadre de cette opération commerciale du mois des fiertés ne s'adressent pas particulièrement aux enfants. L'agitation de ce fantasme – les personnes LGBTQ chercheraient à « convertir » les mineur·es, notamment sur les questions de genre – est de plus en plus prisée par l'extrême droite homophobe et transphobe, aux États-Unis comme en France. On a ainsi pu le voir dernièrement avec l'annulation de lectures données par des Drag Queens à l'adresse du jeune public dans une bibliothèque toulousaine.
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