Dans une tribune publiée dans Le Monde ce 8 décembre, quatorze femmes ayant dénoncé des faits de violence sexuelles de la part de Patrick Poivre‑d'Arvor et Nicolas Hulot répondent au président de la République qui s'est inquiété, au sujet de l'affaire Hulot, de l'émergence d'une « société de l'Inquisition ».
Elles ont eu le courage de mettre en cause deux hommes puissants, le journaliste Patrick Poivre‑d'Avror (PPDA) et l'ex-ministre Nicolas Hulot, en racontant avoir subi des agressions sexuelles voire des viols de leur part dans le cadre d'enquêtes journalistiques. En retour, lors du conseil des ministres du 1er décembre, le chef de l'Etat a adopté la position qu'il affectionne : celle du « en même temps ». Admettant qu'il était « très bien que la parole se libère » et affirmant ne jamais vouloir d'une « société de l’opacité ou de la complaisance », Emmanuel Macron a dans le même moment nuancé son soutien : « Nous ne voulons pas non plus d’une société de l’inquisition . »
Un message visant à contenter les critiques du mouvement #MeToo, qui a profondément heurté plusieurs femmes ayant récemment témoigné dans la presse contre PPDA et Nicolas Hulot. Nora Arbelbide Lete, Karin Bernfeld, Clémence de Blasi, Emmanuelle Dancourt, Aude Darlet, Cécile Delarue, Hélène Devynck, Maureen Dor, Justine Ducharne, Margot Cauquil-Guèze, Stéphanie Khayat, Camille Pascaud, Muriel Reus et Cécile Thimoreau ont donc choisi de répondre au chef de l'Etat dans une tribune publiée ce 8 décembre dans les pages du Monde. Dedans, elles contestent le bienfondé de la référence historique choisie par Emmanuel Macron : « Quel est le rapport entre nos récits et l’Inquisition ? De nos intimités exposées naîtrait le risque de replonger la France dans une des périodes les plus sombres et les plus unanimement détestées de l’histoire occidentale ? » Pour rappel, l'Inquisition, qui prit place dans plusieurs pays latins entre les XIIIème et XVIème siècles, est une juridiction catholique qui réprima de prétendus crimes d'hérésie, usa de torture et condamna à mort plusieurs milliers de personnes à la suite de procès sommaires.
Pour les signataires de cette tribune, être comparées à cette juridiction restée dans les mémoires comme le « symbole de l’obscurantisme, de la terreur et de l’arbitraire » ne passe pas. « Nous avons dit nos hontes les plus intimes, exposé nos larmes ravalées, expliqué nos silences imposés ou nos récits négligés. Ces témoignages ont été, pour beaucoup d’entre nous, difficiles et coûteux. […] Nous avons parlé par devoir citoyen », soutiennent-elles. Ces femmes reprochent au chef de l'Etat de les présenter comme « dangereuses » en les comparant à l'Inquisition et donc, au final d'apporter « une pièce de plus dans la machine à taire ». Au-delà de leurs cas personnels, ces femmes plus ou moins médiatiques se font entendre une nouvelle fois pour toutes les victimes anonymes de puissants ou d'hommes tout aussi anonymes.