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Marina Ovsiannikova sur France 2 le 14 mars 2022. © Capture d'écran France 2

La jour­na­liste russe anti-​guerre Marina Ovsiannikova écope d’une amende pour « dis­cré­di­ta­tion » des forces armées

La jour­na­liste Marina Ovsiannikova, célèbre pour avoir inter­rom­pu le jour­nal d’une chaîne natio­nale russe avec une affiche contre l’offensive en Ukraine, a été accu­sée de dis­cré­di­ter l’armée russe et devra donc payer une amende de 800€. Une condam­na­tion légère qui en inter­roge certain·es.

Pour la deuxième fois en l’espace de deux mois, Marina Ovsiannikova, la fameuse jour­na­liste russe qui avait sur­gi sur le pla­teau d’une chaîne pro-​Kremlin en bran­dis­sant une pan­carte pour dénon­cer la guerre en Ukraine, a été condam­née à une amende sym­bo­lique de 50 000 roubles, soit 800€, ce jeu­di 28 juillet. Elle s’exposait pour­tant à quinze ans d’emprisonnement.

Un tri­bu­nal à Moscou a éta­bli cette peine pour cause de « dis­cré­di­ta­tion » des forces armées russes, une infrac­tion créée par le gou­ver­ne­ment de Vladimir Poutine au début du mois de mars pour répri­mer les cri­tiques et l’opposition. Comme le rap­porte l’AFP et Le Monde, sa prise de parole le 13 juillet der­nier, lors du pro­cès d’un oppo­sant poli­tique, Ilia Iachine, était dans le viseur de la jus­tice. Elle s’était dépla­cée pour expri­mer son sou­tien au dépu­té, arrê­té pour « dif­fu­sion de fausses infor­ma­tions » sur l'armée et condam­née à deux mois de déten­tion provisoire. 

A cette occa­sion, la jour­na­liste de 44 ans avait qua­li­fié l’opération en Ukraine de « crime » auprès des jour­na­listes, ce qui lui a été repro­ché lors de son propre pro­cès. Quatre jours plus tard, le 17 juillet, Marina Ovsiannikova avait été briè­ve­ment inter­pel­lée, puis relâ­chée dans la jour­née, mais elle ris­quait bien une amende « équi­va­lente à 600–900 dol­lars », comme l’avait sou­li­gné son avo­cat à France Info

Lire aus­si : La jour­na­liste russe anti-​guerre Marina Ovsyannikova relâ­chée après une brève interpellation

Des accu­sa­tions « absurdes »

A la sor­tie de l’audience, ce jeu­di 28 juillet, Marina Ovsiannikova a décla­ré que « toutes ces accu­sa­tions étaient absurdes » et que ce pro­cès avait « été orga­ni­sé pour [lui] faire peur, pour agir contre ceux qui sont contre cette guerre », raconte Libération. Elle a éga­le­ment dénon­cé les chiffres offi­ciels pour sou­te­nir ses pro­pos : « Les son­dages qu’on nous montre disent que 80 % de la popu­la­tion sou­tient Poutine et sou­tient l’opération spé­ciale. C’est évi­dem­ment faux. Qui ose dire à Moscou qu’il ne sou­tient pas l’opération spéciale ? »

Marina Ovsiannikova est loin d’en être à sa pre­mière action anti-​guerre. Mi-​mars, la jour­na­liste deve­nait mon­dia­le­ment connue pour avoir bran­di une pan­carte cri­ti­quant l’offensive russe en Ukraine en plein JT sur Pervy Kanal, une chaîne de télé­vi­sion pro-​Poutine pour laquelle elle tra­vaillait. Un acte qui lui avait valu 30 000 roubles (243 euros) d’amende à l’époque. 

Lire aus­si : « Ne croyez pas la pro­pa­gande » : le geste héroïque de Marina Ovsyannikova en plein jour­nal télé­vi­sé russe

Le 15 juillet, elle publiait éga­le­ment sur Telegram une vidéo d’elle expo­sant une nou­velle pan­carte devant le Kremlin avec l’inscription : « Poutine est un assas­sin. Ses sol­dats sont des fas­cistes. 352 enfants sont morts. Combien d’enfants doivent encore mou­rir pour y mettre fin ? » Pour ces faits pré­cis, aucune pour­suite n’a pour l’heure été enga­gée, mais « cela pour­rait arri­ver bien­tôt », redou­tait le jour même son avo­cat. Ces actes pour­raient être pas­sibles d'une lourde peine d'emprisonnement.

Ancienne pro­pa­gan­diste chez Pervy Kanal

Marina Ovsiannikova ne fait pas l’unanimité au sein de l’opposition russe. Il convient de sou­li­gner que la jour­na­liste a fait par­tie de la chaîne télé­vi­sée Pervy Kanal, porte-​voix du Kremlin, pen­dant une ving­taine d’années, sans la moindre vel­léi­té d’opposition pour le gou­ver­ne­ment russe, ce que lui reproche jus­te­ment ses détracteur·rices. 

La jour­na­liste racon­tait le lun­di 14 mars, le jour de sa toute pre­mière action, avoir publié une vidéo sur Telegram pour expri­mer sa « honte » d’avoir « per­mis que des men­songes soient dif­fu­sés à la télé­vi­sion et que le peuple russe soit “zom­bi­fié” ». Depuis, elle tra­vaillait pour le média alle­mand Die Welt, avant de reve­nir au mois de juillet en Russie pour régler un conten­tieux lié à la garde de ses enfants. Durant ces mois hors de son pays natal, elle a réa­li­sé des repor­tages en Ukraine, où la jour­na­liste a fait face à une popu­la­tion, à juste titre, méfiante. Sur place, une consoeur ukrai­nienne, Olga Tokariuk, a notam­ment poin­té du doigt des repor­tages « mani­pu­la­teurs, incor­rects et condes­cen­dants »

En Ukraine notam­ment, beau­coup s'étonnent de la légè­re­té de ses peines, des amendes à 250 et 800€. De maigres condam­na­tions qui font dou­ter du véri­table divorce de Marina Ovsiannikova avec le Kremlin. Certain·es soup­çonnent une trom­pe­rie et laissent même entendre que ses actes anti-​guerre pour­raient être télé­gui­dés par Moscou, pour faire croire que la liber­té d’expression sub­siste encore dans le pays. 

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