silhouette photography of pregnant woman near window
© Camila Cordeiro

Témoignages : c'est com­ment, une gros­sesse en confinement ?

Six femmes qui sont tom­bées enceintes pen­dant le pre­mier confi­ne­ment et qui vont accou­cher pen­dant le second racontent leur gros­sesse, dans un contexte qui a appor­té autant d’avantages que d’inquiétudes.

Julia, 25 ans, Var

Je dois accou­cher de façon immi­nente, je suis au taquet ! Avec mon com­pa­gnon, nous avons conçu notre fille mi-​mars à Ibiza, où on a fait le pre­mier confi­ne­ment, dans la cam­pagne, sur un ter­rain par­ta­gé avec des amis et un pota­ger. Il a fal­lu attendre que l’épidémie se calme et que la fron­tière rouvre pour reve­nir. Il n’y avait pas d’avion, on a pris le bateau jusqu’à Barcelone, puis le train, puis un taxi pour pas­ser la fron­tière entre Portbou et Cerbère. C’était un peu la mis­sion, mais on vou­lait ren­trer pour se rap­pro­cher de la famille. Maintenant, nous sommes dans un vil­lage assez calme, avec une vie casa­nière. Même si on est entou­rés par un cli­mat de peur, on est dans un petit cocon. Nous avons choi­si d’accoucher à la mai­son : je m’y sens un peu plus en sécu­ri­té que dans un hôpi­tal. Avec tout ce qui se passe, je pré­fère être tran­quille chez moi. Ma seule inquié­tude, c’est que je ne sais pas quand nos familles pour­ront venir nous voir. C’est un peu dom­mage de rater les pre­mières semaines à cause du pro­to­cole sanitaire.

Maud, 33 ans, Seine-Saint-Denis

Je me suis tou­jours dit que si j’étais enceinte un jour, je ne chan­ge­rais rien, que je conti­nue­rai de faire du sport, d’être hyper active, de sor­tir, de voir mes copines. J’avais fan­tas­mé ce genre de gros­sesse et j’ai dû en faire le deuil. L’avantage, grâce au télé­tra­vail jusqu’à fin août, c’est que j’ai éco­no­mi­sé beau­coup de trans­ports et de fatigue pen­dant mon pre­mier tri­mestre ! Le confi­ne­ment m’a obli­gée à lever le pied, mais fina­le­ment, ce repos for­cé m’a per­mis de faire des choses vers les­quelles je ne me serais pas tour­née en temps nor­mal. Genre du yoga sur Zoom, un mas­sage pré­na­tal ou une séance d’ostéopathe. J’ai créé une petite bulle où je me concentre un peu plus sur ma gros­sesse. Mon com­pa­gnon sort moins le soir, on pro­fite aus­si de ce temps à deux. Si on avait conti­nué au même rythme, on aurait sans doute pré­pa­ré l’arrivée de notre gar­çon à l’arrache. Ma frus­tra­tion, c’est de ne pas avoir pu par­ta­ger ma gros­sesse avec ma belle-​famille ou mes copines. Certaines ne m’auront même pas vue enceinte.

Marion, 36 ans, Bègles

Je suis déjà maman d’une petite fille qui aura bien­tôt 5 ans. Son petit frère est un bébé vou­lu, atten­du et un peu craint pour cause de fausses couches avant. Je suis tom­bée enceinte au début du confi­ne­ment, de façon rela­ti­ve­ment sur­pre­nante : je me disais que ça allait mettre du temps à fonc­tion­ner. Je suis per­sua­dée que cette période inédite et folle a joué sur mon état d’esprit et a aidé. Au pre­mier tri­mestre, ça m’allait bien d’être en confi­ne­ment et en télé­tra­vail. Je suis mau­vaise men­teuse et grosse fêtarde, ça m’a évi­té de me retrou­ver dans des situa­tions incon­for­tables. Maintenant je com­mence à flip­per sur le pro­to­cole sani­taire. Je trouve ça com­plè­te­ment dingue de deman­der à une femme qui accouche de por­ter un masque. On ne devrait pas payer pour le manque de moyens accor­dés à l’hôpital public. Ça me met en colère, d’autant que mon gyné­co­logue a balayé ça d’un revers de la main. Je vais accou­cher dans une mater­ni­té qui est ouverte au bien-​être de la maman et du bébé, mais je ne suis plus sûre de rien dans les 100 der­niers mètres. 

Adelaïde, 30 ans, Paris

Ça fai­sait un an qu’on atten­dait que ça marche. Le confi­ne­ment a eu un impact psy­cho­lo­gique immé­diat : on a eu la chance de par­tir à la cam­pagne, mon rythme s’est ralen­ti. Après une pre­mière semaine de panique géné­rale pour mon entre­prise, j’ai rela­ti­vi­sé et j’ai lâché prise. Et je suis tom­bée enceinte. Mon métier de fleu­riste impose de se lever aux aurores, de por­ter des trucs lourds et d’avoir des semaines char­gées. L’arrêt for­cé des confi­ne­ments I et II me per­met de res­ter plus concen­trée sur ma gros­sesse. Je vais bien­tôt m’arrêter, mais je vais prendre le congé pré­na­tal mini­mum, de trois semaines, car j’ai la chance d’avoir une gros­sesse qui se passe très bien. Sur le pro­to­cole sani­taire, j’ai été ras­su­rée quand l’ordre des méde­cins a dit que le port du masque à l’accouchement n’était pas une obli­ga­tion. Hors de ques­tion qu’on me l’impose. Si j’ai été tes­tée, que je suis néga­tive, je deman­de­rai à l’enlever. Notre fille va arri­ver dans un monde étrange. Peut-​être que ça nous aurait frei­nés si je n’étais pas tom­bée enceinte pen­dant le pre­mier confinement.

Dora, 34 ans, Paris

Le fait que je sois enceinte en 2020 a un peu sau­vé l’année d’un point de vue du moral. Le télé­tra­vail a été un vrai sou­la­ge­ment au début : je tra­vaille dans un cabi­net d’avocats, j’ai des comptes à rendre. Par contre le confi­ne­ment a com­pli­qué les pre­miers rendez-​vous : j’ai fait deux écho­gra­phies de data­tion aux­quelles mon com­pa­gnon n’a pas pu assis­ter car l’échographe n’acceptait pas que les femmes soient accom­pa­gnées. Il a pu venir à celle du pre­mier tri­mestre car on était décon­fi­né. C’est pri­mor­dial pour moi qu’il puisse être là, car je vou­lais par­ta­ger ces moments de décou­verte du bébé avec lui, et puis je n’avais pas envie d’être seule face à une mau­vaise nou­velle poten­tielle. J’ai aus­si besoin qu’il ait le même degré d’informations que moi dans la pré­pa­ra­tion, car ce sera impor­tant pen­dant l’accouchement. Sa pré­sence à la mai­son de nais­sance ne fait aucun doute, mais il y a encore des aléas dans mon par­cours qui font que je pour­rais être redi­ri­gée dans une mater­ni­té classique. 

Sophie, 34 ans, Périgord

Je n’avais pas de désir conscient de tom­ber enceinte, ça a été une sur­prise. Je me disais que je ne vou­lais pas être mère, j’étais dans une rela­tion récente. Mais je l’ai bien accueilli. Je vis depuis un an en pleine cam­pagne et je me recon­ver­tis dans le domaine thé­ra­peu­tique. Le contexte sani­taire et poli­tique, j’y ai pen­sé, mais je trouve que le fait d’attendre un enfant dépasse le contexte. Que ce soit le Covid ou le risque ter­ro­riste, nous avons des contin­gences à gérer, tout le temps. Le pre­mier tri­mestre a été éprou­vant psy­cho­lo­gi­que­ment. Au décon­fi­ne­ment, je ne devais pas bou­ger de mon lit pour dif­fé­rents pro­blèmes médi­caux. J’ai appris à l’écho du deuxième tri­mestre que j’avais une gros­sesse patho­lo­gique, qui a néces­si­té de se rendre toutes les deux semaines à Bordeaux. Mais ça va. La situa­tion sani­taire a confor­té tous les choix que j’ai faits : quit­ter Paris pour le Périgord, adop­ter l’autonomie locale ali­men­taire, pra­ti­quer le boud­dhisme. Ça donne encore plus de sens à notre démarche pour accueillir au mieux un enfant dans ce monde.

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